vendredi 13 janvier 2017

LA SIGNIFICATION DES MENHIRS EN LIAISON AVEC L'AGRICULTURE

LES  MENHIRS ET LA NAISSANCE  DE L’AGRICULTURE       
                                                           
La fonction du menhir : un catalyseur magique de la percée végétative.
James George Frazer, dans Le Rameau d’or,  Balder le Magnifique, Ed. Robert Laffont, collection Bouquins, Paris, 1984, 4 vol., vol .4,   p. 98,  écrit : « Dans plusieurs parties de la Bavière, on pensait que la hauteur des tiges de  lin dépendrait de celle des sauts des jeunes gens. » Au Vanuatu, sur l’île Pentecôte, le spectaculaire saut du gaul (mot signifiant plongeoir),  toujours pratiqué malgré les accidents mortels et consistant  à sauter du point le plus haut, est censé faire pousser les ignames  d’autant plus profondément  que le saut aura été accompli du plus haut plongeoir . En Nouvelle-Calédonie existaient de très précieuse pierres à ignames et pierres à taros, sur lesquelles les sorciers canaques faisaient encore, il n’y a pas si longtemps, leurs  conjurations secrètes. Ces pierres à ignames ou à taros étaient les équivalents en miniature des pierres  pour l’orge, le  sésame ou le blé qu’étaient  les menhirs. Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, à Arama,   il existe même une quarantaine de petites pierres levées : elles sont censées favoriser magiquement la pousse des cocotiers et, anciennement,  chaque clan avait la sienne, comme au Vanuatu chaque clan avait l’un des 56 plongeoirs de l’île Pentecôte. .
On retrouve en France des  restes analogues  de  superstition, par exemple   dans l’Orne, avec le menhir de Passais qui, au  printemps, lorsqu’on entend le coucou chanter pour la première fois, est encore une invite pour le passant agriculteur, s’il désire  avoir une récolte de blé  abondante, à toucher le menhir de la main et à tâter en même temps le « blé» » présent dans son porte- monnaie. Nos épis de faîtage au nom symbolique reposaient sur la même croyance que, grâce à ces talismans,  les récoltes croîtraient aussi haut que  ces ornements. L’érection d’un menhir avait ainsi  pour but de mimer analogiquement la croissance de l’orge ou d’une autre céréale,  de la stimuler et de la favoriser par magie imitative. Frazer (op. cit, vol.  III, Esprits des blés et des bois, p. 26) écrit du « Dionysos de l’arbre » que « son image n’était souvent qu’un poteau planté en terre, sans bras  », imitant l’arbre fruitier qu’il s’agissait de faire pousser par sympathie. .
  Dans le domaine égyptien, le djed, originellement dédié au blé, avec la représentation des  pailles successives de l’épi, est l’équivalent oriental du menhir ; de même, obéliscos, obélisque,  est un mot renvoyant au blé germant (bel, blé, +-iskos, commençant).. Il en va de  même pour la pyramide, mot d’origine grecque  , dont il faut rapprocher le grec pyros, froment, et ses dérivés : pyramis, pyramidos, pyramide, qui a le sens  second de gâteau rituel de farine de sésame  qu’on donnait à celui qui restait éveillé toute une nuit et pyramous, pyramountos,   gâteau rituel  d’orge  qu’on donnait aussi comme prix d’une danse, celle de la grue , consacrée à Dèmèter et qui annonçait l’époque des semailles.. Il faut rapprocher  le génitif grec puramountos  du  latin  frumentum, froment, et le grec pyros,  blé, du latin  far, épeautre, le f latin correspondant à un p en grec. . Le pharaon qui dort  dans la base de la pyramide est comme le grain, provisoirement mort pour renaître. On peut leur appliquer ce que Charles Péguy, disait de la cathédrale de Chartres :
 « C’est l’épi le plus dur qui soit jamais monté
 « Vers un ciel de clémence et de sérénité… »
Le groupement des quelque 3000 menhirs  de Carnac appelle quelques explications. Il y a trois alignements séparés, appartenant peut-être chacun jadis à une tribu : celui du Ménec, celui de Kermario et  celui de Kerlescan.
L’alignement du Ménec  compte 1100 menhirs, rangés par ordre de taille croissante pour  représenter  les différents stades de  croissance de la céréale, depuis 60 cm de hauteur vers le littoral  jusqu’à 4 mètres pour le plus grand. .
 L’alignement de Kermario compte 1030  menhirs alignés sur dix rangées (peut-être une rangée par clan),  des plus courts sur les collines aux plus hauts.
L’alignement de Kerlescan compte 555 menhirs partant de la rivière Crach  et disposés aussi des moins élevés aux plus hauts .
Dans ces trois ensembles existe ce qui nous paraît, au premier regard du moins, une anomalie : à côté du menhir le moins élevé, haut  de 0,60 ou 0,70 cm,  on  trouve un menhir de 3 mètres. Ce dernier sert sans doute de repère et de modèle  pour la taille que doivent atteindre les céréales. Ces menhirs « aberrants » présentent  de curieuses  ondulations gravées qui, même si elles ont pu être  prises pour celles d’un serpent, représentent  en réalité les ondulations de la moisson arrivée à maturité.


 
Le nom des menhirs, révélateur de leur destination agraire.
  Les menhirs peuvent certes  s’appeler simplement  pierres droites, pierres levées, pierres longues (en breton menhir, de men, pierre,  et de  hir, longue), longperriers en Seine-et-Marne,  pierriers, poiriers. Toutefois, l’es appellations qui font allusion à des céréales  est fréquente. Dans la région d’Illiers,  on a une Pierre à Gland,  du latin  granum,  grain (cf. anglais corn, blé, gaulois Carnac), et on en avait une autre  à Morvilliers où le château du Gland perpétue son souvenir. Le nom de l’épi, qu’il soit ibère ou indo-européen, a donné  beaucoup de dénominations,  s incomprises et  très altérée,  de nos jours .
Le nom donné aux menhirs par les « Ibères », habitants antérieurs aux Indo-européens  (Gaulois, puis Romains) et bâtisseurs présumés des mégalithes.
   Grâce à  l’auteur latin  d’un Traité d’agriculture, Res rusticae (I, 48,3).   Varron, au Ier siècle avant  J.- C, nous avons conservé le nom ibère, indéclinable, de la pointe de l’épi, frit. La Pierre Frite, pour les Ibères, était  la pierre -épi et elle a donné en Eure-et-Loir la Pierre –Xi--Frite (de axis,  pieu , et de  frit , en forme d’épi),  nom de menhir passé à un dolmen du Boulay- Thierry près de Nogent-le-Roi , ainsi que  Saint -Jean- Pierre- Fixte près de Nogent-le-Rotrou, ou bien la  Pierre Fiche à Alluyes  ; ailleurs , on  a la  Pierre -Fixte,  la Pierre Fite, Peyrefitte. On trouve aussi ce nom en Alsace dans le nom du  menhir de Breitstein, de frit -stone, la pierre -épi, ou en Moselle,  à Marty,   dans  le nom de Frescaty, de frist-sk, ask signifiant commencement de pointe , -aty provenant du  suffixe de ressemblance  ibère –eida ou –eita, , comme à Toulouse, à l’hôtel Assézat, avec  le menhir de Frescaty qui  y a été déplacé depuis Lacaune. Songeons aussi  au nom de  l’Afrique (dont  latin Africa  désigne la Tunisie actuelle,  riche précisément en mégalithes),nom christianisé au masculin   à Saint- Affrique  près de Millau et Saint-Affrique du- Causse à Gabriac dans l’Aveyron, et , dans le Tarn, à Saint-Affrique –les- Montagnes. Pour la Corse, il n’est que d’invoquer le site préhistorique de Filitosa (de  fritosa , lieu riche en menhirs , qui donne aussi  Frileuse en Eure-et-Loir, dans la commune de  Péronville ou dans la commune d’Orgères-en-Beauce),  la   Petra Frisgada (de fric-ada) dans la commune de Cambia, ;  pour la Sardaigne,, Filigosoa et dans l’Antiquité le nom de la  Phrygie=. Pour les aux Pays-Bas,  la Frise ou  Frisia (de frit-sk-ia,  en a gardé le souvenir..
Les noms de menhir d’origine indo-européenne.
a)Le nom indo-européen de l’épi, spica en latin.
Spica donne, soit la Pierre -By (entre Charray et Moisy),  soit la Pierre Pique,   réinterprétée dans ce dernier cas comme la Pierre Lance. Spicada, la pierre qui ressemble à un épi, a donné phonétiquement  la Pierre Piquée, visible derrière une grille à Montjouvin (Illiers). Mais le mot épi était paronyme en ancien français du mot épieu, qui vient  du  francique speut, ce dernier  ayant  donné le nom d’une céréale, l’épeautre, de spelta, germanique spiess.  Le diminutif  espiet,  épillet, épi naissant, s’est confondu avec espiet, petit épieu,  orthographié en Eure-et-Loir Epiais ou  Epieds –en -Beauce et   signifiant pareillement la Pierre- épi naissant  à l’origine.
b) L’épi sans sa balle.
Une racine religieuse désignait la tige sans la balle et elle se retrouve dans le latin culticula, nom , dans la langue augurale , d’une baguette de bois  sacrée , sans son écorce, employée dans les sacrifices à Rome. De là le mot couteau dans la Pierre- couteau, c’est-à-dire la pierre épi, et dans le nom de  Coltainville, la ferme (villa) de la pierre- épi (coltain); mais par confusion avec le latin cultellus, qui donne couteau au sens d’instrument de cuisine tranchant, nous avons aujourd’hui, au pluriel,  la Pierre aux Couteaux.
c) L’épi avec sa balle.
Un radical ak- désignait la pointe de l’épi lorsqu’elle était  encore enveloppée de sa balle de paille. En latin, il donne acus, de akuks-, collectif acuculus qui nous a laissé en Corse Cucuruzzu, nom d’un autre  site préhistorique fameux, venant  de cucur- osus, riche en pierres- épis, Cocurès en Lozère.. De acucula, on a le mot français  aiguille qui,  au début, garde son sens premier (aiguille de pin) avant de prendre le sens moderne d’instrument métallique utilisé pour piquer et pour  coudre, avec ses connotations de magie noire  et de maléfices. Ainsi le nom de  menhir pierre aiguille renvoie-t-il d’abord à l’épi de blé ; mais le mot n’est plus compris et on a au pluriel la pierre aux aiguilles avec sa connotation d’envoûtement.
De acu- et du gaulois blato, désignant toute céréale, le blé en particulier, on a Ecublé, qui désigne un menhir, aujourd’hui  encastré sous le mur du cimetière  (commune de Tremblay -les- Villages) ou avec man désignant le sésame (grec sèsamôn) ou le millet (radical mel ou man) Ecoman à Viévy -le- Rayé dans le Loir-et-Cher.
  II y a parfois  eu confusion entre acucula, pointe d’épi de blé ou d’orge avec sa balle, et cuculla, capuchon, si bien que l’on a : pierre coquelée ou  coquelet, pierre aux coqs, chantecoq (Ymeray),  pierre cochée à Droué (Loir-et-Cher), nom passé à un polissoir (pour les polissoirs , voir  mon blog http://coldcase28.blogspot.fr/) et compris aujourd’hui comme marqué de coches,  cocherelle (nom transféré au polissoir de Sorel- Moussel), ,pierre coverte (à Varize  et à  Ver- lès- Chartres), pierre coverclée (Moriers), couvre- clair (nom transféré au polissoir de Neuvy –en- Dunois accompagné d’un dolmen ).
Chantecoq et Pissecoq
. Explicitons chantecoq à Ymeray, nom composé dans lequel coq vient de acucula, pointe d’épi, et chante d’un nom du grain d’ orge (apparenté au   nom maltais ancien  de l’orge, carl,    l’ensemble signifiant pointe
d’épi d’orge. De même,  dans  le nom de Chantemesle (Logron), désignant à l’origine un  mégalithe aujourd’hui  disparu, chante signifie orge et mel, de mar, signifie pierre.
Piscop dans le Val d’Oise vient d’un Pissecoq (du latin  spica, épi,) au XIIe et au XIII e siècle, de épi et de coq au sens de pointe d’épi, désignait originellement un menhir.
Enfin  acucula, pointe d’épi de blé, réduit à acula, s’est confondu avec asciola (diminutif du latin   axis, hache, au sens de hache), qui donne en français la série aisseau, aissette au même sens de hache. Précédé du  radical  mar ou mal, qui signifie pierre,  on a une pierre- épi de blé qui devient une pierre- hachette. On trouve,  à Désertines dans la Mayenne, en 1158, un  nom de  menhir Maloseiol, Malaisé aujourd’hui et,  ailleurs,  Maleissie, qui, n’étant plus compris, donne de nombreux toponymes : la Malassise  près de Châteaudun, avec les légendes de la pierre qui bouge (la pierre mal assise) et qui s’ouvre à minuit le soir de Noël, se fendant en deux  et laissant s’échapper des démons ou bien révélant un trésor infernal.
d) Les menhirs portant  un nom de  mesure de capacité du grain.
Les noms des mesure de capacité du grain de semence, précédés ou non de grand,  ont aussi été donnés aux menhirs pour la récolte qu’on en escomptait : le grand Muid, de modius, boisseau ( 10 litres), à Villiers- Saint -Orien, le grand et le petit Bussard (au sens de tonneau,  -deux menhirs disparus à Saint-Denis- les- Ponts), bure, au   sens d’aiguière à col allongé, nom transféré à un dolmen de Corancez  ; bot au sens de grande bouteille transformé par incompréhension, soit en pierre debout comme à Colombiers –sur -Seulles, dans le Calvados, soit,  à cause de l’homonymie avec bot au sens de crapaud, en pierre aux bouts (au sens de crapauds), puis en pierre aux grenouilles à Alluyes et ensuite en la Grenouillère
La première révolution agraire (il y a quelque dix mille ans) et le sanctuaire  de Göbekli  Tepe en Turquie, ou l’apparition  simultanées  des premières céréales cultivées et des  ancêtres du menhirs, ou menhirs en forme de maillet ou marteau à deux branches  ou marteau, dits encore menhirs en tau grec à deux branches (T) .
Grâce à l’ADN végétal, on a pu suivre les céréales d’Europe et remonter à leur origine il y a  quelque
10 000 ans. Bien avant le changement de climat qui provoqua dans le  Croissant fertile, au nord de la Syrie,  une désertification importante, poussait à l’état sauvage  une sorte d’engrain (de un grain :, ta      ndis que l’escourgeon  a deux grains et l’orge quatre) qui est présent encore aujourd’hui sur le mont Karacadag, dans la province de Sanliurfa . C’est la région de l’ancienne cité de Hiérapolis , «  la ville sacrée » ,  où est né Abraham et dont le pseudo- Lucien  a évoqué le temple dans La Déesse syrienne  Là se situe le sanctuaire de Göbekli Tepe, le plus ancien sanctuaire  du monde oriental..  Or, l’ADN  nous révèle  que la plante sauvage, la sorte d’engrain   qu’on y trouve, est l’ancêtre de 68 céréales contemporaines !
Tépé désigne un  sanctuaire non couvert d’un toit en  phrygien, langue indo-européenne faisant partie du groupe tokharien,   plus exactement un enclos sacré, délimité par de curieux  menhirs disposés en cercle .Le mot tepé est apparenté au grec téménos, enclos sacré, comme  au latin templum, désignant à l’origine un espace délimité par les augures dans le ciel. puis le même espace sur terre, et pour finir,  un temple monumental. . 
Quant à Göbekli,-, on retrouve ce nom  à Malte pour un  sanctuaire  englouti à 2 kilomètres de la côte, le sanctuaire  de  Gebelg-ol -Bahar, de gobelk, cheval,,  +suffixe de féminin noté –ol  et  bahar signifiant froment en tokharien  comme .le .latin far, grec puros : le nom signifie la jument chargée d’orge,  L’historien grec du VIe siècle Hérodote (IV, 94)  nous a conservé  le nom de la déesse Gebeleïdzis (où l’on reconnaît Göbekli avec un postfixe -dzis  , parent du grec homérique  zeia  et signifiant orge, C’est une déesse dont on a la variante thrace Zamolxis 
L’Allemand Klaus Schmdt  a exécuté les fouilles de Göbek-li de 1995  à sa mort en 2014 et a fourni  le récit de ses recherches dans Le premier temple, CNRS Editions, Paris, 2015, 420 pages et illustrations.


Voir photo p.243 de l’enceinte D
Göbekli  signifie  le sanctuaire de la Jument, et göbekl est parent du grec kobalos, en latin cavallus , qui nous a donné le français cheval, .La jument  ou plutôt sa déesse est associée aux céréales et aux menhirs , si bien qu’ on retrouve ce radical dans des noms de lieux préhistoriques riches en mégalithes  comme Gavarni ou  l’îlot Gavrinis en Bretagne.  La déesse gauloise Epona, au nom  correspondant au du latin equina, jument,  dont, selon Juvénal (Satires, VIII, v. 155),  on peignait l’image dans les écuries devant des mangeoires emplies d’orge, est un avatar de la déesse  Göbekli . Ajoutons que le cheval portant le mort dans les cortèges,  il n’est  pas étonnant  que la déesse ait également des rapports avec le monde souterrain des morts,
 Selon les traditions locales,  Mars poursuivit Cérès de ses importunités. Celle-ci se métamorphosa en jument pour lui échapper,  mais Mars se transforma également en cheval de labour et il  naquit de cette union deux enfants : une fille  dont il était interdit de prononcer  le nom  et qu’on appelait seulement la Dame ou la Maîtresse, savoir la femme du dieu des morts Orcus,  Perséphone (de Pherkus -éponè, la jument d’Orcus ou Phorkus),  et un cheval nommé Aréion qui tire son  nom de son père Arès, dieu de la guerre grec. Toutefois,  l’’engloutissement du sanctuaire  de la Jument, Gebelg-:
ol Bahar, au large de l’île de Malte,, ayant été interprété comme la  manifestation  du mécontentement de Poseidon,   vint modifier ces croyances le raz-de-marée fut attribué à la colère du dieu de la mer et on retira à Arès la paternité d’Aréion et de Perséphone  pour en faire honneur à Poseidon, dans l’espoir de l’’apaiser,,  en interdisant de révéler le nom de Perséphone.
  Cet engloutissement  témoigne de la montée des eaux et du recul de la côte  lors du dernier maximum glaciaire, à la fin du pleistocène, vers -8500. Il est contemporain de l’immersion  de l’île de Pantelleria Vecchia, à 60 kilomètres au large de la Sicile, où, par 60 mètres de fond, on a trouvé un menhir de 12 mètres de haut, le lus ancien qu’on ait pu dater, puisqu’il est antérieur à -8500.. .
L’évolution des  menhirs depuis Gobek-li et Pantellaria Vecchia jusqu’à la  trentaine de « taulas »  à Minorque aux   Baléares et à  l’Eure-et-Loir  et la Grande-Bretagne : les menhirs en forme de marteaux  dont les deux extrémités se joignent  en constituant un cercle .
Un cas d’évolution sémantique surprenant nous est donné par le latin populaire tutaree,  protéger, conserver,  mettre (le grain (sous terre  à l’abri des rongeurs et des oiseaux) ,enterrer (le blé), verbe  qui ,en français,  a donné tuer au sens de faire mourir et a laissé l’étonnant  doublet tuteur et tueur.. Et Voltaire avait beau railler ce qu’il appelait l’ignorance botanique du Christ lorsque celui-ci déclare dans Jean  12, 24: « si le grain  de blé qui est  tombé en terre ne meurt, il reste seul; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ». , le Christ se faisait l’écho d’une croyance populaire universelle : le grain ne pouvait germer que s’il mourait d’abord.
Il faut donc que la mort du grain soit symbolisée d’une façon ou d’une autre dans le menhir qui représente la germination du grain. Or,  à  Göbekli Tepe, vers 9600  avant J. -C,  les enclos circulaires de « menhirs » en tau  sont surmontés d’une pierre horizontale  qui dépasse  de chaque côté. C’est elle qui symbolise   par son horizontalité le dieu  du  grain mort afin de renaître.  ..A Göbekli, Tepe,  il s’agit  d’un « cromlech » où les menhirs en tau, juxtaposés, sont prêts de se rejoindre comme ils le feront plus tard, vers  -2800,  à Stonehenge. Le second élément de Stone -henge  est, d’après celui qui fait autorité en la matière,  Christopher Chippindale dans son Stonehenge Complete , un mot signifiant savoir en vieil anglais potence, gibet, savoir  hen (c) en, plus tard rapproché à tort  dans l’a mentalité  populaire du nom courant  du dolmen, stone hung, pierre suspendue. Henge  est apparenté  à phalang-, qui signifie, -nous l’avons vu, - fléau de  la balance, puis marteau, linteau. .
En tout cas, tel ’était le nom  de  ces curieux linteaux  comparables à ceux de Göbekli Tepe analogues au tau égyptien, symbole de mort surmontée, de résurrection et de vie, qu’on retrouve aussi à en -5000 à Malte ou à Minorque aux Baléares dans la civilisation des Talayots.
Un stade important de l’évolution vers les menhirs que nous connaissons : les taulas  avec pierres indépendantes taillées de façon géométrique placées à leur  sommet de Minorque.
Minorque et les Taulas.  
La preuve de l’interprétation de cette pierre : le nom de l’île Pityussa (Minorque), qui signifie  l’île de l’orge dormante, par allusion à la pierre qui surmonte les taulas,   et des  îles Pityoussae (voir mon blog à paraître : les véritables colonnes d’Hercule). 
 Le nom des Baléares est à rapprocher du grec aleiar, de waleiar, grec Baliar-ides, les îles de la farine d’orge. Peut-être sous ce nom au singulier désignait-on Majorque (Baléares majores). Quant à Minorque et à Ibiza, elles font parte pour nous des Baléares (Baléares minores) mais pour les Anciens elles font partie des îles Pityussae : on peut même supposer que Pityussa au singulier  employé par Tite Live était le nom de l’actuelle Minorque, tandis que Ibiza s’appelait Ebusia ou Ebosia,  Ebusos, Ebusus. L’origine des deux noms est à chercher dans le mot orge (eta en vieux –haut- allemand [cf. Gerte], anglais oats, avoine  et wheat, froment,  d’un radical wet.  D’où dérive pity -. , de weti, devenu bitu- cf le nom des Bituriges, les habitants du Berry, puis pit;u- .Dans le cas du nom ancien d’Ibiza,  Ebussus,  ;eb- vient de  wet, orge, puis , par métathèse, ew – devenu eb.-.
Le second élément, pour nous plus intéressant encore, est –-usia ou -ussia, participe présent au féminin du verbe signifiant dormir, grec auô, de yauô, dormir, sanskrit va-sati., latin jaceo, gésir, être étendu. Le participe ya-ntya, , attesté par le grec Pityunt-, ou encore Pityoessa, Pityoussa, dorme iussa, l’ensemble signifie l’orge dormante et renvoie au linteau surmontant le menhir.
Le nom de la capitale, Maõn, dérive de moon désignant le sésame (grec sèsamôn) ou le millet (radical mel ou man) Ecoman à Viévy -le- Rayé dans le Loir-et-Cher ou Germignonville, . de ger minio villa.
On trouve le nom de Torralba près d’une des plus fameuses taula  de Minorque (on trouve aussi en Sardaigne  une Torralba  près d’un nuraghe, mot à rapprocher du grec murax, moulin) : ce n’est pas la tour blanche, alba en latin, mais la  torre alph, cf.  le grec alphi, farine d’orge, c’est-à-dire lebâtiment à faire de la farine, le moulin  sacré où l’on broie l’orge. Le nom du lieu, Alaior   , métathèse de aloiar, est à rapprocher du dorien alôya, grange à blé, et de l’homérique  aleiar,  froment,  dans l’Odysséee, 20, 108,  cf  grec aleuron, farine, aleô, moudre, arménien aram. La torre était-elle un moulin sacré ? Voir carte postale : Taula de Torralba à Alaior.
On est intrigué  devant la tolla de Taliti (de tal – eta, , tal , de dav, étant peut-être lié à duo, deux et à  eta signifiant orge (vieux haut allemand gersta], soit l’orge double qui représente une dalle oblique appuyée contre le pied d’une tolla et au sommet de la dalle oblique une grosse pierre ronde évoquant un épi d’orge.
On a retrouvé 274 « talayots »  ou moulins de pierre coniques   près des la trentaine de  taulas qui ont survécu.  Le mot talayot , de tholadas, puis taladot, semblable au mot corse et sarde torre,du diminutif  thula(dsa), est à rapprocher du grec  thulas, thulados, thulakos , sac à farine , , panier rond, boisseau de farine, employé par métaphore à cause de la forme de l’édifice.. Dans le monde égéen, le mot tholos qui les désigne vient de th +l voyelle-.. En Sicile, à Pantellaria, le même édifice, appelé siso, de siro, tire son nom du silo,.
Le mot  « taula » est  à rapprocher du latin stolo, stolonis, rejet, drageon, drageon, éteule  (mot  désignant en français la tige des céréales restée sur le champ après la moisson  et venant  du latin stipula, de même signification). .En grec,steleos désigne le manche d’un marteau ou un rouleau et stèlè, latin stela, une colonne, une stèle.  
Le trajet des créateurs des taulas.
On peut les suivre à travers le nom Pityussa : non loin de Göbekli, , on trouve Pityunte, une ville de Colchide près du Pont-Euxin, Pityussa, une ville de Troade, puis une ville de Chio, une de Lampsaque ,une de  Salamine, une île Pityoussa entre l’Attique et le Péloponnèse dans le golfe Saronique,.  L’ancien nom de la Sardaigne  était, selon Aristote, Ichnoussa, qu’il est tentant de rapprocher de  Ebussa ou de  Pityoussa. et signifierait blé blanc dormant. Le nom ichnos  désigne la sandale. Or, Le mot latin sandala selon Pline l’ancien désigne le blé blanc, Le nom Sardaigne viendrait selon Pline de sa forme de sandale et il la dit sandalôpis. On peut se demander si les taulas ne seraient pas les célèbres: la seule terre où on les trouve est d’ailleurs située  non loin de Gibraltar où les situe  la tradition. Il est révélateur que les statues de l’île de Pâques avec leur chapeau aient suscité plus d’articles, voire d’ouvrages  que ces taulas à portée de nous pourtant. Quant aux navetta  (d’En Tudon, et autres) , il faut y voir la barque renversée en signe de mort de son propriétaire, avec l’écope, le plat , l’écuelle, l’huile pour affronter le soleil de l’au-delà. . On retrouve la trace de ces migrateurs ibères et de leur tombes  au nord du Tibet, dans l’immense désert de Taklamakan ,où  des archéologues chinois ont eu l’étonnement de découvrir une nécropole, avec des momies aux traits européens, aux cheveux châtains et au nez long, datant d’il y a 4 000 ans et enterrés dans des bateaux retournés recouverts de peaux de vache , avec un mât de bois situé à la proue , de 4 mètres de haut et dont la sculpture varie selon le sexe : pour les hommes , le sommet est effilé, tandis que , pour les femmes, le sommet serait plat et  peint en noir et rouge. Le mât renversé devient une godille (à la poupe du bâtiment) qui permet de se diriger  dans les eaux de l’au-delà.

Le menhir d’origine avait ainsi  le sommet plat pour qu’on puisse y  poser la dalle symbolisant le grain mort. D’autre part, pour plus de facilité, les sculpteurs se sont parfois contenté de tailler le haut du menhir en demi-cercle et de séparer le haut du bas par une ligne : la tête du menhir représentait le grain mort ou dormant.

  La disposition en cercle des menhirs est peut-être inspirée  des ces « ronds de sorcières » qui, en une nuit, apparaissent soudain sur les prairies et donnent une  preuve de la fécondité de la nature ; ceux-ci  sont composés de champignons souvent comestibles, mais l’imagination populaire, stupéfaite devant la régularité  du cercle et la soudaineté de son apparition, y voit l’œuvre de forces souterraines.
Quel était le but de cette disposition circulaire qui apparaît dès l’origine, à Gobek-li ? Il s’agissait de représenter le cycle de la vie et de la mort du grain,  de sa germination et de sa mort provisoire en vue de sa renaissance.
Les pictogrammes des menhirs de Gobek-li Tépé et les noms les plus anciens des menhirs, évoquant la pierre en forme de maillet: scorpions, pierres plantées, pierres blanches, etc.
Il y a des pictogrammes sur les menhirs en forme de maillet de Gobek-li Tépé. L’un d’eux est un scorpion. En effet, le scorpion  était le nom des menhirs en forme de maillet, la queue du scorpion étant comparée aux deux extrémités du marteau antique. Ce nom nous renvoie au nom du maillet,  en grec, sphura,  Le grec sphura, marteau,  est apparenté à scorpio , qui   s’analyse en skorkw- .En italo- celtique, on a le latin malleus : le  premier élément mar- veut dire pierre ; le second désigne le marteau .   
 Le nom gaulois du sanctuaire,  mallos ou malleus  lieu entouré de pierres en marteau,  dérive de ce premier nom des menhirs. Le mot gallois lech, dans crom -lech, désigne ainsi à l’origine un menhir en forme de marteau, disposé en cercle (crom signifiant courbe). Comme la pierre qui dominait le fût du menhir était soigneusement creusée de nombreux trous, le mot a donné le nom du liège, en corse  leccia.
   Les pictogrammes nous fournissent un autre nom pour ces menhirs en T. Il vient du nom du fléau de la balance qui  a servi de métaphore  pour désigner le linteau horizontal surmontant les menhirs, savoir phalanx, génitif phalangos en grec.  De là en Corse Palaggio, ensemble de menhirs, et paladini, les menhirs, ou bien à  Alzon, dans le Gard, le  nom du menhir Peyre plantade, qui  remonte à  p (ha)lang-ada, , la pierre qui porte  un linteau..
Les Pierres Planktes de l’Odsyssée (XII, 59—67), Petrai planktai en grec, -un singulier ibère en –ai  pris pour un duel -  permettent de confirmer la  localisation de ce passage de l’Odyssée, puisqu’on a retrouvé  sous 60 mètres d’’eau le menhir en cause, au large de la Sicile (lieu appelé Pantellaria Vecchia aujourd’hui, (.de planktai herria , herria signifiant  pays),  l’ancien  pays de la pierre en linteau. Cela amène à penser que les souvenirs rapportés à Homère dataient d’in  temps où l’élévation du  niveau de la mer avait laissé dépasser le menhir qui était encore debout .Lorsqu’il disparut de la surface, son nom fut réinterprété en pierre errante.
  Les Pierres Plantées  sont devenues chez nous  par incompréhension, les Pierres Blanches, par exemple à Pléneuf dans les Côtes-du-Nord, ou à Pietrobianchata à Antisanti en Corse, alors qu’il n’y a pas la moindre pierre de couleur  blanche en ce lieu.  C’est un  ancien Petroplancado,  une  pierre qui porte  un linteau. 
  En Eure- et- Loir,sur le territoire d’Arrou, on a un lieu-dit Araigne, désignant un  menhir à linteau qui remonte au latin  aranea,  araignée venimeuse, équivalent de  phalanx en grec,  ,.Klauss Schmidt s’ étonne de voir des araignées venimeuses représentées sur les piliers à tête en T  de Gobekli, mais il s’agit d’un idéogramme qui joue sur l ’homonymie araignée, arachna en grec , et menhir à  linteau, pharanx.
Le mot palanx, n’étant plus compris, a également  été rattaché au mot planta qui,  en latin, désigne la plante des pieds et aussi, comme on se servait du talon pour planter les boutures, la bouture elle-même  et donné, par étymologie populaire, la pierre qui ressemble à une bouture (qu’on plantait en foulant le sol de la plante du  pied et du talon).
La pierre qui surmonte les menhirs de Gobek-li et sa signification : la mort de la céréale, orge ou autre, et sa renaissance.
Revenons un instant au livre de Klaus Schmidt : il y montre comment le sommet des menhirs ou plus exactement la partie de la pierre qui était, en leur sommet, formait un linteau était soigneusement creusée de cupules, mais il n’explique pas pourquoi. Je pense que ces cupules étaient emplies de terre et semées de plusieurs grains de céréales. Dans l’esprit des populations préhistoriques, ces plantes  devaient mourir avant de pouvoir germer et de constituer, à certaines saisons, un jardin suspendu, comparable aux Jardins d’Adonis.
Au VII e siècle ap. J. -C. encore, dans les mystères d’Osiris, les prêtres devaient façonner une effigie d’Osiris, appelée « Osiris végétant », avec du limon noir et des graines d’orge. Les Egyptiens arrosaient cette poupée  avec l’eau sacrée du Nil jusqu’à germination, puis l’emmaillotaient dans des bandelettes comme si c’était un cadavre  momifié et, -chose plus étrange pour nous, -inhumaient, enterraient cette orge germée en forme d’effigie d’Osiris.
Le  cercle des menhirs  visait  à  imiter et à favoriser , par magie sympathique, non pas le cours du soleil dans le ciel, mais  l’indispensable  mort des grains durant la saison froide, puis  leur germination ,  ensuite  leur mort à nouveau dans un cycle sans fin. .Il existait parfois,  au centre du cercle, un  ou deux menhirs plus grands, les chefs d’orchestre divins qui représentaient,  non pas le soleil et la lune,  mais la déesse du blé  ressuscité   et sa fille la déesse du blé mort, respectivement  Dèmèter et  Perséphone  : Perséphone , représentante du  grain de blé mort et enterré, était  capable de fléchir son époux  Hadès et de libérer des demeures  souterraines les grains morts comme de se  libérer elle-même desv régions infernales au printemps.
  Qu’est-ce qui nous indique aujourd’hui , dira-t-on, la mort du blé dans ces cromlech, à défaut du linteau horizontal  primitif  ou d’un nom comme celui du Parc ar verret, , le champ aux morts, dans la presqu’île de Saint-Laurent ? La fermeture du cercle pouvait y  suppléer.   Mais il y a une autre possibilité, car on trouve souvent à proximité des pierres éparses, disposées de façon à  symboliser cette mort parce qu’elles constituaient un prolongement .horizontal au pied  des menhirs et qui les liait entre eux.  Ainsi, en Bretagne,  à Crucuny, 22 menhirs se trouvent  reliés par un mur constitué  de pierres sèches presque aussi grosses que les plus petits de ces  22 menhirs.
  Dans la presqu’île du Crozon, à Lagatjar, le grand côté du rectangle qui forme une sorte de cromlech se prolonge par de petits bras qui dépassent les angles du rectangle. Ces murets , ces dépassements qui évoquent ceux du tau d’Asie  , sont des indices  que le symbole du grain de blé mort a pu être transféré du sommet du menhir à sa base.
 Une  preuve, en tout cas, que le « cromlech »  est identique au menhir dans sa fonction de catalyseur magique des récoltes nous est donnée par le nom de l’un d’entre eux en Bretagne, Crucunio, nom  qui, comme  celui de Courcouronne, ,  ou celui du  site préhistorique de Cucuruzzu en Corse,  dissimule   le radical  (a)cucula, qui signifie la pierre- épi. ,On songe, en Turquie, au site néolithique de Gurcu-tepe, le temple des pierres -épis.
Les menhirs percés.
La mort du blé comme condition  préalable de sa germination était une croyance fondamentale à l’époque préhistorique  et, à défaut du linteau placé  au sommet  , voire au pied du mégalithe  , et représentant  le grain de blé mort avant de ressusciter, d’autres possibilités existaient encore : ce pouvait être des trous et l’on connaît des menhirs littéralement percés en leur milieu, le trou symbolisant  le mortier où l’on écrase  le grain de blé, où on le « tue » et représentant par conséquent  la mort provisoire du blé.  Mais le trou pouvait aussi être percé au sommet du mégalithe afin de  symboliser cette mort du blé. Ainsi, à Brèches,  en Indre-et-Loire, on trouve un menhir appelé la Pierre de saint Martin (christianisation de mar, pierre). « A son sommet,  écrit Louis Bousrez, existe un creux … Dans ce trou, où l’on peut mettre la main comme dans un bénitier, on trouve, de temps à autre, des pièces de monnaie et certains comestibles, pain, fruits, fromages, etc., offerts par des gens qui attribuent à la pierre des propriétés merveilleuses. Ces objets sont déposés en offrande, sans aucun but charitable, car l’on sait bien que personne ne peut les apercevoir de la route et que les comestibles sinon l’argent sont perdus.  » De même, dans le Calvados,  à Colombiers -sur - Seulles, on trouve une cupule au sommet d’un  menhir appelé la Pierre debout (pour la pierre bot, c’est-à-dire en forme de bouteille). L’eau recueillie dans cette cupule était considérée comme susceptible de chasser le mauvais sort  à et de guérir de nombreux maux. C’est là une tradition fort ancienne, car à  Gobek-li, le linteau horizontal était parfois artificiellement creusé de cratères nombreux.
La datation des menhirs et des dolmens.
On date  le site de Göbekli Tepe en Asie mineure  entre  9600 avant notre ère et  8200 ans, comme le site  englouti de Pantelleria Vecchi à 60 kilomètres de la Sicile, tandis que les sites de Malte dateraient de -5000 ans.  On peut supposer que les auteurs de ces mégalithes tant asiatiques que maltais  ont  passé par l’Europe continentale avant d’atteindre Stonehenge vers 2800 av. J. –C. ou plutôt, selon les dernières découvertes de Durrington Walls,  en -4500.  Nous pouvons donc retenir  pour Carnac, antérieur en principe,  la date de 5000  environ avant notre ère et pour l’Eure- et –Loir une date antérieure : -5500 avant notre ère, soit presque trois   millénaires  avant les premières pyramides d’Egypte qui datent de -2700.
La fertilité divine des pierres durant la préhistoire.
Jared Diamond, dans Effondrement ou Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, Gallimard, Paris, 2005, p.  132, décrit de surprenantes méthodes préhistoriques de culture : « les zones d’agriculture extensive étaient partiellement recouvertes de pierres placées en surface à proximité les unes des autres , afin que les cultures puissent pousser entre les pierres ; d’autres vastes zones furent modifiées par ce qu’on appelle des « mulchs lithiques », c’est-à-dire que l’on ajoutait au sol des pierres sur une profondeur d’environ trente centimètres qui étaient, soit prélevées sur des affleurements rocheux environnants , soit obtenues en creusant jusqu’au substratum rocheux pour briser les roches qui le composaient. …Dans les fermes du nord-est des Etats-Unis, […] les agriculteurs se donnaient beaucoup de mal pour évacuer les pierres de leurs champs et ils auraient été horrifiés à l’idée d’y apporter délibérément des pierres .On retrouve […] l’agriculture de mulchs lithiques dans de nombreuses parties du globe, comme dans le désert du Néguev en Israël, dans les régions sèches du Pérou, de la Chine, de l’Italie romaine et en Nouvelle-Zélande maorie. Les pierres rendent le sol humide en le recouvrant, réduisent l’évaporation d’eau due au soleil et au vent et empêchent la formation à la surface du sol d’une croûte dure qui favorise  le ruissellement des eaux de pluie. Les pierres réduisent les fluctuations diurnes dans la température du sol en absorbant la chaleur du soleil au cours de la journée et en l’évacuant pendant la nuit ; elles protègent  le sol contre l’érosion car les gouttes de pluie viennent s’écraser à leur surface ; des pierres sombres sur un sol plus clair réchauffent le sol en absorbant une plus grande quantité de chaleur solaire ; et elles peuvent également servir de pilules fertilisantes à diffusion lente […],  car elles contiennent des minéraux indispensables qui pénètrent progressivement dans le sol ».
  Toutes ces réalisations demandaient un  travail gigantesque et nécessitaient le déplacement de millions de tonnes de pierres. On comprend dès lors  pourquoi la pierre était sacrée pour les bâtisseurs de Göbekli Tepe, comme  pour les Euréliens,  puisqu’elle représentait pour eux un gage d’abondance  et de fertilité.











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