samedi 30 mai 2015

Atarghatis, la déesse syrienne

Atargatis, la déesse syrienne


On attribue à tort à Lucien de Samosate, la ville de Samosatès en Syrie, au IIè siècle après J.- C. et écrivant dans un attique très pur, un opuscule intitulé De la déesse syrienne écrit en ionien par un Assyrien nommé Lucien, du IIè siècle av. J.C. Qu’est-ce qui me fait pencher pour une telle date ? D’abord, l’auteur ne prononce pas un mot de Zénobie et de la ville que la reine fonda, Palmyre. Ensuite, il visite une Hiérapolis intacte, donc avant les déprédations de Crassus en -53.  Les noms de la Syrie et de l’Assyrie sont identiques originellement, provenant tous deux de Sumrie, le pays des Sumériens.  Suétone, dans Néron, LVI, nous apprend que Néron fut longtemps un adepte fervent de cette déesse syrienne de caractère orgiastique, c’est-à-dire liée à des mystères, et  assimilée à la déesse romaine Bellone, qui aimait le sang et les rites déments. Apulée a mis en scène dans Les Métamorphoses,   p. 294 (la Pléiade),   des prêtres de cette déesse, dont l’un des noms nom était Atargatis (variante Derketo) ou Ma pou Men, déesse de Comana, ville du royaume galate  de Cappadoce.  Comana signifie en gaulois, non pas la  «  chevelue », ce qui ne voudrait rien dire, mais la fraternelle, comme dans Gallia comata, traduit à tort par la Gaule chevelue, alors que l’expression renvoie à la Gaule fraternelle ou unie.  Atargatis  était proche de Sabazios , assimilé à Dionysos, de Cybèle qui avait pour parèdre l’eunuque Attis et de Vénus Astarté  ou Atargatis, ou en latin Astrea, amante d’Adonis . Astarté-Atargatis  a été rapprochée du nom grec de Vénus, Aphrodite,  en latin Aprilis, en posant  apradatis  et de Amphitritè, la déesse de la mer, en posant apititè , le t pouvant être en réalité une cacuminale transcrite en grec comme tr,  apitritè.   Men, la lune,  est un autre nom de l’égyptienne Mnevis, qui a donné les noms de Minerva, archaïque Menerva pour Mnekvisa , Menerva , et de Mercurius, de Menkwrius, grec Hermès de Hermeias, métathèse de Menwkhweysas, Hermeysas.
Les traces du  dieu premier dans le culte de la déesse: le calmar colossal  

La préhistoire et les représentations des dolmens : le calmar et l’argonaute, symboles de fécondité, de vie et d’union.
L’argonaute , du grec argos, blanc,  et de nautès , navigateur, le navigateur de couleur blanche,   encore appelé le  nautilus rameur , est souvent confondu avec un autre céphalopode appelé aussi nautilus, en particulier par Jules Verne et le nom qu’il donna au sous-marin du Capitaine Nemo. Il  existe une célèbre description de l’argonaute, celle d’Elien, dans La personnalité des animaux, IX, 34, p. 236, volume1, (Budé) : 
« L’argonaute fait partie des poulpes, mais  il possède une coque ; Il monte à la surface en tournant sa coque vers le bas pour éviter de prendre l’eau et d’être refoulé vers le fond.
  Une fois à la surface des flots, quand le temps est calme et que les vents sont au repos, il renverse sa coquille sur le dos (elle flotte comme une barque), laisse pendre deux tentacules, un de chaque côté », et il rame et propulse son vaisseau naturel en se soulevant légèrement.
   Si au contraire il y a du vent, il étend et allonge ce qui lui servait jusque là de rames et les transforme en gouvernail, puis déplie ses autres tentacules entre lesquels se trouve une toile très fine qu’il déploie et dont il fait une voile.
  C’est de cette façon qu’il navigue quand il n’y a rien à craindre. Mais s’il est épouvanté par un poisson de grande envergure, il remplit sa coque en la submergeant, coule, emporté par le poids, et se soustrait à son adversaire en s’éclipsant. Plus tard, quand il est en sécurité, il remonte à la surface et reprend sa navigation. C’est de là que l’argonaute tire son nom [de nautilos, navigateur]. »
  Elien revient sur l’argonaute au livre XV, 12 : « Dans la mer Noire, ces chames, au cours de l’été, lorsque le temps de la moisson est arrivé, s’agglutinent les unes aux autres comme un troupeau et flottent légèrement à la surface : elles qui étaient auparavant pesantes, lourdes et incapables de flotter, perdent alors ce handicap. Elles évitent le vent du sud, fuient le vent du nord et ne supportent pas plus le vent d’est : ce qu’elles aiment, c’est quand la mer ne fait pas de vagues et que le vent d’ouest souffle des brises douces et caressantes. A la faveur de ces brises, elles quittent leur repaire, tout en gardant leur coquille bien close et hermétiquement fermée, sortent de leur cachette,  remontent à la surface et voguent dans une mer sans vagues. Ouvrant alors leurs couvercles, elles se penchent au dehors, comme des fiancées hors de leurs chambres nuptiales, ou comme des roses qui, exposées à la douce chaleur du soleil, se penchent hors de leur calice. Et ainsi elles prennent peu à peu confiance et s’abandonnent à la paresse et à l’oisiveté, bercées par leur ami le vent. Elles se font un lit d’un bord de leur manteau, dressent l’autre bord à la verticale, et c’est ainsi que naviguent ces chames, utilisant un bord de leur membrane   comme le fond d’une barque et l’autre  comme une voile. Elles se déplacent de cette façon par temps calme et serein, et quand vous les apercevez de loin, vous jureriez qu’il s’agit d’une escadre de navires. Mais si elles sentent qu’un bateau fait voile dans leur direction, qu’une bête approche ou qu’un poisson énorme arrive à la nage, elles se replient d’un seul coup dans leurs coquilles  et toutes en même temps se laissent couler et disparaissent. »Seule en effet  la femelle dispose d’une coquille ou mieux d’une nacelle, qui lui sert à abriter ses œufs et elle se loge au bord de  la lèvre de cette fragile coquille. Aristote, dans son Histoire des animaux, 622b 5-18, Oppien, Hal. , I, 340, Pline l’Ancien  dans son Histoire naturelle, IX, 887, ont aussi décrit  cette étonnante navigation. A noter que le nom de notre Nautilus pompilius contient un barbarisme, pompilius venant du nom propre Pompilius,  pour Nautilus pompilus ( grec pompilos), navigateur  processionnaire.  
On comprend comment la date des grands rassemblements d’argonautes, à l’époque de la moisson, les œufs des diverses espèces voisines et le foisonnement des argonautes sur la mer  ont pu inspirer les Ibères dans leurs représentations gravées sur les mégalithes. M. Houssaye, cité par Edmond Pottier, p.136, dans Bulletin de correspondance héllénique. Volume 31, 1907, PP. 115-138, « Documents céramiques du musée du Louvre » avec pour référence Perrot- Chippiez, VI, P. 936, et cf. Catalogue des Vases du Louvre, p. 190, pensait que les populations mycéniennes d’il y a quelque 4000 ans avaient été sensibles au  rôle générateur de vie du calmar. Mais Edmond Pottier et moi-même nous songeons plutôt , pour expliquer  le choix de cet animal, aux yeux énormes du  calmar colossal, -ce monstre envoyé par Poseidon contre Hippolyte. L’œil d’Osiris n’en est qu’une variante. Pottier écrit : « Sur l’œil fascinateur , employé en céramique comme protection contre le mauvais sort, voyez Saglio, Dictionnaire des Antiquités, figure 2889, ; Catalogue des Vases du Louvre, p.  723, 769, F120 à 122, 125, 114. Non seulement  l’hydre de Lerne avec ses tentacules, mais la Gorgone même, avec ses yeux énormes et ses cheveux en serpents, pourrait avoir des relations avec le poulpe- fétiche, cf. le fragment de vase trouvé à Orchomène (BCH, 1895, p. 169, figure3), que, d’après une autre pièce inédite du Musée du Louvre, je puis expliquer comme une tête de Gorgone. » Les arts premiers en conservent le souvenir (cf. mon blog Le serpent de mer dans la représentation des flèches faîtières kanak). Les boucles d’oreille furent primitivement un rappel des yeux latéraux si envoûtants du calmar, surtout les opercules et œils-de-chat. Le nom de la boucle d’oreille créole vient du latin  crotalia, pendants d’oreille initialement  formé de plusieurs perles, la consistance très dure de la perle comme sa forme même ressemblant à s’y méprendre à celles du cristallin du calmar,puis d’un cercle avec des perles rappelant le crotale ou serpent à sonnette.   
Voir aussi mon blog Les dolmens, pour de nombreuses autres représentations d’œufs, d’argonautes, de seiches , de calmars  et de pieuvres.  




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 Ci-dessus, le poulpe de Lufang en Bretagne avec ses yeux , l’intérieur des sinuosités  évoquant un œuf de seiche.

 La Crète mycénienne et son calmar.
Ci-dessous,Héraklès et l’hydre de Lerne
Cratère mycénien au  calmar  
Ce cratère est reproduit p.119,  dans Pottier, op.  cit.  On remarque les deux yeux et surtout les deux poches circulaires, dont la seconde est la poche à encre du calmar, également bien visibles toutes les deux  sur les flèches faîtières de la  Nouvelle-Calédonie.











Rhyton décoré d'un poulpe de style créto-mycénien reproduction procédé giclée
Ci-dessus un rhyton au poulpe
Le « style à poulpe », comme on l’a appelé, a produit des oeuvres impressionnantes de beauté et montre l’intérêt religieux et artistique de l’époque  pour les calmars, comme le célèbre vase à neuf anses ou comme le rhyton (vase à boire en forme de corne) ci-dessus. Mais c’est le plan du labyrinthe de Cnossos en Crète  qui semble avoir réalisé la plus belle représentation architecturale du calmar.



Ci-dessous, somptueuse  coupe mycénienne


Fruchtschale Kamares-Stil 06.jpg






Les Gaulois et le calmar colossal
Lucien de Samosate nous a décrit, dans un opuscule intitulé L’Hercule gaulois ou Ogmios, la mosaïque d’une villa gauloise au II e siècle ap. J.-C. L'identification d'Ogmios à Hercule était originellement exacte, mais ce n'était pas notre Hercule,le fils d'Alcmène,c'était  l'aîné des cinq Dactyles  qui portait aussi ce nom d'après une tradition de l'Elide, savoir gloire de Rheïa,-Rheaklès, puis gloire d'Arès, dieu de la guerre, -Arèiaklès, enfin gloire d'Héra-Junon.Le nom latin du sieu de la guerre est Mars, archaïque Mavors, de ma-avort, à rapprocher du grec génitif Areios et   éolien Areus pour Arès  et du  sanskrit marut, maruta,guerrier divin. Il faut poser ma-arut-s, puis , par métathèse , ma-avort-s. le nom de Rhéia a même origine, à partir de areywa. Les cinq "démons"(Héraklès, Epimédès, Idas ou Acésidas, Paeoneos et Iasos), appelés Dactyloi (en grec les 5 doigts, cf; la main de justice,digiti en latin) sont la personnification des bras du calmar colossal. Ils sont les servants de la déesse Rhéa-Atargatis et de Cybèle de l'Ida en Phrygie et en Crète et sont les patrons de la danse guerrière , de la magie et des mystères qu'ils ont inventés, notamment sur la côte d'Afrique du Nord.

             
1.. La forme sous laquelle ils représentent ce dieu a quelque chose de tout à fait étrange. C'est pour eux un vieillard, d'un âge fort avancé, qui n'a de cheveux [les 8 tentacules] que sur le sommet de la tête, et ceux qui lui restent sont tout à fait blancs. Sa peau est ridée et brûlée par le soleil, jusqu'à paraître noire comme celle des vieux marins. On le prendrait pour un Charon, un Japet sorti du fond du Tartare, pour tout enfin plutôt que pour Hercule. Cependant tel qu'il est, il a tous les attributs de ce dieu. Il est revêtu de la peau du lion, tient une massue dans la main droite, porte un carquois suspendu à ses épaules, et présente de la main gauche un arc tendu. C'est Hercule tout entier.
3.
Cependant je ne vous ai point encore dit ce que sa figure a de plus singulier. Cet Hercule vieillard attire à lui une multitude considérable, qu'il tient attachée par les oreilles. Les liens dont il se sert sont de petites chaînes d'or et d'ambre, d'un travail délicat, et semblables à de beaux colliers. Malgré la faiblesse de leurs chaînes, ces captifs ne cherchent point à prendre la fuite, quoiqu'ils le puissent aisément, et loin de résister, de roidir les pieds, de se renverser en arrière, ils suivent avec joie celui qui les guide, le comblent d'éloges, s'empressent de l'atteindre, et voudraient même le devancer, mouvement qui leur fait relâcher la chaîne et donne à croire qu'ils seraient désolés d'en être détachés. Mais ce qui me parut le plus bizarre, c'est ce que je veux vous dire sans délai. L'artiste ne sachant où attacher le bout des chaînes, vu que la main droite du héros tient une massue et la gauche un arc, a imaginé de percer l'extrémité de la langue du dieu et de faire attirer par elle tous les hommes qui le suivent : lui-même se retourne de leur côté avec un sourire. »
Les chaînes sont les tentacules et les têtes sont les ventouses. Quant à la langue, il s’agit de la radula ou langue râpeuse des calmars. Sur leurs pièces de monnaie, les Gaulois ont représenté leur dieu Ogmios –Hercule, le calmar géant, comme on peut le voir sur ces reproductions de pièces en orichalque de la fin du Ier siècle av. J. –C. , émises lors d’un soulèvement contre les Romains.

 
2 photos : la première représente la divinité Epona, la seconde une représentation de Vercingétorix en tant que chef des rebelles, avec des tentacules lui sortant du nez et des cheveux qui sont autant de tentacules également. On peut observer l’œil dont la vivacité indique le calmar divin.



La déesse syrienne de Lucien : Hiérapolis : les chaînes tentacules, le diamant, la lampe, le sceptre,  la quenouille, et le vivier
L’extrémité renflée des deux bras plus longs que les tentacules du calmar s’appelle la masse et les Anciens l’ont considérée comme un phallus, signe de vie et de puissance présent sur les monnaies ou dans les temples, comme à Hiérapolis en Syrie. Cédons la parole à l’auteur de l’opuscule prêté à Lucien :  
28. L’emplacement même où on a bâti ce temple est une colline ; il est situé tout à fait au milieu de la ville, et environné de deux murailles. L'une de ces deux murailles est ancienne, l'autre n'est pas de beaucoup antérieure à notre époque. Les propylées sont du côté du vent Borée, sur une étendue d'environ cent brasses, Sous ces propylées, sont placés des phallus érigés par Bacchus à une hauteur de trente brasses. Sur l'un de ces phallus, un homme monte deux fois par an, et demeure au haut du phallus pendant sept jours. La raison de cette ascension, la voici : le peuple est persuadé que cet homme, de cet endroit élevé, converse avec les dieux, leur demande la prospérité de toute la Syrie, et que ceux-ci entendent de plus près sa prière. D'autres pensent que cela se pratique en l'honneur de Deucalion, et comme souvenir de ce triste événement, lorsque les hommes fuyaient sur les montagnes et montaient au haut des arbres par crainte de l'inondation. Mais cela me parait peu croyable ; il me semble qu'ils agissent ainsi en l'honneur de Bacchus. Voici sur quoi se fonde cette conjecture : tous ceux qui dressent des phallus à Bacchus placent sur ces phallus mêmes des hommes de bois. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Aussi me semble-t-il que c'est pour imiter l'homme qui monte [à cheval].
16. J'aime beaucoup ce que disent de ce temple ceux dont l'opinion concorde avec celle des Grecs, à savoir que la déesse est Junon [Rhéa en réalité] et l'édifice une œuvre de Bacchus, fils de Sémélé. Bacchus, en effet, vint en Syrie, dans son fameux voyage éthiopien, et l'on voit dans ce temple une foule d'objets qui indiquent que Bacchus en est le fondateur, entre autres des vêtements barbares, des pierreries des Indes et des défenses  d'éléphants que Bacchus rapporta d'Éthiopie. En outre, on voit dans le vestibule deux énormes phallus avec cette inscription : «  Ces phallus ont été élevés par moi, Bacchus, en l'honneur de Junon, ma belle-mère. » Cette preuve me paraît suffisante. Voici pourtant dans ce temple un autre objet consacré à Bacchus. Les Grecs lui dressent des phallus sur lesquels ils représentent de petits hommes de bois qui ont un gros membre : on les appelle névrospastes [des marionnettes obscènes actionnées par un fil].  On voit, en outre, dans l'enceinte du temple, à droite, un petit homme d'airain assis, qui a un membre énorme…
29. Or, voici comment il s'y prend. Il passe une grosse chaîne autour du phallus et de son corps ; puis il monte au moyen de morceaux de bois qui font saillie sur le phallus, et assez larges pour qu'il y pose le pied. A mesure qu'il s'élève, il soulève la chaîne avec lui, comme les conducteurs de chars soulèvent les rênes, Si l'on n'a jamais vu cela, il n'est pas qu'on n'ait vu monter à des palmiers, soit en Arabie, soit en Égypte, ou ailleurs ; on comprend alors ce que je veux dire. Parvenu au terme de sa route, notre homme lâche une autre chaîne qu'il porte sur lui, et, par le moyen de cette chaîne qui est fort longue, il tire à lui tout ce dont il a besoin : bois, vêtements, ustensiles ; il s'arrange avec tout cela une demeure, une espèce de nid, s'y assied, et y séjourne le temps dont j'ai parlé [sept jours] La foule qui arrive lui apporte, les uns de l'or, les autres de l'argent, d'autres du cuivre ; on dépose ces offrandes devant lui, et l'on se retire en disant chacun son nom. Un autre prêtre est là debout, qui lui répète les noms, et, lorsqu'il les a entendus, il fait une prière pour chacun. En priant, il frappe sur un instrument d'airain, qui rend un son bruyant et criard. L'homme ne dort point. S'il se laissait aller au sommeil, on dit qu'un scorpion monterait jusqu'à lui, et le réveillerait par une piqûre douloureuse. Telle est la punition attachée à son sommeil. Ce qu'on dit là du scorpion est saint et divin ; mais est-ce bien vrai ? Je ne saurais l'affirmer. Il me semble qu'il y a de quoi tenir un homme éveillé, quand on craint de tomber de si haut. Mais en voilà assez sur les gens qui grimpent aux phallus. »
Les deux chaînes sont, évidemment, les deux bras de l’octopode.
32. Junon offre aux regards une plus grande variété de formes : dans l'ensemble, c'est bien Junon ; mais il y a chez elle le des traits de Minerve, de Vénus, de la Lune, de Rhéa, de Diane, de Némésis et des Parques. D'une main, elle tient un sceptre, de l'autre une quenouille. Sa tête, couronnée de rayons, porte une tour et est ceinte du diadème, dont on ne décore ordinairement que le front d'Uranie. Ses vêtements sont couverts d'or, de pierres infiniment précieuses, les unes blanches, les autres couleur d'eau, un grand, nombre couleur de feu : ce sont des sardoines- onyx, des hyacinthes, des émeraudes, que lui apportent les Égyptiens, les Indiens, les Éthiopiens, les Mèdes, les Arméniens et les Babyloniens, Mais l'objet qui mérite le plus d'attention est celui que je vais dire. Cette statue porte sur sa tête un diamant qu'on appelle la lampe. Ce nom lui vient de son effet. Il jette durant la nuit une lueur si vive, que le temple en est éclairé comme par des flambeaux ; dans le jour, cette clarté est beaucoup plus faible ; mais  la pierre conserve pourtant une partie de ses feux. Il y a encore dans cette statue une autre merveille. Si vous la regardez en face, elle vous regarde ; si vous vous éloignez, son regard vous suit. Si une autre personne fait la même expérience d'un autre côté, la statue en fait autant pour elle.
Le sceptre de la divinité consiste dans les deux bras du calmar  entremêlés, comme la quenouille.   L’œil fascinateur du monstre se retrouve dans ce  diamant  qu’on appelle la « lampe ». Mais la lampe est aussi le prétexte à un grand sacrifice d’animaux au début du printemps :
49. De toutes les fêtes que j'ai vues, la plus solennelle est celle qu'ils célèbrent au commencement du printemps. Les uns l'appellent le bûcher, et les autres la lampe. Voici ce qui s'y pratique. On coupe de grands arbres ; on les dresse dans la cour du temple ; on amène des chèvres, des brebis, et d'autres animaux vivants que l'on suspend aux arbres. L'intérieurdu bûcher est rempli d'oiseaux, de vêtements, d'objets d'or et d'argent. Une nombreuse multitude accourt à cette fête, de la Syrie et de toutes les contrées d'alentour ; chaque peuple y apporte ses dieux et les statues qu'ils ont faites à leur ressemblance. »
Parmi les quelque 200 prêtres du temple, tous habillés de lin blanc, les prêtres appelés pyrophores sont chargés du bûcher.
Près du temple, il y a un lac profond ou plutôt un vivier avec des poissons sacrés. Au centre se trouve l’autel consacré au divin céphalopode.
  45. A peu de distance du temple, il y a un lac dans lequel on nourrit une grande quantité de poissons sacrés de toute espèce. Quelques-uns sont devenus énormes. Ils ont des noms, et ils viennent quand on les appelle. J'en ai vu un entre autres qui avait un ornement d'or ; c'était un bijou attaché à sa nageoire ; je l'ai vu souvent avec son bijou.
46. La profondeur de ce lac est très considérable ; je ne l'ai pas sondée, mais on m'a dit qu'elle était au moins de deux cents brasses. Au milieu s'élève un autel de marbre. On dirait, au premier coup d'œil, qu'il flotte, porté sur l'eau, et la foule le croit ainsi ; mais je crois, pour ma part, que l'autel est soutenu sur une haute colonne. En tout temps, il est couronné de guirlandes, et l'encens y fume sans cesse. Beaucoup de gens, couronnés de fleurs, s'y rendent chaque jour à la nage, afin d'y faire leur prière.
47. On célèbre encore dans ce temple de grandes solennités. On les appelle descentes au lac, parce qu'en ces fêtes toutes les statues des dieux descendent sur les bords du lac, Junon y arrive la première pour sauver les paissons, et de peur que Jupiter ne les voie le premier ; car si cela arrivait, ils mourraient tous. Jupiter cependant vient pour les voir, mais Junon se place devant lui, l'empêche de les regarder, et, à force d'instances et de supplications, elle le congédie.[l’œil de Jupiter- le calmar foudroie les poissons]
33. Entre les deux statues [de Jupiter et de  Junon] on en voit une troisième égale ment d'or ; mais elle n'a rien de semblable aux deux autres. Sa forme ne lui est point particulière : elle tient de celle des autres dieux. Les Assyriens l'appellent le Séméion [signal du départ] sans autre désignation particulière. Ils ne disent ni son origine, ni ce qu'elle re- présente. Les uns croient que c'est Bacchus, les autres Deucalion, d'autres Sémiramis. Sur sa tête, en effet, elle porte une colombe d'or, emblème, qui la fait prendre pour la statue de Sémiramis. On la fait descendre deux fois par an jusqu'à la mer, pour aller chercher l'eau, comme je l'ai raconté.
[Il s’agit vraisemblablement de la déesse syrienne, Atargatis, dont il ne faut pas prononcer le nom, dont la colombe était l’attribut (le nom d’ Artémis n’en est qu’une variante,  mis signifiant colombe en syrien , atis en phénicien)].
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Quant à Sémiramis, elle est la fille de cette  déesse syrienne Atargatis ou Derceto qui vivait dans un lac voisin d’Ascalon et prenait souvent  la forme d’une sirène. Elle expose son enfant et fait mourir son père, Caÿstre. Ce sont des colombes qui élèvent la future Sémiramis, d’où son nom, mis signifiant colombe en syrien (cf. Artémis). Au cours de sa vie, elle conçut le plan de conquérir l’Inde et s’y prépara pendant plusieurs années. Elle parvint à traverser l’Indus, mais fut bientôt blessée et mise en déroute sans que personne osât la poursuivre au-delà de ce fleuve,  sur les bords duquel elle conquit une grande cité, celle qu’on connaît aujourd’hui sous le nom de Mohendjo Daro (Daro signifiant fleuve, cf  daria, de la racine ibère ou ouigour adusa), dite représentative  de la civilisation de l’Indus.  







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Le mystérieux  jardin ou vivier suspendu de Sémiramis.
Les archéologues n’ont jamais pu retrouver les jardins suspendus de Babylone créés par la reine Sémiramis, si bien que certains les ont situés à Ninive ou ailleurs. Mais , comme dans la cité de Mohendjo Daro, où l’on trouve des terrasses  de briques, on n’a pas suffisamment fait attention au fait qu’il s’agissait peut-être d’un vivier suspendu. Selon Diodore de Sicile, II, 4 et suivants, et 19 et suivants ,  ces « jardins » étaient formés par la superposition de terrasses carrées et chacune de ces terrasses reposait sur des galeries voûtées en pierres de taille jointoyées avec de l’asphalte et recouvertes d’une épaisse lame de plomb . Sur cette couche de plomb était posée de la terre végétale. On peut se demander comment l’eau , nécessaire en grande quantité à l’arrosage des  plantes,  ne les faisait pas pourrir, puisqu’elle ne pouvait s’écouler à travers la couche de plomb. Aussi est-ce que je songerai plutôt à un vivier suspendu en l’honneur de Derceto, la mère de Sémiramis. Voici quelques extraits d ‘autres textes anciens, en particulier le texte de Strabon :
Diodore de Sicile : Les plates-formes des terrasses étaient composées de blocs de pierres dont la longueur, y compris la saillie, était de seize pieds sur quatre de largeur. Ces blocs étaient recouverts d'une couche de roseaux mêlés de beaucoup d'asphalte ; sur cette couche reposait une double rangée de briques cuites, cimentées avec du plâtre ; celles-ci étaient, à leur tour, recouvertes de lames de plomb, afin d'empêcher l'eau de filtrer à travers les atterrissements artificiels, et de pénétrer dans les fondations. Sur cette couverture se trouvait répandue une masse de terre suffisante pour recevoir les racines des plus grands arbres. Ce sol artificiel était rempli d'arbres de toute espèce, capables de charmer la vue par leur dimension et leur beauté. Les colonnes s'élevaient graduellement, laissaient par leurs interstices pénétrer la lumière, et donnaient accès aux appartements royaux, nombreux et diversement ornés. Une seule de ces colonnes était creuse depuis le sommet jusqu'à sa base ; elle contenait des machines hydrauliques qui faisaient monter du fleuve une grande quantité d'eau, sans que personne pût rien voir à l'extérieur. Tel était ce jardin qui, comme nous l'avons dit, fut construit plus tard. »
Flavius Josèphe, Contre Apion, I, XIX, 141 : « Dans cette résidence royale, il fit élever de hautes terrasses de pierre, leur donna tout à fait l'aspect des collines, puis, en y plantant des arbres de toute espèce, il exécuta et disposa ce qu'on appelle le parc suspendu, parce que sa femme, élevée dans le pays mède, avait le goût des sites montagneux. »
Strabon, Géographie, XVI: « Babylone est située, elle aussi, dans une plaine. Ses remparts ont trois cent soixante-cinq stades de circuit, trente-deux pieds d'épaisseur et cinquante coudées de hauteur dans l'intervalle des tours, qui elles-mêmes sont hautes de soixante coudées. Au haut de ce rempart on a ménagé un passage assez large pour que deux quadriges puissent s'y croiser. On comprend qu'un pareil ouvrage ait été rangé au nombre des sept merveilles du monde, et le Jardin suspendu pareillement. Ce jardin, immense carré de quatre plèthres de côté, se compose de plusieurs étages de terrasses supportées par des arcades dont les voûtes retombent sur des piliers de forme cubique. Ces piliers sont creux et remplis de terre, ce qui a permis d'y faire venir les plus grands arbres. Piliers, arcades et voûtes ont été construits rien qu'avec des briques cuites au feu et de l'asphalte. On arrive à la terrasse supérieure par les degrés d'un immense escalier, le long desquels ont été disposées des limaces ou vis hydrauliques, destinées à faire monter l'eau de l'Euphrate dans le jardin, et qui fonctionnent sans interruption par l'effort d'hommes commis à ce soin. L'Euphrate coupe en effet la ville par le milieu. Sa largeur est d'un stade et le jardin suspendu le borde. »
Précisons qu’aucun de ces auteurs n’a vu, de ses yeux, ces fameux jardins, ce qui explique leurs contradictions..


Les souvenirs du déluge et de l’Atlantide

Qu’est-ce que le bénitier qui orne nos églises ? C’est, dit le Littré, « un vase consacré  à l’eau bénite ».  Ce n’est que tardivement qu’on a utilisé à cette fin  des coquillages dans nos églises. On a retrouvé néanmoins,  dans la Sardaigne préhistorique,   des bénitiers à fonction religieuse, à l’entrée de lieux anciennement consacrés. 
L’eau benoistier (du bénitier), comme on disait au Moyen Age, demeure toujours sacrée et, lorsqu’on doit la renouveler, on la verse derrière l’église, dans un endroit secret. 
Frazer a expliqué dans Le Rameau d’or ce qu’est la magie imitative : il s’agit, ici, pour éviter un nouveau déluge qui engloutirait les terres et noierait les hommes comme lors de l’immersion de l’Atlantide ou du déluge de Deucalion et de Noé,  de verser de l’eau dans un trou qui l’absorbe, situé aujourd’hui derrière la sacristie en principe.
Voici ce qu’écrivait  Lucien ll y a quelque mille neuf cents ans, dans La Déesse syrienne qui lui est prêtée:
48. Les plus grandes de ces solennités sont celles que l'on célèbre sur les bords de la mer. Je n'en puis rien dire de certain, attendu que je n'y suis pas allé moi-même et que je n'ai jamais essayé ce voyage ; mais j'ai vu ce qui se fait au retour, et je vais le rapporter. Chaque personne porte un vase rempli d'eau, scellé avec de la cire.[le premier bénitier, plein d’eu salée et scellé] On ne rompt pas soi-même le cachet pour répandre l'eau, mais il y a un prêtre qui demeure près du lac : il reçoit les vases, examine le cachet, reçoit un salaire, en lève le lien et gratte la cire ; cet office vaut une grande quantité de mines à ce prêtre  Ensuite on va porter le vase dans le temple où l'on fait la libation. La fête se termine par un sacrifice, après lequel chacun se retire.

Les premiers hommes   furent punis de leur impiété par un événement terrible. Tout à coup la terre laisse échapper une énorme quantité d'eau ; il tombe de grandes pluies, les fleuves débordent, la mer passe par-dessus ses rivages , tout n'est plus qu'une masse d'eau où le genre humain périt. Deucalion seul est réservé pour une seconde génération, à cause de sa droiture et de sa piété. Voici comment il fut sauvé : il avait un grand coffre ; il y fait monter ses enfants et ses femmes. Lorsqu'il y montait, les porcs, les chevaux, les lions, les serpents et les autres animaux qui vivaient sur la terre viennent à lui, couple par couple. Il les reçoit tous. Ils ne lui font aucun mal ; au contraire il règne entre eux une grande amitié, grâce à une influence divine. Tous ensemble surnagent dans le coffre, tant que l'eau recouvre la terre. Voilà ce que les Grecs racontent de Deucalion.

13. Pour ce qui suit, les habitants d'Hiérapolis rapportent un fait on ne peut plus surprenant ; à savoir que dans leur pays il se fit une grande ouverture par laquelle l'eau [du déluge qui engloutit l’Atlantide et les terres habitées] fut toute absorbée. Deucalion, après cet événement, dressa des autels et éleva, au-dessus de l'ouverture, un temple qu'il consacra à Junon [Rhéa]. J'ai vu l'ouverture située sous le temple : elle n'est pas très grande. Fut-elle plus large autrefois, alors qu’elle est devenue si petite aujourd'hui, je n'en sais rien,  mais elle est petite. Comme preuve de ce fait, on pratique encore maintenant cette cérémonie : deux fois l'année on fait venir dans le temple de l'eau de mer. Ce ne sont pas seulement les prêtres qui l'apportent ; mais la Syrie, l'Arabie entière, ainsi que plusieurs peuples qui habitent au delà de l'Euphrate ;  ils descendent sur les bords de la mer et y puisent de l'eau ; puis ils la répandent dans le temple, d'où elle descend ensuite dans l'ouverture, et celle-ci, malgré sa petitesse, en reçoit une grande quantité.
 En agissant de la sorte, ils prétendent suivre une loi instituée dans ce temple par Deucalion, pour être un souvenir et de malheur [le déluge] et de bienfait [la mise hors d’eau des terres] Telle est l'antique tradition qui a cours chez eux au sujet de ce temple.

Dans la Hiérapolis turque, il existe pareillement une caverne qu’on  appelle le Plutonium, l’antre du dieu des enfers, qui remplissait le même office, avec cette particularité qu’il s’y trouve des eaux chaudes volcaniques consacrées à Hadès ou Pluton, de là son nom.
De même, le coquillage, appelé shank ou conque tibétaine qui pare les autels brahmanistes , comme la conque de triton des insulaires du Pacifique, est censé être une écope que le mort embarque avec lui sur sa pirogue destinée à passer les mers diluviennes d’outre-tombe. L’écope lui permet d’éviter que sa pirogue ne se remplisse d’eau lors du franchissement des cataractes.  Le coquillage des autels brahmanistes est , en principe, sinistrogyre, comme la svastika qui orne les tombes basco- ibère,    c’est-à-dire que ses spires  s’enroulent en sens inverse de la marche du soleil, ce qui est rare dans les espèces de coquillages: en effet,il s’agit, là encore par magie imitative,de faire que le soleil aille en sens inverse de sa marche habituelle, de façon que ne se reproduise pas de nouveau déluge (attribué au soleil).  































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