dimanche 8 janvier 2017

L'OPPOSITION A LOUIS XIV ET LE MASQUE DE FER A LA LUMIÈRE DU LIVRE RÉCENT DE SONNINO; .

L’opposition à Louis XIV, ou  Voltaire avait- il raison à propos de l'Homme au Masque de Fer? Réexamen de mon blog précédent à la lumière du livre récent de Marc Sonnino, The search for the man in the iron mask, a historical detective story.

  C'est Voltaire qui a créé le mythe du Masque de Fer en 1751 dans Le Siècle de Louis XIV et, comme la question avait piqué sa curiosité, il continua à s'interroger toute sa vie à ce sujet : dans le Dictionnaire philosophique, à l'article Anecdotes, en 1764, il discute  diverses hypothèses sur son identité ;  enfin dans ses Questions sur l'Encyclopédie, 2e édition (1771), il révèle qu'il s'agissait, non d'un jumeau, mais d'un frère aîné de Louis XIV  qui était le fils de la reine Anne d'Autriche (espagnole malgré son nom), l’épouse de Louis XIII,  et du duc George Villiers de Buckingham , fils légitime en quelque sorte (is est pater quem nuptiae denuntiant) , né en 1626 , ce qui expliquait à la fois sa ressemblance criante avec Louis XIV et le danger d'une contestation de la légitimité de ce dernier en vertu du droit d'aînesse et en vertu du fait qu'il était né dans les liens du mariage, -surtout si l'on pouvait de surcroît accuser Louis XIV de ne pas être le fils de Louis XIII, mais de quelqu'un de beaucoup plus basse extraction que le duc de Buckingham, comme le duc de Bellegarde.. L ‘assassinat de Buckingham par Felton devrait beaucoup à Louis XIV, a fait observer Dufet de l’Yonne, entendons qu’il a été inspiré par lui. Seul Jean Baptiste Regnault- Warin, dans  L’homme au masque de fer, Paris, 1804,4 vol., reprit sous forme romanesque la thèse de Voltaire ; Dumas et les romantiques reprirent l’idée du jumeau.

   De qui Voltaire, sous le sceau du secret, tenait-il ses informations? De Madame de Saint-Quentin, la maîtresse du marquis de Barbezieux, fils de Louvois, qui avait succédé à son père comme Ministre de la Guerre, l'un des derniers à connaître le secret puisqu'il gérait le sort du prisonnier.  En 1782, le marquis de Luchet, dans le Journal des Gens du monde (tome IV, n°23, page 282 et suiv.) “fit honneur à Buckingham de la paternité en litige. Il cita en témoignage une demoiselle de Saint-Quentin, ancienne maîtresse du ministre Barbezieux, morte à Chartres vers le milieu du dix-huitième siècle : selon elle, Louis XIV avait condamné son frère aîné à une détention perpétuelle, et  la parfaite ressemblance des deux frères avait nécessité l’intervention d’un  masque pour le prisonnier” .
 Selon le bibliophile Jacob, la première œuvre, anonyme,  en 1745, à parler du prisonnier, les Mémoires de Perse, serait de Voltaire qui s’était engagé auprès de son informatrice à ne jamais parler du Masque  et qui s’est ainsi donné un prétexte  pour pouvoir ensuite en parler sous sa signature, la chose étant dès lors  révélée.
 Soulignons  qu'aujourd'hui encore ce texte de Voltaire est censuré, par exemple dans les Oeuvres historiques de Voltaire publiées par René Pomeau dans la Pléiade, p. 1714, on lit le mensonge par omission :"Voltaire a noté dans ses Notebooks (p. 124) que le mystérieux prisonnier était "soupçonné d'être un frère aîné de Louis XIV", sans la mention de Buckingham, son père.
  En 1790, Charpentier, président d'une commission révolutionnaire destinée à inventorier les archives , reprend la même tradition dans La Bastille Dévoilée avant que la piste politiquement correcte de Mattioli ne devienne la vérité officielle.
   La Reine a-t-elle eu des rapports féconds avec cet homme qu'elle aimait?Le cardinal de Retz  nous répond dans ses Mémoires : Madame de Chevreuse avait confié à son ami le Cardinal à propos de la reine  "que le seul homme qu'elle avait aimé avec passion avait été le duc de Buckingham; qu'elle lui avait donné rendez-vous, une nuit, dans le petit jardin du Louvre ; que Mme de Chevreuse, qui était seule avec elle, s'étant un peu éloignée, elle entendit du bruit comme de deux personnes qui se blutaient [le texte porte se lutter par méconnaissance du vieux mot bluter, remuer le tamis, donner la saccade,  qu'on trouve chez Rabelais au sens de faire l'amour]; que s'étant rapprochée de la Reine, elle la trouva fort émue, et M. de Buckingham à genoux devant elle; que la Reine, qui s'était contentée, ce soir, de lui dire, en remontant dans son appartement, que tous les hommes étaient brutaux et insolents, lui avait commandé, le lendemain au matin, de demander à M. de Buckingham s’il était bien assuré qu'elle ne fût pas en danger d'être grosse ". Au lieu du Louvre, d’autres historiens situent la scène dans un jardin  d’ Amiens, entre le 7  et le16 juin 1725. Mais Buckingham n’était pas homme à prendre de telles  précautions. A côté de   ces indiscrétions rapportées par le Cardinal, mettons les paroles du Régent qui déclara que c'était un fils d'Anne d'Autriche.
  Mais quels sont les textes que Voltaire a pu connaître?
  D'abord, celui de René, Auguste, Constantin de Renneville dans L'inquisition française, ou l'histoire de la Bastille, par Mr. C. de R., Amsterdam- Leyde, 1724, 4 vol., avec un Supplément à l'histoire de l'inquisition française, 438 p. Il fut prisonnier à la Bastille de 1702 à 1713, et y  occupait une pièce juste sous celle du Masque de fer avec qui il tenta de communiquer en frappant au plafond  : il apprit de lui qu'il était un "abbé italien", mais  celui-ci  refusa de lui dire son nom (p. 122, édition 1715, références données par Monsignor A. S. Barnes, The man  of the mask, 1908).Selon nous, il s'agit bien du pseudo -abbé Pregiani, avatar napolitain de Jacques Stuart de La Cloche du Bourg de Jersais : donc du  Masque de fer.
La Princesse palatine, belle- sœur de Louis XIV, nous parle de lui dès 1711 en disant  qu'il communiait masqué, qu'il était très dévot et lisait continuellement, et elle ajoute plus tard n'avoir rien pu apprendre à son sujet, sinon qu'il s'agissait d’ « un milord anglais qui avait été mêlé à l'affaire du duc de Berwick contre le roi Guillaume. ".
  Le milord anglais fait allusion aussi à l’abbé Pregiani. Quant au duc de Berwick, c’était un fils naturel de Jacques II vivant à l'époque où la Palatine écrivit ces mots.  Ce peut être une allusion au fait que l’abbé Pregiani se soit présenté comme un fils naturel de Jacques II également. Mais cette   princesse trop curieuse a pu confondre Berwick et Warwick.    Pour  savoir quelles analogies existaient entre le Masque de fer et Warwick , interrogeons l’ouvrage de Esprit Joseph Chaudon (1776), Les imposteurs démasqués et les usurpateurs punis ou histoire de plusieurs aventuriers qui, ayant pris la qualité d'Empereur, de Roi, de prince ... ont fini leur vie dans l'obscurité. Il s'inspire pour l'Angleterre du Père Pierre  Joseph d'Orléans et de son Histoire des révolutions d'Angleterre, 1689.
Il s'agit du faux Edouard Plantagenet, duc  de Warwick (p.314 et suivantes), en réalité Lambert Sinnel, que son tuteur, le prêtre Richard Simondi, dressa à imiter parfaitement le maintien du vrai duc qu'il n'avait pourtant jamais vu.
Sans entrer dans le détail de la révolution qu'il suscita pour prendre le trône vers 1486,disons que son mentor et lui-même   furent finalement vaincus et que le roi vainqueur , Henri VII (et non Guillaume III), "ne voulut point leur ôter la vie pour les faire servir plus longtemps d'exemple; le prêtre fut confiné dans une prison inconnue, où il passa le reste de ses jours , et le jeune homme dans une cuisine du palais, où, par un jeu bizarre de la fortune, après avoir assez bien fait un personnage pour lequel il n'était pas né, il s'acquitta de celui qui était qui était conforme à sa naissance. On l'en tira quelque temps après pour le faire fauconnier, et ce fut là que se terminèrent sa royauté et ses honneurs. On dit qu'Henri se donna un jour le plaisir méchant de faire servir des députés irlandais [qui avaient pris parti pour lui lors de ses complots], dans un repas qu'il leur donnait, par ce roi imaginaire. Il punit peut- être mieux par ce trait, dit le Père d'Orléans, la vanité de l'un et la crédulité des autres, que par un châtiment éclatant".
  On songe au Masque de fer devenu le valet de Fouquet qui avait certainement  connu le secret de son existence et dont Louis XIV avait redouté qu'il ne prenne son parti. La devise de Fouquet dont le nom signifie écureuil portait en latin : Quo non ascendam ? Jusqu’où ne monterai-je pas ? 5jusqu’à la royauté ou du moins la place de premier Ministre]. Comme le dit  M. de Chamillart (Voltaire, Réponse à La Beaumelle), l'homme masqué "connaissait tous les secrets de M. Fouquet", entendons le secret de sa disgrâce s'il avait vraiment voulu soutenir ses prétentions un jour. Fouquet savait tout, avant même son incarcération, de l'existence de cet héritier de la couronne, grâce à son cousin Fouquet de Croissy de Marcilly  qui donna au Masque, comme nous le verrons, son nom de Marcilly. C’'est peut-être  l'une des causes, la plus profonde en tout cas, de sa condamnation dont Louis XIV souhaitait qu'elle soit la  mort et qu'il aggrava par un acte personnel. Les papiers dont le ministre déplorera auprès de son geôlier Saint- Mars qu'il les ait laissé prendre à son fils après sa mort auraient pu contenir des indications sur l'identité de notre prisonnier.
  Autre indice donné à regret par Louis XV à sa fille qui insistait, et qui écarte seulement une fausse piste : son emprisonnement « n'a fait de tort qu'à lui- même », c'est- à- dire que ce n'est pas Mattioli , marié et père de famille, vivant avec sa famille et la faisant vivre, au contraire de notre homme Masqué.
  La question du valet (servant en anglais) ou le pseudonyme de Matteo Battaglia au moment de l'arrestation et la profession de valet (servant en anglais) de Portail, secrétaire de Msgr Bellings.
  "Comme ce n'est qu'un valet..." a écrit Louvois  à Saint- Mars le 19 juillet 1669 à propos du Masque de fer. Cette phrase a fait couler beaucoup d’encre, inspirant même une étude d'Andrew Lang, The Valet’s Tragedy, où il avance l'ingénieuse hypothèse de Martin, le valet de Roux : mais celui-ci semble bien être prudemment resté en Angleterre après le supplice du protestant Roux de Marsilly, lequel connaissait l'identité du futur homme masqué et entendait bien s'en servir dans sa conjuration internationale (Suède, Suisse, Hollande, Angleterre, Espagne) pour déposer Louis XIV.
 Nous exploitons des ouvrages anglais et américain dans ce blog, en particulier celui de Monseigneur Barnes. Et précisément,  Monsignor Arthur Stapylton Barnes nous donne une partie de la réponse nous dans son ouvrage The Man of the Mask, a study of the by- ways of history, 1908, p.250, avec pour références State Papers (Domestic) , 1668- 1669, p.312: le 6 mai 1669, un passeport est émis directement par le roi d'Angleterre Jaques II, alors que les passeports étaient normalement délivrés par le ministère des affaires étrangères , au profit de Matteo Battaglia, , "king's servant", le valet du roi, afin de retourner en Italie pour trois ou quatre mois et de revenir à Londres. En somme ,c'est sous ce nom d'emprunt , Battaglia, que s'embarque le faux abbé Pregnani (encore un pseudonyme),alias le Masque de fer,  trahi et dénoncé par le perfide  Jacques II à qui il se fiait, et c'est  avec cette qualité de valet qu'il est arrêté à Calais  par le capitaine de Vauroy sur  un ordre de Louis XIV du 28 juillet 1669.Or Battaglia existait bien, mais loin d'être le valet de qui que ce fût, il était musicien ( peut -être faut-il voir là l'origine de la rumeur dont la phrase de Voltaire est l'écho : "il jouait de la guitare") et maître de chapelle de la reine à Saint James . Le vrai Battaglia n'alla pas en Italie cette année- là. La question du valet, pour nous, est donc réglée.
Le pseudonyme donné au Masque après son arrestation par Louis XIV: Eustache Dauger ou Danger.
Lorsque, le 28 juillet 1669, Louis XIV dans une lettre à Saint- Mars, évoque "le nommé"... (en blanc )" et que dans sa réponse du 21 août à Louvois Saint-Mars parle du "nommé Eustache d'Anger", il faut bien admettre qu il s’agit d’une personne qui n’a jamais existé réellement.   Eustache Dauger ou plutôt  Danger   (allusion à l’origine angevine de Fouquet de Croissy et des Fouquet en général) Pourquoi Danger, alias  d’Angers ? Parce que la famille de l’homme qui avait donné son nom à la naissance du fils d’Anne d’Autriche et de Villiers de Buckingham était un Fouquet d’origine angevine, seigneur de Marcilly- sur Maulne en Indre- et- Loire où l’on peut encore voir un très beau château appartenant à la famille angevine.
La naissance du futur masque à Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines) le 5 ? mars 1626 et le choix du nom de  Marcilly .
Je me suis librement inspiré des auteurs anglais ou américains : Andrew  Lang The tragedy of valet, appendice, à lire sur Google Books  et The mystery of James de la Cloche , 1903 ) ,  Rupppert Furneaux,The mas behind the maskj, , London,Cassel &Company,1954 ; enfin de Paul Sonnino, The man in the iron mask, a historical detective story, Rowman &Littlefield, Maryland, 2016.  J’ai découvert dans ce dernier, p 29, l’existence du diplomate, ami de la Reine, du Prince de Condé et de Retz selon Retz (Pléiade, ancienne édition, voir index et en particulier p.853, ou nouvelle édition p. 658-659) Antoine Fouquet de Croissy de Marcilly, propriétaire de Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines). Là, à deux pas de la cour de Saint-Germain-en-Laye, donc sans éveiller les soupçons, avec l’aide de la sage-femme Madame Perronette , dont le nom nous est livré par Marcel  Pagnol (Le secret du masque de fer), la reine accoucha d’un garçon qui fut ondoyé (il est catholique de naissance, deviendra calviniste, puis redeviendra catholique). Il reçut le prénom de Jacques (en l’honneur des Stuart et du roi d’Angleterre) et le nom de Marcilly. En effet, les  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille)  recouvre certainement celui du château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-Loire), propriété des Fouquet et en particulier du parlementaire Antoine  Fouquet de Croisset , mort en 1665 en son château, qui portait aussi le nom de seigneur de Marcilly et avait par dévouement pour la reine prêté son logis isolé pour abriter la naissance du futur Masque de fer.
  En effet, le  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille) , où l’on sent un « accentnitalien », écrit Paul Sonnino, recouvre  certainement le château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-loire), propriété des Fouquet et en particulier de Fouquet de Croissy. Le cardinal Mazarin prononçait Marcilly à l’italienne avec un l mouillé, soit Marchille ou Marchelle qui fut noté Marchiel sur ordre de Louis XIV, la graphie ci notant le son ch.
Quant à l’autre forme Marchialy, non attestée directement, elle  figurait peut-être dans un registre mortuaire aujourd’hui perdu et reproduit par Topin en un fac-simile peu lisible, réimprimé ensuite par Funck- Brentano dans ses Légendes de la Bastille . Tandis que le  registre du Junca  et sa forme de Marchiel, eux,  existent toujours , pour Marchially ( masquant la graphie  Marcally) ,  qui n’est pas directement attesté, on peut penser que le i ou le  y final peu audible chez Mazarin a été  correctement restitué, le a étant l’ erreur d’un  copiste . On peut rapprocher le souvenir de la prononciation ancienne  Chailly pour Chilly, le château de Mazarin qui a pu influencer, soit le scribe, soit Mazarin lui-même.        Songeons aussi à la conjuration du protestant Roux de Marsilly,  l'année  même de l'arrestation du Masque.  Le marquis Louis Des Champs de Marcilly , interrogé au moment de l’arrestation de Roux , indique que le nom du protestant «  était seulement Roux. » Pourquoi Roux rajouta-t-il ce nom de Marcilly à son patronyme, alors qu’il se disait républicain ? Parce qu’il voulait que ce titre de courtoisie sonne comme une menace de découverte de l'existence d'un fils aîné d’Anne d’Autriche appelé Marcilly et de l’usurpation du roi, donc de l'illégitimité du monarque de droit divin.
Le prétexte nous est indiqué par Paul Sonnino qui , grâce à de savantes recherches généalogiques , nous apprend que son frère, p.91, avait exploité des bois près de Pithiviers, dans la forêt de Chilleurs , à Chilleurs -aux- Bois,  et à Chilleurs- Montigny,  dans le  Loiret , se référant à une ferme de Marcilly comprise dans les bois ou bien à Marcilly-en- Villette, près d’Orléans. En trout cas, il ne semble pas avoir jamais eu de propriété à Marcilly. 
L’enfance du futur Masque.
Le futur Masque ne pouvait rester à Croissy. Aussi le logea-t-on dans l’Indre-et-Loir près de Tours au château de Marcilly-Fouquet. Par la suite, -nous utiliserons l‘information de Voltaire selon laquelle Richelieu s‘est occupé de  l‘enfant , - Richelieu utilisa les châteaux de sa maîtresse, Madamen la marquise d’Effiat  de Cinq-Mars, aussi bien le château de Cinq-Mars(la- Pile en Indre-et-Loire près de Chinon) que le château de Chilly (aujourd’hui Chilly-Mazarin près de Palaiseau dans l’Essonne). Richelieu considérait comme sien, selon Philippe Erlanger (Le mignon du roi, p. 10), ce château qui était plus près de Paris .

L’enfance du futur Masque : le baron de San –Marzo au château de Cinq-Mars-la- Pile
 Nous le retrouvons peut-être dans ce mystérieux prétendu frère aîné du futur marquis de Cinq-Mars(’amant du roi Louis XIII , le comploteur décapité) . Celui-ci qui aurait été dépouillé de ses prérogatives d’aînesse au profit de son prétendu frère puîné, au motif qu’il n’était pas très brillant et qu’il était porté vers la religion,  devint le  baron de Cinq-Mars , écrit correctement Saint- Mars. Le titre de baron de San-Marzo, dont se vantera l’imposteur napolitain, lequel a confié avoir eu en main ses papiers du Masque de fer, titre  qui a déjoué les recherches jusqu’à maintenant, est selon moi un souvenir de Cinq-Mars,
Le complot de Cinq-Mars avait pour but de renverser Louis XIII, soit en l’empoisonnant (ce qui a réussi après l‘échec du complot), soit d’une autre manière, puis d’instaurer une Régence au profit d’Anne d’Autriche en attendant la majorité du futur Masque, et de confier à Cinq-Mars –le vrai les fonctions de Premier ministre. L’existence d’un hériter méconnu de la couronne est le grand secret de l’opposition sous Louis XIII et sous Louis XIV, des complots de Cinq-Mars comme du protestant  Roux et du prince de Condé.  
La période des études à Nîmes
 Mais la politique l’emporta et il fut confié à des amis protestants des Cinq-Mars, leur religion devant écarter de lui toute tentation de disputer la royauté à son frère. Il  fut alors envoyé à Effiat près de Riom où il fut confié à des  protestants, les Portal dont il prend le nom (il le reprendra en  Angleterre).  Il ne faut pas oublier que le marquis d’Effiat est originaire de cette bourgade  d’Effiat située en Auvergne et qu’il avait confié à l’architecte Lemercier le soin de concevoir un projet de ville gigantesque que l’homme de l’art réalisa en fait pour Richelieu près de Chinon, dans la ville appelée Richelieu.
Il est ensuite confié à un gentilhomme d’Auvergne, « vieux champion des précédentes guerres civiles » (P. de Vaissière, La conjuration de Cinq-Mars, p.43, 47 ssq, 72), Josué d’Hondredieu de Chavanhac  et à son fils François, ainsi qu’à  ses deux beaux-frères François de Calvisson et Agnès (prénom porté par un homme) de Calvisson de Saint-Auban.
Or, Calvisson, près de Nîmes, est le lieu de naissance du  chef de la conjuration protestante Roux, comme des Arnauld (à la ferme d’impôts desquels Roux participe) et des Mazel, tous protestants languedociens. Ce sont eux qui trahiront à la fois  Roux et le Masque : Louis XIV remerciera même Pierre Mazel pour son aide lors de l‘arrestation de Roux : « nous avons bien voulu lui commettre, écrit le roi, une affaire de la dernière importance et qui regardait  la sûreté de notre propre personne ».
Le futur  Masque est ainsi confié aux de Calvisson, et,  protestant dès lors, il vit  à Avignon,  un comté qui ne dépendait pas de Louis XIV,  avec des séjours à Calvisson et à la ville voisine de Nîmes pour des études inachevées à la faculté protestante de théologie : il lui restera des marques importantes de cette formation.
Ses protecteurs  sont arrêtés en terre papale, à Avignon,  par une violation du droit des gens , comme d’habitude,  comme  Roux le sera  en Suisse.
Le fils de Chavanhac et ses deux beaux-frères Calvisson de Saint- Auban  rôdaient autour de Tarascon, et ils étaient d’intelligence avec le beau-frère de de Thou, l’évêque de Toulon. Après que Roux eut rencontré le futur Masque à Nîmes ou à Calvisson, il ajouta de façon provocante Marcilly à son nom, tandis que notre Masque devint Veiras.  Le nom de Veiras, pseudonyme qu’il reprendra en Irlande et en Angleterre, est l’anagramme de Villiers (nom de son père Villiers de Buckingham) et de Marsilly. 
 Citons encore quelques noms qui sont destinés à réapparaître dans la vie de notre héros lorsqu’il prendra le nom de Jacques de Lacloche du Bourg de Jersays Penchons-nous  d’abord sur ce nom, pour nous ridicule, de Lacloche. Il a été choisi comme traduction de Bellings, le nom  de  son maître, qui est la traduction anglaise  de l"irlandais cloca, le signal de la messe catholique. 
Dubourg est une allusion à Anne d’Autriche qui était une Habsbourg, nom où Habs -,  feint d’être pris pour la préposition latine abs ou ab  désignant  la provenance, et est traduit par du.
Il faut reconnaître dans la baronnie  de San Marzo le nom du Masque,   élevé avec le futur marquis de Cinq-Mars, cher au coeur du futur masque comme Henri de Rohan ; le marquis de Cinq-Mars   sera exécuté pour complot contre la vie du roi, après avoir été  le favori et l’amant de la reine qui l’a abandonné pour sauver la vie de son fils adultérin auprès de Richelieu..
Le nom de Jersays n’a rien à voir avec l’île anglo-normande de Jersey , contrairement àce qu’a cru Msgr Barnes, ni même avec  Jersey dans l’Eure, commune d’ Illiers –l’Evêque,  mais renvoie  à un ami de Cinq-Mars, le protestant Massu de Jerzays. M. de Jersays (avec cette orthographe) était l’amant en titre de la fille de Sully,  dame de Rohan. La fille de celle-ci,  dite demoiselle de Rohan avant qu’elle n’épouse un Chabot et ne fonde la famille des Rohan- Chabot, fut la maîtresse du meilleur ami de Cinq-Mars, protestant au demeurant, savoir Henri Massu, marquis de Ruvigny . C’est ce nom de Ruvigny qui se cache sous la forme de ce mystérieux marquisat de  Juvigny, legs imaginaire à ses héritiers  du  pseudo -Jacques de la Cloche de Jersays de Rohan etc. On retrouve donc tous ces noms de  Jersays, Henri de   Rohan (le chef des calvinistes français),  Ruvigny,  dans la vie de Jacques de La Cloche, et cela confirme l’identité de l’aspirant catholique de La Cloche et du protestant Veiras.
  Le futur Masque  eut d’autres protecteurs ;outre  les Fouquet,  citons Gaston d’Orléans, son demi-frère Buckingham plus jeune que lui de deux ans,  le grand-duc de Toscane, le grand- prévôt de Franche- Comté Borrey , Galaup de Chasteuil,  «le Très Grand auteur » de la société secrète des alchimistes et empoisonneurs,  Vasconcelos, autre membre important de cette société,  qui l’introduisit auprès de Richard Bellings et du grand aumônier lord Stuart d’Aubigny grâce à la reine d’Angleterre qui était née de Bragance. Le futur Masque   fréquenta surtout les régions indépendantes de Louis XIV comme le Comtat Venaissin, le  Languedoc, Nice,  la Franche -Comté espagnole et francophone , la Savoie, la Moselle actuelle,  l’Irlande,   les Flandres,   la Suisse, le Luxembourg, la  Hollande(c’est à La Haye qu’ il rencontre le chef des calvinistes ,Henri de Rohan), l’Irlande. 
La conjuration du protestant  Roux
 Il  existait dans l'entourage de Roux un autre valet que ce Martin qui passionna A. Lang,   quelqu'un qui avait été valet en Angleterre (servant en anglais) et appelé Portal ou Portail , puis Veiras (Veiras , de veirs, est l’anagramme de Villiers [de Buckingham] et de Marsilly).
Le livre de Sonnino nous donne la meilleure biographie de Roux, p. 90 qq, grâce à ses savantes recherches généalogiques ; on y apprend , par exemple,  p.90,  (mariage du 21 octobre 1643 de Marie Chapuzeau , fille d’un juriste du conseil privé du roi, et de Jean Roux, l’exploitant forestier, de Chilleurs que Henri II de Bourbon, Prince de Condé, initialement calviniste,  et son beau-frère le duc de Longueville, sont témoins au mariage d’un parent de Roux, -ce qui montre les implications de son complot.
Portal, puis surtout Veiras, alias le Masque, à Londres avec la conjuration de Roux de Marcilly.
  Dans une note annexée à une lettre de Croissy, ambassadeur du roi de France, en date du 15 juin 1669, une semaine avant l’arrestation du Masque, Croissy écrit  qu'à l'annonce qui lui est faite de la capture de Roux, Veiras (le futur Masque) répond: " que cela ne pouvait être et qu'il en venait de recevoir une lettre qu'on croit être du 1er mai, par laquelle il mandait qu'il était suivi, mais qu'il leur taillerait encore bien de la besogne... » L’ambassadeur continue : « On est averti qu'il y a depuis six ou sept mois à Londres un nommé Veiras qui est de Languedoc, et de la R. P. R. (Religion Prétendue Réformée, calvinistes), lequel a de grandes habitudes avec le nommé Roux de Marsilly, en sorte que l'un ne faisait rien sans la participation de l'autre et étaient enfermés les nuits entières chiffrant conjointement ; ce Veiras se dit envoyé de ceux de la RPR de France, il est protégé par le comte d'Orreri qui a l 'habitude de l'employer en Irlande, à cause de la proposition que ledit Veiras lui a faite d'amener quantité de Français audit pays .Il fréquente souvent chez le duc de Buckingham  et milord Arlington et allait aussi chez l'ambassadeur d'Espagne."
  L'ambassadeur du roi de France à Londres écrit  encore: "m'étant enquis de ce Veiras dont je vous ai écrit, j'ai su de plusieurs endroits qu'il était le camarade (de Roux de) Marsilly, aussi méchant que lui, employé dans les mêmes affaires, dont il a une entière connaissance et les continue encore. Il est du même pays, était autrefois servant (valet, secrétaire,  de Bellings en Irlande ) sous le nom de Portal ) ;  depuis ,s'étant intrigué dans des cabales et ayant parlé contre le roi d'Angleterre et le gouvernement, il fut condamné à un bannissement perpétuel , nonobstant lequel il est revenu sous le nom de Veiras, s'est associé avec Roux, a reçu des lettres de ce scélérat pendant qu'il était en Suisse, a un chiffre avec lui, et depuis sa détention (celle de Roux) continue ces mêmes pratiques; il a vu souvent l'ambassadeur d'Espagne et on croit qu'il en a aussi tiré de l'argent.
 «  Le même homme  qui m'a donné cet avis [ l’acolyte jésuite que le Pape avait donné à Jacques de la Cloche, alias Veiras,  pour l’accompagner dans sa mission en Angleterre, mais dont il s’était débarrassé],  que je dois vous dire , Monsieur, avoir été ami dudit Veiras, avoir gardé ses papiers et ne s'être brouillé que sur des dettes [argent promis s’il le débarrassait de sa présence] et prétentions [d'être le roi légitime de France], m ' a dit que le voulant faire arrêter, et ayant su que le comte d'Orrery  le protégeait auprès du duc de Buckingham, il avait voulu en parler au duc, mais que l'un de ses domestiques [de Buckingham], qui est de ses amis, lui avait dit de n'en rien faire, que Veiras était fort bien avec ledit duc [son demi- frère] , et que lorsqu'il ordonne à ses gens de dire à ceux qui le viennent voir qu'il n'y est pas, il en exceptait toujours celui- là avec lequel il était quelquefois des heures enfermé [précaution pour éviter que sa ressemblance avec le roi de France et avec le duc ne puisse être remarquée]; ce donneur d'avis  s'est même offert de faire arrêter ce Veiras sous le prétexte de son premier bannissement et dit qu'il a un témoin qui est le secrétaire d'un évêque qui lui soutiendra ce qu'il a dit , encore depuis peu ,  de la personne du roi d'Angleterre et de son gouvernement". De Lionne lui répond : "le roi ne veut pas non plus que vous fassiez aucune instance au roi d’Angleterre, de quelque nature qu'elle soit,  sur le sujet de Veiras; abandonnant cet homme à sa mauvaise conduite dont Dieu pourra fournir quelque jour les moyens de ne pas la laisser impunie".Bel exemple de feinte clémence chez un roi qui ne nous y a guère habitués.
  Jacques de Lacloche, lorsqu’il prendra ce pseudonyme, donnera une version édulcorée de son bannissement par le roi en forgeant une  lettre censée
prêtée à Jacques II en date du  8 août 1668 où il évoque l’interception de ses courriers et ses conséquences : « nous fûmes obligés […] de consentir, aux occasions, à plusieurs choses  tournant au désavantage de plusieurs catholiques de notre royaume d’Hybernie (l’Irlande) », savoir son bannissement. 
  Dans un autre rapport, on lit :"Le papier ci- joint  qui contient un projet de requête des religionnaires (protestants) de France  au Roy de la Grande-Bretagne a été pris audit Veiras, et est écrit, à ce qu'on assure, de sa main, que Roux de Marsilly reconnaîtra". Il serait intéressant de pouvoir comparer l'écriture et les idées avec celles des textes de Jacques Stuart de Lacloche.  Le Ministre de Lionne écrivit aussi à son ambassadeur : "Roux ayant fait savoir au roi qu'il désirait la grâce  de lui pouvoir parler pour lui révéler des choses qu'il ne pouvait confier qu'à sa seule personne, Sa Majesté n'a pas voulu le voir et m'a envoyé à la Bastille" à deux reprises ; voulait-il lui révéler l'identité et les prétentions du demi- frère du roi, le trahissant et  révélant  au roi de France qu‘il avait pris l‘identité de Veiras? Le roi d’Angleterre n’avait- il plus, dès lors,  qu’à indiquer à Louis XIV la date de son arrivée à Calais  et sa fausse identité de «  Matteo Battaglia, valet du roi  et musicien »? Que signifient d'autre part les paroles « effroyables » qu'il prononce contre le roi sur la roue et comment Louis XIV peut- il dire : "M. le lieutenant criminel, nous voilà débarrassés d'un bien méchant homme" ? 
Les trois  pseudonymes Henri Cromwell ( nom du  fils puîné du fondateur de la république anglaise et du responsable de la décapitation du roi)  porté par le futur Masque en Irlande, alias qui disparaît mystérieusement après 1659 ou plutôt auquel succède ,  toujours en Irlande, celui de Portal: la rumeur rapportée par son futur geôlier Saint- Mars parle , à propos du Masque de fer, d’un fils de Cromwell , l’aîné , Richard) et Henri de Rohan annoncent la couleur car ce dernier  ,”à nous très connu et intime”,  écrit Jacques de Lacloche en signant du roi d’Angleterre, était le chef des calvinistes.  Curieux choix de pseudo pour un nouveau converti au catholicisme.
Le pseudonyme de Borrey, grand- prévôt de la Franche- Comté espagnole, ami de Roux et l’accompagnant en Suisse, est mal relevé  et transcrit par erreur Bovere (un Bover a été le transcripteur, semble-t-il, de là l’erreur) dans l ‘état- civil du comparse de Jacques de Lacloche, celui qui lui a volé des papiers.
De qui ce  Portal  fut-il le servant, le valet, disons plutôt  le secrétaire particulier, l'homme de confiance? Du noble  Irlandais Richard Bellings (né à Dublin 1600? -1677), catholique, secrétaire de la Confédération irlandaise en 1642,  secrétaire particulier de la reine- mère Henriette-Marie à Somerset House  (de qui Bellings tint  son secrétaire Portal) et messager secret de Jacques II, envoyé , fin 1962,  par le roi d'Angleterre à Rome  avec Portal,  pour négocier l'accession au cardinalat de lord d'Aubigny ainsi que la conversion secrète, en prime en quelque sorte, du roi au catholicisme, si le chapeau de cardinal était accordé à son parent. C'est à Richard Bellings, pour qui il éprouva une grande admiration, que le Masque  dut sa conversion au catholicisme. Quelles furent les deux causes de la condamnation de Portal au bannissement perpétuel?
Première cause du bannissement du futur Masque : des vues trop hardies sur la liberté de conscience.
 Notre secrétaire rédige des lettres au pape et il les signe du nom de Jacques II : surtout, il va trop loin dans ce qu'il fait écrire au chef de l'Eglise anglicane, même en latin.
"(Le roi) déclare qu’il déteste le déplorable schisme et l'enseignement hérétique introduit par Luther, Zwingli, Calvin, Menon [fondateur des Menonites aux Pays-Bas], Socinius pour Sodinius, Brown [Robert Brown , fondateur du Congrégationnisme], et autres maudites créatures de cette sorte, car il sait d'amère expérience, et mieux que personne dans ses trois royaumes de Grande-Bretagne, d'Ecosse et d'Irlande, quels puissants démons ont été introduits par la soi-disant Réformation, qui mériterait d'être appelée la Déformation. Car cela a jeté bas tout gouvernement établi et a introduit une confusion digne de la tour de Babel à la fois dans l'Eglise et dans l'Etat". « Remarquable déclaration de foi », constate sereinement le catholique Msgr. Barnes, p.155, 1908, à comparer avec les déclarations signées de Jacques de La Cloche (lettre du  7 septembre 1668) : « la religion protestante, à laquelle nous faisons semblant d‘être attaché plus que jamais, quoique devant dieu qui connaît les cœurs nous l‘abhorrions comme très fausse et pernicieuse… » Suivent 24 notes très hardies, annonciatrices de la constitution civile du clergé sous la Révolution française, en faveur d'une Réunion concordataire de la papauté et de l'Angleterre, Barnes,   P. 155-156, et  Laloy, Enigmes du grand siècle, 1913, p, 17 : "Les archevêques et évêques en fonction qui donneraient leur adhésion à ce concordat devraient être confirmés par trois légats apostoliques nommés pour cela uniquement. L'archevêque de Cantorbéry  deviendrait le patriarche des trois royaumes et le chef de l'administration ecclésiastique, sauf dans certaines matières réservées à un légat ad hoc, qui devrait être de nationalité anglaise et résider en Angleterre. Le reste du gouvernement de l'Eglise serait dirigé par des synodes diocésains annuels et par un concile national se réunissant à des dates fixes. Le roi nommerait les évêques et les biens de l'Eglise confisqués seraient maintenus à leurs possesseurs actuels. Les prêtres mariés conserveraient leur femme, mais ceux qui seraient ordonnés par la suite observeraient le célibat. La messe serait célébrée en latin, mais accompagnée de cantiques en anglais, et l'Eucharistie serait donnée sous les deux espèces à ceux qui le souhaiteraient. La liberté de conscience serait accordée à tous, ni Charles ni ses successeurs ne pourraient être obligés de traiter cruellement les Protestants Quelques congrégations seraient autorisées, même les jésuites dans l’enseignement, ainsi que d'autres pour les soins hospitaliers.".
  Seconde cause du bannissement : les menaces contre le Pape
Bellings et le futur Masque ont rendu visite au cardinal de Retz à Paris sur la route de Rome.  Notre Masque,  sous le pseudonyme de Retz, va à Hambourg,  d’ où il menace le Pape d'expédier une flotte de vingt navires devant Civita-  Vecchia s'il n'obtempère pas à la demande de cardinalat pour lord d’Aubigny.
  Après sa condamnation au bannissement, Portal change de pseudonyme et  devient le protestant Veiras , anagramme de Villiers (de Buckingham) et de Marcilly, et entre dans la conjuration de Roux pour prendre le pouvoir en France. Il joue là un jeu difficile : en 1669, il est à la fois le catholique faux abbé Pregiani auprès du roi Louis XIV et le protestant Veiras auprès de Roux,très républicain.
Il nous reste à étudier deux épisodes importants de sa vie : l’épisode romain et l’épisode anglais.
I L’épisode romain : Jacques de la Coche.
La conversion à Rome au catholicisme : le novice jésuite répondant au pseudonyme de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay.                 
 Le futur masque   n’avait pas de certificat de  baptême et ne pouvait aucunement prouver son identité. Il lui en fallait un s’il voulait devenir novice. Qu’à cela ne tienne ! Il rédige en latin  un faux certificat qu’il signe de  l’ex-reine Christine de Suède, convertie au catholicisme et vivant à  Hambourg :
 « Jacques Stuart, incognito sous le nom de De la Cloche du Bourg, naquit dans l’île de Jersey (sic !) et il est le fils naturel de Jacques II,  roi d’Angleterre. Sa Majesté britannique nous a reconnu en privé qu’il était bien tel. Il fut élevé dans la secte calviniste, mais il l’a aujourd’hui quittée pour se joindre à la Sainte Eglise Romaine à Hambourg le 29 juillet 1667. Nous avons trouvé bon de confirmer et d’attester ceci de notre main, même si cela n’est pas dans nos habitudes, afin que dans sa situation extraordinaire il puisse être capable d’ouvrir son cœur à son directeur en confession et de chercher conseil pour le salut de son âme.
(Cachet) Christina Alexandra »
Il se garde bien de nous indiquer ses parrain et marraine. Il choisit aussi  le nom sous lequel il prétend s’être fait baptiser,  Jacques de Lacloche du Bourg de Jerzais,  en souvenir de l‘ami  protestant de Cinq-Mars . Pourtant, rappelons-le, notre Jacques de Lacloche de Jersay n’a aucune ascendance dans l’île anglo-normande de Jersey , il le reconnaît lui- même dans la lettre prêtée à Jacques II du 7 septembre 1668 : « Votre Révérendissime Paternité fera courir le bruit qu’il (Jacques de Lacloche) est allé à Jersé ou Hanton (le port de Southampton) voir sa mère prétendue qui se veut faire catholique, comme nous avons mis et dissimulé (cherché à faire croire) dans cette autre lettre »[lettre du 3 août et surtout du 29 août 1668: « nous lui avons ordonné d‘aller à Jersé et à Hanton (le port de Southampton) , …qu‘il feigne  à Votre Révérence qu‘il est fils d‘un riche prédicant, lequel étant mort depuis quelque temps , sa mère mue de quelque envie de se faire catholique et de lui donner le bien qui lui appartient, lui a écrit et qu‘ainsi Votre Révérendissime paternité, désireuse du salut de cette personne et de la faire catholique, voyant aussi qu’il peut avoir son bien, lui permettra facilement d’aller (en Angleterre) ».]
Un problème compliqué : les trois personnes impliquées dans le voyage sur Paris e t les deux abbés Prégiani, le vrai et le faux. .
 Le pape avait exigé la présence d’un autre novice francophone, dont nous savons seulement qu’il était languedocien, aux côtés de Jacques de la Cloche, ce qui ne pouvait plaire à ce dernier.  Il réussit à s’en débarrasser en lui promettant  peut-être de l’argent ; mais celui-ci le rejoindra en Angleterre et c’est lui qui le livrera.
   Toutefois, Jacques de la Cloche à Naples rencontra un autre français, qui avait peu de scrupules et lui vola son identité. Cet escroc  s’éprit de la fille de sa logeuse à Naples.  Malheureusement pour lui, il mourut quelques mois après le mariage,  le  7 septembre 1669  et on l’a pris pour Jacques de la Cloche.
Il nous faut réfuter la thèse généralement adoptée aujourd'hui qui  fait mourir Jacques de La Cloche lui-même  à Naples le 7 septembre 1669 .Il s’agit manifestement , non de Jacques de la Cloche, mais de l’escroc qui lui a volé son identité. De même l’abbé Prigiani auquel Jacques de la Cloche empruntera son nom survivra à l’arrestation du faux Prégiani, le Masque de fer. Primi Visconti , dans ses Mémoires,  le signale à Rome  où il meurt en 1779, de syphilis. Mais ce n’est pas le Masque de fer.
Le départ de Rome pour l’Angleterre ou exit Jacques de La Cloche et l’apparition du faux  abbé Prégiani.
Ainsi, notre ancien membre de la Religion Prétendue Réformée, Portal, puis Veiras, s’était converti au catholicisme et il était même devenu novice à Rome chez les jésuites,  sous le nom de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay. Il forge diverses lettres qu'il signe de Jacques II,  roi d'Angleterre ,dont des actes de reconnaissance du roi Jacques II comme étant son fils naturel, puis se fait rappeler à Londres par une fausse lettre de celui-ci au général des jésuites .Une autre lettre du roi ( en réalité de notre Jacques lui-même), d'une naïveté touchante , témoigne de l'ennui que cause au roi  pour son fils bien- aimé cette obligation faite aux jésuites de voyager accompagné par un acolyte , règle dont le roi  demande , en vain, l'exemption au général des jésuites . Le roi (entendons Jacques de Lacloche) interdit à son prétendu fils de le rejoindre en Angleterre avec un jésuite italien : même si c’est un Français, celui-ci ne devra pas l’accompagner en Angleterre. C’est ce que le général des jésuites acceptera  en partie en donnant au  futur faux abbé Prégiani un acolyte  francophone, dont jacquyes de la Cloche se débarrasser avant d’atteindre Naples, mais qui le rejoindra en Angleterre et le trahira.     Au lieu de se rendre à Libourne  pour gagner Paris et Londres, ils prennent tous deux la direction inverse et arrivent à Naples, patrie du vrai abbé Prigiani (un  agent du grand-duc de Toscane et affidé de  la société secrète  des alchimistes). A  Naples résidait  un abbé  de San Aniello , faisant partie    des chanoines réguliers de Saint-Sauveur  , et Jacques de La Cloche se fait confesser par lui : "Jacques poursuivit avec une grande fréquence et ferveur ses exercices de religion... Il ne donna sur lui - même à ce confesseur que des renseignements équivoques et obscurs, disant que son père était un grand seigneur anglais (le duc de Buckingham, protestant)  et que sa mère, également de grande maison, professait la vraie foi de l’Eglise  romaine (l'espagnole et catholique Anne d’Autriche) ; il avait lui- même abjuré l'hérésie et s'était converti, éclairé par d'excellents religieux (Bellings)."  
  Tandis qu'il se livre à ses exercices religieux,l’ escroc qui lui avait volé son identité tombe amoureux de la logeuse d'une l'auberge et, la mariée attendant un héritier,  il doit se marier d'urgence le 10 février 1669, sous le nom ronflant de dom Jacobus Henricus de Boveri (Borrei, le prévôt de Franche-Comté) Roano (Henri de Rohan),  anglicani (calviniste) et  baron de San Marzo .   Dans son testament, sur son lit se mort, il fait des dons fastueux, engageant un marquisat imaginaire de Juvignis, valant 300 000 doublons et plus : selon nous, c’est l’altération du nom du  marquis de Ruvigny, le protestant qui était l’ami de Cinq-Mars et l’amant de Mademoiselle  de Rohan.
  Avant la célébration du mariage,   Jacques  de Lacloche  , sous le nom de Jacques Stuart, le quitte en lui laissant une partie des doublons remis par le général des jésuites, trop heureux de se retrouver libre et seul.  On remarque que son acolyte en parle comme d’un chevalier appartenant à l’Ordre de Malte. Or, le «Très Grand  Auteur » de la société secrète des alchimistes,  François Galaup de Chasteuil, se faisait appeler” le chevalier”  et,  en 1644, il était devenu chevalier de l'ordre de Malte, car il avait rendu à l'ordre des services signalés : le grand- maître en personne, Lascaris, avait attaché sur sa poitrine la croix d'honneur.  Jacques de Lacloche se rend à Paris en passant justement par le château italien appartenant à Galaup de Chasteuil, le château de Verceil, où il reçoit argent et  mission.
  Il  rend aussi, probablement, visite au grand-duc de Toscane  qui lui confirme sa mission et rend visite à Henriette d’Angleterre,  puis arrive à Londres où il rencontre Jacques II.
  Que prétendait faire le frère aîné de Louis XIV en soutenant le complot de Roux  de Marcilly d’une part et d’autre part en jouant le convertisseur au catholicisme de Jacques II,   lui l’ancien calviniste? Pourquoi ce plan, fou en apparence,  l’amenant à se dire le fils naturel de Jacques II, ce qu’il savait être faux?
  Il voulait , d’une part, en ramenant le royaume d’Angleterre dans le sein de l’Eglise , faire ce que réussit à sa place Dom John Hudletone qui donna l’extrême onction catholique à Jacques II, le convertissant in extremis le 5 février 1685.
Mais, pour cela, il fallait que le  futur Masque puisse approcher le roi sans donner de soupçon à la cour que « le papisme et les sabots », voire les jésuites , rôdaient : tel est  le but du stratagème du faux abbé soi-disant théatin (donc non- jésuite) Prégiani approchant le roi sous couleur d’astrologie et d’expériences de chimie et celui de l’invention d’un fils naturel du roi.
  Ignorant des difficultés que la papauté lui opposerait nécessairement puisqu’on ne peut être catholique en secret ni ordonné prêtre sans attester de son identité, naïf en somme, il écrit sous la signature de son père supposé Jacques II (lettre du 3 avril 1668) : 
« il y a longtemps que nous prions Dieu de nous faire naître l’occasion de pouvoir trouver une seule personne dans nos royaumes de qui nous puissions nous fier touchant l’affaire de notre salut sans donner ombrage à notre cour que nous fussions catholique.  La providence de Dieu a pourvu et secondé nos désirs, nous faisant naître ( !) à la religion catholique un fils auquel seul nous pouvons nous fier dans une affaire si délicate. Il sera toujours assez capable pour nous administrer en secret les sacrements de la confession et de la communion (la conversion au catholicisme) que nous désirons recevoir au plus tôt. »
Le faux Jacques II continue : « Si notre cher et bien aimé fils n’est prêtre , et s’il ne peut pas l’être sans faire savoir publiquement son véritable nom et sa naissance [autre que Jacques de La Cloche ], ou pour autres circonstances (ce que nous disons pour ne savoir pas votre manière d’agir en ces rencontres) . En ce cas, qu’il ne se fasse plutôt point prêtre à Rome que de rien dire aux évêques ou prêtres qui il est, mais  qu’il passe par Paris… Le roi et Henriette d’Angleterre trouveront et auront le pouvoir de le faire prêtre, sans que l’on sache qui il est et avec tout le secret possible, comme nous nous persuadons. Si ce n’est que, sans tant de détours, il aime mieux venir à nous sans être prêtre, ce qui sera peut- être le mieux, puisque nous pourrons faire la même chose par le moyen de la reine notre honorée mère ou de la reine régente qui pourront avoir à leur volonté évêques, missionnaires ou autres, pour faire la fonction, sans que l’on sache et s’aperçoive de quoi que ce soit. »
A noter le lapsus calami freudien révélateur: au lieu de la reine régnante (il s’agit de la femme du roi d‘Angleterre, lettre du 3 août 1668), le futur masque écrit la reine régente. Il récidive dans sa lettre du 29 août, tant l’idée de sa propre régence  lui tient à cœur.
Sur le même point (lettre du 29 août 1668) : « S’il y a quelque chose que l’évêque ordinaire (de Londres) ne puisse pas faire sans permission de  Sa Sainteté, que (Jacques de La Cloche) ne manque pas de  pourvoir très secrètement (à son ordination), en telle sorte qu’on ne vienne point à savoir qui il est ; ce qu’il fera,  s’il peut, auparavant que de partir de Rome. »   Le 4 août, il semble se résigner volontiers à ne pas devenir prêtre, prétextant que ses forces et sa constitution sont trop faibles Et puis « On peut être bon catholique sans être religieux.» Passez muscade ! Bref, il y avait trop de difficultés pour être ordonné, si bien que l’invention d’un abbé alchimiste et astrologue se révèle indispensable. Exit Jacques de La Cloche!
2 L’épisode anglais et  le faux abbé Prégiani, agent de Louis XIV ( !) destiné à convertir secrètement le roi d’Angleterre au catholicisme.
Nous employons l'orthographe Prégiani, distinction très relative, mais commode,  pour différencier le faux  abbé du vrai dont nous orthographions le patronyme  Prigiani, abbé napolitain qui a survécu à l'arrestation du Masque, et qui mourut à Naples - ce qui a amené à tort Barnes et Laloy à revoir leur copie lorsqu'ils ont été persuadés que l'abbé Pregiani et le Masque de fer ne pouvaient être le même homme. C'est ce faux abbé Pregiani qui, sous le nom de Matteo Battaglia, valet (servant) du roi, sera arrêté par le major de Vauroy aux alentours de Dunkerque deux jours après le départ signalé de notre abbé pour l'Italie  en passant par Paris.
 Le signe qu'il s'agit bien de notre homme nous est donné par Jacques II dans une lettre chiffrée   en anglais, du 20 janvier 1669, à sa soeur  Madame Henriette d’Angleterre, duchesse d’Orléans.  Louis XIV détruira cet  échange de correspondance après la date du 24 juin 1669, nous privant, bien entendu,  de ce qui concerne le secret du Masque de fer . Il reste la lettre de Jacques II à sa sœur Henriette : "j'en étais arrivé ici de ma  lettre, quand je reçus la vôtre par l'Italien dont vous ne connaissez pas le nom ni la qualité ( !), et il me la remit dans un passage où il faisait si noir que je ne reconnaîtrais pas sa figure si je le voyais de nouveau (ceci se passe au palais de Whitehall!) Cet homme réussira sans doute (ironie) puisque sa recommandation (il n’en aucune puisque Henriette ne connaît, écrit-elle, ni son nom ni sa qualité) et sa réception (dans le noir) s’harmonisent si bien. » Le roi est aussi prudent que sa soeur : ils ne  veulent pas avoir aperçu la ressemblance criante entre le messager italien et Louis XIV.
  Le même tabou d’évitement se retrouve dans le comportement de Louis XIV vis- vis du faux abbé,  tel que son ministre  de Lionne en fait part à son ambassadeur à Londres le 13 février 1669 :"Sa Majesté  défend  (à l'abbé) de rien écrire ici, tant qu'il sera en Angleterre, non pas même à moi, Sa Majesté ne voulant rien connaître que par votre seul canal, comme il est juste; et que par conséquent, quelque chose qu'on lui pût dire dont on lui demandât le secret à votre égard, il doit vous le dire tout; et que s'il manquait à cela, et qu'il le fît passer ici sans votre participation, Sa Majesté, quelque avantageuse que lui pût être la chose, lui enverrait aussitôt ordre de s'en revenir".
Les trois missions secrètes  de l'abbé sont fort embrouillées :
1)La seule dont l'ambassadeur ait connaissance consiste dans la négociation du traité secret de Douvres par lequel la France, catholique  s'unit à la protestante Angleterre contre la protestante Hollande, avec en plus   un salaire versé secrètement au roi d'Angleterre. Sont au courant seulement le roi de France, l'ambassadeur à Londres, le ministre de Lionne , le roi d'Angleterre et sa soeur Henriette , puis,  rapidement,  par les indiscrétions de l'ambassadeur, l'abbé et son demi-frère le ministre protestant Buckingham.
  2) Mais  ce n'est là que l'aspect le plus clair de sa mission : pour doubler l'ambassadeur dont c'est pourtant la fonction, le roi de France a consenti  à  envoyer, sur la demande de Jacques II ,  un abbé en apparence astrologue et chimiste sous le prétexte de la première mission, mais en réalité destiné à enseigner secrètement à Jacques II les éléments du catholicisme pour le préparer à sa conversion.  Seuls Jacques II, sa soeur Henriette et l'abbé sont au courant de son désir secret de se convertir : c’est ce que Charles appelle le "grand secret" dont Msgr Barnes raconte très bien les détails. On trouvera , après la mort de Jacques II, dans sa poche,  avec des reliques  liées également à quelqu'un  qu'il a trahi (l’abbé), des papiers de controverse religieuse rédigés par l'abbé en français (Barnes, op. cit, . p.262), le texte français se trouvant dans les archives du Vatican, et une autre version existant,  traduite en anglais, -tout ceci  montrant que l'abbé (précédemment le séminariste jésuite Jacques de La Cloche) s'est bien acquitté de la mission voulue par Jacques II, mission dont Louis XIV se souciait  comme d'une guigne et qu'il ne lui avait aucunement confiée, puisqu'il ignorait le désir de Jacques II de passer au catholicisme secrètement .  Le roi d’Angleterre préfèrera trahir l'abbé plutôt que celui qui le stipendie, le roi de France,  et lui indiquera la date où l'abbé quitte l'Angleterre et sous quelle identité (celle du  valet Battaglia).
3) Mais la mission la plus secrète et la plus invraisemblable,c’est celle que Louis IV  confia, non sans  hésitation ,  au faux abbé Pregiani, peut-être sur l’imprudente  demande de ce dernier  auprès de  la seule intermédiaire que le roi acceptait, Henriette d’Angleterre : cette mission  consistait à donner au roi de France des informations sur l'homme qui se faisait passer pour l'héritier légitime de la couronne de France,  Veiras, l’homme qui était le fer de lance et l'arme secrète de la conjuration de Roux de Marsilly, -cet homme  qui n'était autre que lui-même ! 
 Pourtant, Louis XIV, méfiant, n’accepte, ni  de  rencontrer l’abbé,  ni  de recevoir de missive de sa part. Lorsque,  plus tard , le roi de France voudra s'enquérir auprès de Fouquet  si Eustache Dauger, emprisonné avec lui et lui servant de valet, c’est-à-dire l’abbé Prigiani , avait révélé devant l'autre valet de Fouquet, Larivière,  "ce  à quoi il avait été employé (par le roi Louis XIV-le passif impersonnel est révélateur!) avant son arrestation" ,  ce n'est que de la 3e mission qu"il s'agit, celle qui révèle l'inquiétude du roi sur l’identité du  prétendant. Et ceci démontre bien que Fouquet savait tout avant son incarcération à Pignerol en 1661. De même, lorsque Jacques II écrit à sa soeur le 7 mars 1669 : "J'ai constaté que l'abbé Pregnani avait beaucoup d'esprit, mais vous pouvez être sûre que je n'entrerai pas en liaison avec lui plus qu'il ne convient aux renseignements que vous m'en avez donnés" "Your character" signifie, non pas comme Laloy le traduit, p.74," à votre caractère", mais : à la description de l'individu).
  Richard Bellings est l'homme -clé qui a mis  en relation notre futur Masque et Jacques II : c’est Bellings qui  est intervenu à deux reprises comme représentant personnel secret de Jacques II , une première fois vis- vis du Saint-Siège pour négocier le chapeau de cardinal de lord d’Aubigny d'abord, puis une  seconde fois  vis- vis de Henriette d’Angleterre. Malgré le fait que le futur Masque  ait été trop loin la première fois et que,  condamné au bannissement, il ait dû changer de  pseudonyme, il est resté dans les meilleurs termes avec son maître.
 La lettre du 8 août 1668 (citée par Msgr  Barnes, op. cit., p.305 et 306) et fabriquée par Jacques de Lacloche annonce le plan qu'il mettra en oeuvre sous le pseudonyme  du faux abbé Pregiani : approcher Charles pour lui expliquer la supériorité du catholicisme sans donner de soupçons aux protestants, sous le prétexte qu'il serait son fils naturel, avant même  que le roi n’ait  songé au paravent de l'astrologie et des expériences de chimie, dès lors qu'il aura obtenu pour le souverain le privilège d'être catholique dans son for intérieur tout en demeurant provisoirement le chef de l'Eglise anglicane :"Quoiqu'il y ait eu ici (à Londres) une multitude de prêtres, tant au service de la reine dont une partie a habité dans nos palais de Saint- James et de Sommerset  -House, que dispersés dans toute notre ville de Londres, toutefois nous ne pouvons nous servir d'aucun, pour l'ombrage que nous pourrions donner à notre cour par la conversation de telles gens qui, sous quelques déguisements d'habits qu'ils puissent avoir, sont aussitôt reconnus pour ce qu'ils sont... Comme il (Jacques de La Cloche ) n'est ici connu en aucune façon, ...nous pouvons en toute sûreté converser avec lui et exercer en secret les mystères de la religion catholique, sans donner ombrage à qui que ce soit de notre cour que nous soyons catholique, ce que nous ne pouvons faire avec aucun missionneur ( anglicisme pour prêtre de paroisse), tant aussi pour la confiance que nous avons de lui ouvrir notre conscience avec toute liberté et sincérité, comme à une partie de nous-même ...Dieu s'en veut servir pour notre salut".
  La pierre d’achoppement, ce sera son identité sulfureuse et son soutien au protestant Roux de Marsilly, poussant le roi d’Angleterre à dénoncer son ami à celui qui le rémunère chaque mois : Louis XIV.


   






 L’opposition à Louis XIV, ou  Voltaire avait- il raison à propos de l'Homme au Masque de Fer? Réexamen de mon blog précédent à la lumière du livre récent de Marc Sonnino, The search for the man in the iron mask, a historical detective story.

  C'est Voltaire qui a créé le mythe du Masque de Fer en 1751 dans Le Siècle de Louis XIV et, comme la question avait piqué sa curiosité, il continua à s'interroger toute sa vie à ce sujet : dans le Dictionnaire philosophique, à l'article Anecdotes, en 1764, il discute  diverses hypothèses sur son identité ;  enfin dans ses Questions sur l'Encyclopédie, 2e édition (1771), il révèle qu'il s'agissait, non d'un jumeau, mais d'un frère aîné de Louis XIV  qui était le fils de la reine Anne d'Autriche (espagnole malgré son nom), l’épouse de Louis XIII,  et du duc George Villiers de Buckingham , fils légitime en quelque sorte (is est pater quem nuptiae denuntiant) , né en 1626 , ce qui expliquait à la fois sa ressemblance criante avec Louis XIV et le danger d'une contestation de la légitimité de ce dernier en vertu du droit d'aînesse et en vertu du fait qu'il était né dans les liens du mariage, -surtout si l'on pouvait de surcroît accuser Louis XIV de ne pas être le fils de Louis XIII, mais de quelqu'un de beaucoup plus basse extraction que le duc de Buckingham, comme le duc de Bellegarde.. L ‘assassinat de Buckingham par Felton devrait beaucoup à Louis XIV, a fait observer Dufet de l’Yonne, entendons qu’il a été inspiré par lui. Seul Jean Baptiste Regnault- Warin, dans  L’homme au masque de fer, Paris, 1804,4 vol., reprit sous forme romanesque la thèse de Voltaire ; Dumas et les romantiques reprirent l’idée du jumeau.

   De qui Voltaire, sous le sceau du secret, tenait-il ses informations? De Madame de Saint-Quentin, la maîtresse du marquis de Barbezieux, fils de Louvois, qui avait succédé à son père comme Ministre de la Guerre, l'un des derniers à connaître le secret puisqu'il gérait le sort du prisonnier.  En 1782, le marquis de Luchet, dans le Journal des Gens du monde (tome IV, n°23, page 282 et suiv.) “fit honneur à Buckingham de la paternité en litige. Il cita en témoignage une demoiselle de Saint-Quentin, ancienne maîtresse du ministre Barbezieux, morte à Chartres vers le milieu du dix-huitième siècle : selon elle, Louis XIV avait condamné son frère aîné à une détention perpétuelle, et  la parfaite ressemblance des deux frères avait nécessité l’intervention d’un  masque pour le prisonnier” .
 Selon le bibliophile Jacob, la première œuvre, anonyme,  en 1745, à parler du prisonnier, les Mémoires de Perse, serait de Voltaire qui s’était engagé auprès de son informatrice à ne jamais parler du Masque  et qui s’est ainsi donné un prétexte  pour pouvoir ensuite en parler sous sa signature, la chose étant dès lors  révélée.
 Soulignons  qu'aujourd'hui encore ce texte de Voltaire est censuré, par exemple dans les Oeuvres historiques de Voltaire publiées par René Pomeau dans la Pléiade, p. 1714, on lit le mensonge par omission :"Voltaire a noté dans ses Notebooks (p. 124) que le mystérieux prisonnier était "soupçonné d'être un frère aîné de Louis XIV", sans la mention de Buckingham, son père.
  En 1790, Charpentier, président d'une commission révolutionnaire destinée à inventorier les archives , reprend la même tradition dans La Bastille Dévoilée avant que la piste politiquement correcte de Mattioli ne devienne la vérité officielle.
   La Reine a-t-elle eu des rapports féconds avec cet homme qu'elle aimait?Le cardinal de Retz  nous répond dans ses Mémoires : Madame de Chevreuse avait confié à son ami le Cardinal à propos de la reine  "que le seul homme qu'elle avait aimé avec passion avait été le duc de Buckingham; qu'elle lui avait donné rendez-vous, une nuit, dans le petit jardin du Louvre ; que Mme de Chevreuse, qui était seule avec elle, s'étant un peu éloignée, elle entendit du bruit comme de deux personnes qui se blutaient [le texte porte se lutter par méconnaissance du vieux mot bluter, remuer le tamis, donner la saccade,  qu'on trouve chez Rabelais au sens de faire l'amour]; que s'étant rapprochée de la Reine, elle la trouva fort émue, et M. de Buckingham à genoux devant elle; que la Reine, qui s'était contentée, ce soir, de lui dire, en remontant dans son appartement, que tous les hommes étaient brutaux et insolents, lui avait commandé, le lendemain au matin, de demander à M. de Buckingham s’il était bien assuré qu'elle ne fût pas en danger d'être grosse ". Au lieu du Louvre, d’autres historiens situent la scène dans un jardin  d’ Amiens, entre le 7  et le16 juin 1725. Mais Buckingham n’était pas homme à prendre de telles  précautions. A côté de   ces indiscrétions rapportées par le Cardinal, mettons les paroles du Régent qui déclara que c'était un fils d'Anne d'Autriche.
  Mais quels sont les textes que Voltaire a pu connaître?
  D'abord, celui de René, Auguste, Constantin de Renneville dans L'inquisition française, ou l'histoire de la Bastille, par Mr. C. de R., Amsterdam- Leyde, 1724, 4 vol., avec un Supplément à l'histoire de l'inquisition française, 438 p. Il fut prisonnier à la Bastille de 1702 à 1713, et y  occupait une pièce juste sous celle du Masque de fer avec qui il tenta de communiquer en frappant au plafond  : il apprit de lui qu'il était un "abbé italien", mais  celui-ci  refusa de lui dire son nom (p. 122, édition 1715, références données par Monsignor A. S. Barnes, The man  of the mask, 1908).Selon nous, il s'agit bien du pseudo -abbé Pregiani, avatar napolitain de Jacques Stuart de La Cloche du Bourg de Jersais : donc du  Masque de fer.
La Princesse palatine, belle- sœur de Louis XIV, nous parle de lui dès 1711 en disant  qu'il communiait masqué, qu'il était très dévot et lisait continuellement, et elle ajoute plus tard n'avoir rien pu apprendre à son sujet, sinon qu'il s'agissait d’ « un milord anglais qui avait été mêlé à l'affaire du duc de Berwick contre le roi Guillaume. ".
  Le milord anglais fait allusion aussi à l’abbé Pregiani. Quant au duc de Berwick, c’était un fils naturel de Jacques II vivant à l'époque où la Palatine écrivit ces mots.  Ce peut être une allusion au fait que l’abbé Pregiani se soit présenté comme un fils naturel de Jacques II également. Mais cette   princesse trop curieuse a pu confondre Berwick et Warwick.    Pour  savoir quelles analogies existaient entre le Masque de fer et Warwick , interrogeons l’ouvrage de Esprit Joseph Chaudon (1776), Les imposteurs démasqués et les usurpateurs punis ou histoire de plusieurs aventuriers qui, ayant pris la qualité d'Empereur, de Roi, de prince ... ont fini leur vie dans l'obscurité. Il s'inspire pour l'Angleterre du Père Pierre  Joseph d'Orléans et de son Histoire des révolutions d'Angleterre, 1689.
Il s'agit du faux Edouard Plantagenet, duc  de Warwick (p.314 et suivantes), en réalité Lambert Sinnel, que son tuteur, le prêtre Richard Simondi, dressa à imiter parfaitement le maintien du vrai duc qu'il n'avait pourtant jamais vu.
Sans entrer dans le détail de la révolution qu'il suscita pour prendre le trône vers 1486,disons que son mentor et lui-même   furent finalement vaincus et que le roi vainqueur , Henri VII (et non Guillaume III), "ne voulut point leur ôter la vie pour les faire servir plus longtemps d'exemple; le prêtre fut confiné dans une prison inconnue, où il passa le reste de ses jours , et le jeune homme dans une cuisine du palais, où, par un jeu bizarre de la fortune, après avoir assez bien fait un personnage pour lequel il n'était pas né, il s'acquitta de celui qui était qui était conforme à sa naissance. On l'en tira quelque temps après pour le faire fauconnier, et ce fut là que se terminèrent sa royauté et ses honneurs. On dit qu'Henri se donna un jour le plaisir méchant de faire servir des députés irlandais [qui avaient pris parti pour lui lors de ses complots], dans un repas qu'il leur donnait, par ce roi imaginaire. Il punit peut- être mieux par ce trait, dit le Père d'Orléans, la vanité de l'un et la crédulité des autres, que par un châtiment éclatant".
  On songe au Masque de fer devenu le valet de Fouquet qui avait certainement  connu le secret de son existence et dont Louis XIV avait redouté qu'il ne prenne son parti. La devise de Fouquet dont le nom signifie écureuil portait en latin : Quo non ascendam ? Jusqu’où ne monterai-je pas ? 5jusqu’à la royauté ou du moins la place de premier Ministre]. Comme le dit  M. de Chamillart (Voltaire, Réponse à La Beaumelle), l'homme masqué "connaissait tous les secrets de M. Fouquet", entendons le secret de sa disgrâce s'il avait vraiment voulu soutenir ses prétentions un jour. Fouquet savait tout, avant même son incarcération, de l'existence de cet héritier de la couronne, grâce à son cousin Fouquet de Croissy de Marcilly  qui donna au Masque, comme nous le verrons, son nom de Marcilly. C’'est peut-être  l'une des causes, la plus profonde en tout cas, de sa condamnation dont Louis XIV souhaitait qu'elle soit la  mort et qu'il aggrava par un acte personnel. Les papiers dont le ministre déplorera auprès de son geôlier Saint- Mars qu'il les ait laissé prendre à son fils après sa mort auraient pu contenir des indications sur l'identité de notre prisonnier.
  Autre indice donné à regret par Louis XV à sa fille qui insistait, et qui écarte seulement une fausse piste : son emprisonnement « n'a fait de tort qu'à lui- même », c'est- à- dire que ce n'est pas Mattioli , marié et père de famille, vivant avec sa famille et la faisant vivre, au contraire de notre homme Masqué.
  La question du valet (servant en anglais) ou le pseudonyme de Matteo Battaglia au moment de l'arrestation et la profession de valet (servant en anglais) de Portail, secrétaire de Msgr Bellings.
  "Comme ce n'est qu'un valet..." a écrit Louvois  à Saint- Mars le 19 juillet 1669 à propos du Masque de fer. Cette phrase a fait couler beaucoup d’encre, inspirant même une étude d'Andrew Lang, The Valet’s Tragedy, où il avance l'ingénieuse hypothèse de Martin, le valet de Roux : mais celui-ci semble bien être prudemment resté en Angleterre après le supplice du protestant Roux de Marsilly, lequel connaissait l'identité du futur homme masqué et entendait bien s'en servir dans sa conjuration internationale (Suède, Suisse, Hollande, Angleterre, Espagne) pour déposer Louis XIV.
 Nous exploitons des ouvrages anglais et américain dans ce blog, en particulier celui de Monseigneur Barnes. Et précisément,  Monsignor Arthur Stapylton Barnes nous donne une partie de la réponse nous dans son ouvrage The Man of the Mask, a study of the by- ways of history, 1908, p.250, avec pour références State Papers (Domestic) , 1668- 1669, p.312: le 6 mai 1669, un passeport est émis directement par le roi d'Angleterre Jaques II, alors que les passeports étaient normalement délivrés par le ministère des affaires étrangères , au profit de Matteo Battaglia, , "king's servant", le valet du roi, afin de retourner en Italie pour trois ou quatre mois et de revenir à Londres. En somme ,c'est sous ce nom d'emprunt , Battaglia, que s'embarque le faux abbé Pregnani (encore un pseudonyme),alias le Masque de fer,  trahi et dénoncé par le perfide  Jacques II à qui il se fiait, et c'est  avec cette qualité de valet qu'il est arrêté à Calais  par le capitaine de Vauroy sur  un ordre de Louis XIV du 28 juillet 1669.Or Battaglia existait bien, mais loin d'être le valet de qui que ce fût, il était musicien ( peut -être faut-il voir là l'origine de la rumeur dont la phrase de Voltaire est l'écho : "il jouait de la guitare") et maître de chapelle de la reine à Saint James . Le vrai Battaglia n'alla pas en Italie cette année- là. La question du valet, pour nous, est donc réglée.
Le pseudonyme donné au Masque après son arrestation par Louis XIV: Eustache Dauger ou Danger.
Lorsque, le 28 juillet 1669, Louis XIV dans une lettre à Saint- Mars, évoque "le nommé"... (en blanc )" et que dans sa réponse du 21 août à Louvois Saint-Mars parle du "nommé Eustache d'Anger", il faut bien admettre qu il s’agit d’une personne qui n’a jamais existé réellement.   Eustache Dauger ou plutôt  Danger   (allusion à l’origine angevine de Fouquet de Croissy et des Fouquet en général) Pourquoi Danger, alias  d’Angers ? Parce que la famille de l’homme qui avait donné son nom à la naissance du fils d’Anne d’Autriche et de Villiers de Buckingham était un Fouquet d’origine angevine, seigneur de Marcilly- sur Maulne en Indre- et- Loire où l’on peut encore voir un très beau château appartenant à la famille angevine.
La naissance du futur masque à Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines) le 5 ? mars 1626 et le choix du nom de  Marcilly .
Je me suis librement inspiré des auteurs anglais ou américains : Andrew  Lang The tragedy of valet, appendice, à lire sur Google Books  et The mystery of James de la Cloche , 1903 ) ,  Rupppert Furneaux,The mas behind the maskj, , London,Cassel &Company,1954 ; enfin de Paul Sonnino, The man in the iron mask, a historical detective story, Rowman &Littlefield, Maryland, 2016.  J’ai découvert dans ce dernier, p 29, l’existence du diplomate, ami de la Reine, du Prince de Condé et de Retz selon Retz (Pléiade, ancienne édition, voir index et en particulier p.853, ou nouvelle édition p. 658-659) Antoine Fouquet de Croissy de Marcilly, propriétaire de Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines). Là, à deux pas de la cour de Saint-Germain-en-Laye, donc sans éveiller les soupçons, avec l’aide de la sage-femme Madame Perronette , dont le nom nous est livré par Marcel  Pagnol (Le secret du masque de fer), la reine accoucha d’un garçon qui fut ondoyé (il est catholique de naissance, deviendra calviniste, puis redeviendra catholique). Il reçut le prénom de Jacques (en l’honneur des Stuart et du roi d’Angleterre) et le nom de Marcilly. En effet, les  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille)  recouvre certainement celui du château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-Loire), propriété des Fouquet et en particulier du parlementaire Antoine  Fouquet de Croisset , mort en 1665 en son château, qui portait aussi le nom de seigneur de Marcilly et avait par dévouement pour la reine prêté son logis isolé pour abriter la naissance du futur Masque de fer.
  En effet, le  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille) , où l’on sent un « accentnitalien », écrit Paul Sonnino, recouvre  certainement le château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-loire), propriété des Fouquet et en particulier de Fouquet de Croissy. Le cardinal Mazarin prononçait Marcilly à l’italienne avec un l mouillé, soit Marchille ou Marchelle qui fut noté Marchiel sur ordre de Louis XIV, la graphie ci notant le son ch.
Quant à l’autre forme Marchialy, non attestée directement, elle  figurait peut-être dans un registre mortuaire aujourd’hui perdu et reproduit par Topin en un fac-simile peu lisible, réimprimé ensuite par Funck- Brentano dans ses Légendes de la Bastille . Tandis que le  registre du Junca  et sa forme de Marchiel, eux,  existent toujours , pour Marchially ( masquant la graphie  Marcally) ,  qui n’est pas directement attesté, on peut penser que le i ou le  y final peu audible chez Mazarin a été  correctement restitué, le a étant l’ erreur d’un  copiste . On peut rapprocher le souvenir de la prononciation ancienne  Chailly pour Chilly, le château de Mazarin qui a pu influencer, soit le scribe, soit Mazarin lui-même.        Songeons aussi à la conjuration du protestant Roux de Marsilly,  l'année  même de l'arrestation du Masque.  Le marquis Louis Des Champs de Marcilly , interrogé au moment de l’arrestation de Roux , indique que le nom du protestant «  était seulement Roux. » Pourquoi Roux rajouta-t-il ce nom de Marcilly à son patronyme, alors qu’il se disait républicain ? Parce qu’il voulait que ce titre de courtoisie sonne comme une menace de découverte de l'existence d'un fils aîné d’Anne d’Autriche appelé Marcilly et de l’usurpation du roi, donc de l'illégitimité du monarque de droit divin.
Le prétexte nous est indiqué par Paul Sonnino qui , grâce à de savantes recherches généalogiques , nous apprend que son frère, p.91, avait exploité des bois près de Pithiviers, dans la forêt de Chilleurs , à Chilleurs -aux- Bois,  et à Chilleurs- Montigny,  dans le  Loiret , se référant à une ferme de Marcilly comprise dans les bois ou bien à Marcilly-en- Villette, près d’Orléans. En trout cas, il ne semble pas avoir jamais eu de propriété à Marcilly. 
L’enfance du futur Masque.
Le futur Masque ne pouvait rester à Croissy. Aussi le logea-t-on dans l’Indre-et-Loir près de Tours au château de Marcilly-Fouquet. Par la suite, -nous utiliserons l‘information de Voltaire selon laquelle Richelieu s‘est occupé de  l‘enfant , - Richelieu utilisa les châteaux de sa maîtresse, Madamen la marquise d’Effiat  de Cinq-Mars, aussi bien le château de Cinq-Mars(la- Pile en Indre-et-Loire près de Chinon) que le château de Chilly (aujourd’hui Chilly-Mazarin près de Palaiseau dans l’Essonne). Richelieu considérait comme sien, selon Philippe Erlanger (Le mignon du roi, p. 10), ce château qui était plus près de Paris .

L’enfance du futur Masque : le baron de San –Marzo au château de Cinq-Mars-la- Pile
 Nous le retrouvons peut-être dans ce mystérieux prétendu frère aîné du futur marquis de Cinq-Mars(’amant du roi Louis XIII , le comploteur décapité) . Celui-ci qui aurait été dépouillé de ses prérogatives d’aînesse au profit de son prétendu frère puîné, au motif qu’il n’était pas très brillant et qu’il était porté vers la religion,  devint le  baron de Cinq-Mars , écrit correctement Saint- Mars. Le titre de baron de San-Marzo, dont se vantera l’imposteur napolitain, lequel a confié avoir eu en main ses papiers du Masque de fer, titre  qui a déjoué les recherches jusqu’à maintenant, est selon moi un souvenir de Cinq-Mars,
Le complot de Cinq-Mars avait pour but de renverser Louis XIII, soit en l’empoisonnant (ce qui a réussi après l‘échec du complot), soit d’une autre manière, puis d’instaurer une Régence au profit d’Anne d’Autriche en attendant la majorité du futur Masque, et de confier à Cinq-Mars –le vrai les fonctions de Premier ministre. L’existence d’un hériter méconnu de la couronne est le grand secret de l’opposition sous Louis XIII et sous Louis XIV, des complots de Cinq-Mars comme du protestant  Roux et du prince de Condé.  
La période des études à Nîmes
 Mais la politique l’emporta et il fut confié à des amis protestants des Cinq-Mars, leur religion devant écarter de lui toute tentation de disputer la royauté à son frère. Il  fut alors envoyé à Effiat près de Riom où il fut confié à des  protestants, les Portal dont il prend le nom (il le reprendra en  Angleterre).  Il ne faut pas oublier que le marquis d’Effiat est originaire de cette bourgade  d’Effiat située en Auvergne et qu’il avait confié à l’architecte Lemercier le soin de concevoir un projet de ville gigantesque que l’homme de l’art réalisa en fait pour Richelieu près de Chinon, dans la ville appelée Richelieu.
Il est ensuite confié à un gentilhomme d’Auvergne, « vieux champion des précédentes guerres civiles » (P. de Vaissière, La conjuration de Cinq-Mars, p.43, 47 ssq, 72), Josué d’Hondredieu de Chavanhac  et à son fils François, ainsi qu’à  ses deux beaux-frères François de Calvisson et Agnès (prénom porté par un homme) de Calvisson de Saint-Auban.
Or, Calvisson, près de Nîmes, est le lieu de naissance du  chef de la conjuration protestante Roux, comme des Arnauld (à la ferme d’impôts desquels Roux participe) et des Mazel, tous protestants languedociens. Ce sont eux qui trahiront à la fois  Roux et le Masque : Louis XIV remerciera même Pierre Mazel pour son aide lors de l‘arrestation de Roux : « nous avons bien voulu lui commettre, écrit le roi, une affaire de la dernière importance et qui regardait  la sûreté de notre propre personne ».
Le futur  Masque est ainsi confié aux de Calvisson, et,  protestant dès lors, il vit  à Avignon,  un comté qui ne dépendait pas de Louis XIV,  avec des séjours à Calvisson et à la ville voisine de Nîmes pour des études inachevées à la faculté protestante de théologie : il lui restera des marques importantes de cette formation.
Ses protecteurs  sont arrêtés en terre papale, à Avignon,  par une violation du droit des gens , comme d’habitude,  comme  Roux le sera  en Suisse.
Le fils de Chavanhac et ses deux beaux-frères Calvisson de Saint- Auban  rôdaient autour de Tarascon, et ils étaient d’intelligence avec le beau-frère de de Thou, l’évêque de Toulon. Après que Roux eut rencontré le futur Masque à Nîmes ou à Calvisson, il ajouta de façon provocante Marcilly à son nom, tandis que notre Masque devint Veiras.  Le nom de Veiras, pseudonyme qu’il reprendra en Irlande et en Angleterre, est l’anagramme de Villiers (nom de son père Villiers de Buckingham) et de Marsilly. 
 Citons encore quelques noms qui sont destinés à réapparaître dans la vie de notre héros lorsqu’il prendra le nom de Jacques de Lacloche du Bourg de Jersays Penchons-nous  d’abord sur ce nom, pour nous ridicule, de Lacloche. Il a été choisi comme traduction de Bellings, le nom  de  son maître, qui est la traduction anglaise  de l"irlandais cloca, le signal de la messe catholique. 
Dubourg est une allusion à Anne d’Autriche qui était une Habsbourg, nom où Habs -,  feint d’être pris pour la préposition latine abs ou ab  désignant  la provenance, et est traduit par du.
Il faut reconnaître dans la baronnie  de San Marzo le nom du Masque,   élevé avec le futur marquis de Cinq-Mars, cher au coeur du futur masque comme Henri de Rohan ; le marquis de Cinq-Mars   sera exécuté pour complot contre la vie du roi, après avoir été  le favori et l’amant de la reine qui l’a abandonné pour sauver la vie de son fils adultérin auprès de Richelieu..
Le nom de Jersays n’a rien à voir avec l’île anglo-normande de Jersey , contrairement àce qu’a cru Msgr Barnes, ni même avec  Jersey dans l’Eure, commune d’ Illiers –l’Evêque,  mais renvoie  à un ami de Cinq-Mars, le protestant Massu de Jerzays. M. de Jersays (avec cette orthographe) était l’amant en titre de la fille de Sully,  dame de Rohan. La fille de celle-ci,  dite demoiselle de Rohan avant qu’elle n’épouse un Chabot et ne fonde la famille des Rohan- Chabot, fut la maîtresse du meilleur ami de Cinq-Mars, protestant au demeurant, savoir Henri Massu, marquis de Ruvigny . C’est ce nom de Ruvigny qui se cache sous la forme de ce mystérieux marquisat de  Juvigny, legs imaginaire à ses héritiers  du  pseudo -Jacques de la Cloche de Jersays de Rohan etc. On retrouve donc tous ces noms de  Jersays, Henri de   Rohan (le chef des calvinistes français),  Ruvigny,  dans la vie de Jacques de La Cloche, et cela confirme l’identité de l’aspirant catholique de La Cloche et du protestant Veiras.
  Le futur Masque  eut d’autres protecteurs ;outre  les Fouquet,  citons Gaston d’Orléans, son demi-frère Buckingham plus jeune que lui de deux ans,  le grand-duc de Toscane, le grand- prévôt de Franche- Comté Borrey , Galaup de Chasteuil,  «le Très Grand auteur » de la société secrète des alchimistes et empoisonneurs,  Vasconcelos, autre membre important de cette société,  qui l’introduisit auprès de Richard Bellings et du grand aumônier lord Stuart d’Aubigny grâce à la reine d’Angleterre qui était née de Bragance. Le futur Masque   fréquenta surtout les régions indépendantes de Louis XIV comme le Comtat Venaissin, le  Languedoc, Nice,  la Franche -Comté espagnole et francophone , la Savoie, la Moselle actuelle,  l’Irlande,   les Flandres,   la Suisse, le Luxembourg, la  Hollande(c’est à La Haye qu’ il rencontre le chef des calvinistes ,Henri de Rohan), l’Irlande. 
La conjuration du protestant  Roux
 Il  existait dans l'entourage de Roux un autre valet que ce Martin qui passionna A. Lang,   quelqu'un qui avait été valet en Angleterre (servant en anglais) et appelé Portal ou Portail , puis Veiras (Veiras , de veirs, est l’anagramme de Villiers [de Buckingham] et de Marsilly).
Le livre de Sonnino nous donne la meilleure biographie de Roux, p. 90 qq, grâce à ses savantes recherches généalogiques ; on y apprend , par exemple,  p.90,  (mariage du 21 octobre 1643 de Marie Chapuzeau , fille d’un juriste du conseil privé du roi, et de Jean Roux, l’exploitant forestier, de Chilleurs que Henri II de Bourbon, Prince de Condé, initialement calviniste,  et son beau-frère le duc de Longueville, sont témoins au mariage d’un parent de Roux, -ce qui montre les implications de son complot.
Portal, puis surtout Veiras, alias le Masque, à Londres avec la conjuration de Roux de Marcilly.
  Dans une note annexée à une lettre de Croissy, ambassadeur du roi de France, en date du 15 juin 1669, une semaine avant l’arrestation du Masque, Croissy écrit  qu'à l'annonce qui lui est faite de la capture de Roux, Veiras (le futur Masque) répond: " que cela ne pouvait être et qu'il en venait de recevoir une lettre qu'on croit être du 1er mai, par laquelle il mandait qu'il était suivi, mais qu'il leur taillerait encore bien de la besogne... » L’ambassadeur continue : « On est averti qu'il y a depuis six ou sept mois à Londres un nommé Veiras qui est de Languedoc, et de la R. P. R. (Religion Prétendue Réformée, calvinistes), lequel a de grandes habitudes avec le nommé Roux de Marsilly, en sorte que l'un ne faisait rien sans la participation de l'autre et étaient enfermés les nuits entières chiffrant conjointement ; ce Veiras se dit envoyé de ceux de la RPR de France, il est protégé par le comte d'Orreri qui a l 'habitude de l'employer en Irlande, à cause de la proposition que ledit Veiras lui a faite d'amener quantité de Français audit pays .Il fréquente souvent chez le duc de Buckingham  et milord Arlington et allait aussi chez l'ambassadeur d'Espagne."
  L'ambassadeur du roi de France à Londres écrit  encore: "m'étant enquis de ce Veiras dont je vous ai écrit, j'ai su de plusieurs endroits qu'il était le camarade (de Roux de) Marsilly, aussi méchant que lui, employé dans les mêmes affaires, dont il a une entière connaissance et les continue encore. Il est du même pays, était autrefois servant (valet, secrétaire,  de Bellings en Irlande ) sous le nom de Portal ) ;  depuis ,s'étant intrigué dans des cabales et ayant parlé contre le roi d'Angleterre et le gouvernement, il fut condamné à un bannissement perpétuel , nonobstant lequel il est revenu sous le nom de Veiras, s'est associé avec Roux, a reçu des lettres de ce scélérat pendant qu'il était en Suisse, a un chiffre avec lui, et depuis sa détention (celle de Roux) continue ces mêmes pratiques; il a vu souvent l'ambassadeur d'Espagne et on croit qu'il en a aussi tiré de l'argent.
 «  Le même homme  qui m'a donné cet avis [ l’acolyte jésuite que le Pape avait donné à Jacques de la Cloche, alias Veiras,  pour l’accompagner dans sa mission en Angleterre, mais dont il s’était débarrassé],  que je dois vous dire , Monsieur, avoir été ami dudit Veiras, avoir gardé ses papiers et ne s'être brouillé que sur des dettes [argent promis s’il le débarrassait de sa présence] et prétentions [d'être le roi légitime de France], m ' a dit que le voulant faire arrêter, et ayant su que le comte d'Orrery  le protégeait auprès du duc de Buckingham, il avait voulu en parler au duc, mais que l'un de ses domestiques [de Buckingham], qui est de ses amis, lui avait dit de n'en rien faire, que Veiras était fort bien avec ledit duc [son demi- frère] , et que lorsqu'il ordonne à ses gens de dire à ceux qui le viennent voir qu'il n'y est pas, il en exceptait toujours celui- là avec lequel il était quelquefois des heures enfermé [précaution pour éviter que sa ressemblance avec le roi de France et avec le duc ne puisse être remarquée]; ce donneur d'avis  s'est même offert de faire arrêter ce Veiras sous le prétexte de son premier bannissement et dit qu'il a un témoin qui est le secrétaire d'un évêque qui lui soutiendra ce qu'il a dit , encore depuis peu ,  de la personne du roi d'Angleterre et de son gouvernement". De Lionne lui répond : "le roi ne veut pas non plus que vous fassiez aucune instance au roi d’Angleterre, de quelque nature qu'elle soit,  sur le sujet de Veiras; abandonnant cet homme à sa mauvaise conduite dont Dieu pourra fournir quelque jour les moyens de ne pas la laisser impunie".Bel exemple de feinte clémence chez un roi qui ne nous y a guère habitués.
  Jacques de Lacloche, lorsqu’il prendra ce pseudonyme, donnera une version édulcorée de son bannissement par le roi en forgeant une  lettre censée
prêtée à Jacques II en date du  8 août 1668 où il évoque l’interception de ses courriers et ses conséquences : « nous fûmes obligés […] de consentir, aux occasions, à plusieurs choses  tournant au désavantage de plusieurs catholiques de notre royaume d’Hybernie (l’Irlande) », savoir son bannissement. 
  Dans un autre rapport, on lit :"Le papier ci- joint  qui contient un projet de requête des religionnaires (protestants) de France  au Roy de la Grande-Bretagne a été pris audit Veiras, et est écrit, à ce qu'on assure, de sa main, que Roux de Marsilly reconnaîtra". Il serait intéressant de pouvoir comparer l'écriture et les idées avec celles des textes de Jacques Stuart de Lacloche.  Le Ministre de Lionne écrivit aussi à son ambassadeur : "Roux ayant fait savoir au roi qu'il désirait la grâce  de lui pouvoir parler pour lui révéler des choses qu'il ne pouvait confier qu'à sa seule personne, Sa Majesté n'a pas voulu le voir et m'a envoyé à la Bastille" à deux reprises ; voulait-il lui révéler l'identité et les prétentions du demi- frère du roi, le trahissant et  révélant  au roi de France qu‘il avait pris l‘identité de Veiras? Le roi d’Angleterre n’avait- il plus, dès lors,  qu’à indiquer à Louis XIV la date de son arrivée à Calais  et sa fausse identité de «  Matteo Battaglia, valet du roi  et musicien »? Que signifient d'autre part les paroles « effroyables » qu'il prononce contre le roi sur la roue et comment Louis XIV peut- il dire : "M. le lieutenant criminel, nous voilà débarrassés d'un bien méchant homme" ? 
Les trois  pseudonymes Henri Cromwell ( nom du  fils puîné du fondateur de la république anglaise et du responsable de la décapitation du roi)  porté par le futur Masque en Irlande, alias qui disparaît mystérieusement après 1659 ou plutôt auquel succède ,  toujours en Irlande, celui de Portal: la rumeur rapportée par son futur geôlier Saint- Mars parle , à propos du Masque de fer, d’un fils de Cromwell , l’aîné , Richard) et Henri de Rohan annoncent la couleur car ce dernier  ,”à nous très connu et intime”,  écrit Jacques de Lacloche en signant du roi d’Angleterre, était le chef des calvinistes.  Curieux choix de pseudo pour un nouveau converti au catholicisme.
Le pseudonyme de Borrey, grand- prévôt de la Franche- Comté espagnole, ami de Roux et l’accompagnant en Suisse, est mal relevé  et transcrit par erreur Bovere (un Bover a été le transcripteur, semble-t-il, de là l’erreur) dans l ‘état- civil du comparse de Jacques de Lacloche, celui qui lui a volé des papiers.
De qui ce  Portal  fut-il le servant, le valet, disons plutôt  le secrétaire particulier, l'homme de confiance? Du noble  Irlandais Richard Bellings (né à Dublin 1600? -1677), catholique, secrétaire de la Confédération irlandaise en 1642,  secrétaire particulier de la reine- mère Henriette-Marie à Somerset House  (de qui Bellings tint  son secrétaire Portal) et messager secret de Jacques II, envoyé , fin 1962,  par le roi d'Angleterre à Rome  avec Portal,  pour négocier l'accession au cardinalat de lord d'Aubigny ainsi que la conversion secrète, en prime en quelque sorte, du roi au catholicisme, si le chapeau de cardinal était accordé à son parent. C'est à Richard Bellings, pour qui il éprouva une grande admiration, que le Masque  dut sa conversion au catholicisme. Quelles furent les deux causes de la condamnation de Portal au bannissement perpétuel?
Première cause du bannissement du futur Masque : des vues trop hardies sur la liberté de conscience.
 Notre secrétaire rédige des lettres au pape et il les signe du nom de Jacques II : surtout, il va trop loin dans ce qu'il fait écrire au chef de l'Eglise anglicane, même en latin.
"(Le roi) déclare qu’il déteste le déplorable schisme et l'enseignement hérétique introduit par Luther, Zwingli, Calvin, Menon [fondateur des Menonites aux Pays-Bas], Socinius pour Sodinius, Brown [Robert Brown , fondateur du Congrégationnisme], et autres maudites créatures de cette sorte, car il sait d'amère expérience, et mieux que personne dans ses trois royaumes de Grande-Bretagne, d'Ecosse et d'Irlande, quels puissants démons ont été introduits par la soi-disant Réformation, qui mériterait d'être appelée la Déformation. Car cela a jeté bas tout gouvernement établi et a introduit une confusion digne de la tour de Babel à la fois dans l'Eglise et dans l'Etat". « Remarquable déclaration de foi », constate sereinement le catholique Msgr. Barnes, p.155, 1908, à comparer avec les déclarations signées de Jacques de La Cloche (lettre du  7 septembre 1668) : « la religion protestante, à laquelle nous faisons semblant d‘être attaché plus que jamais, quoique devant dieu qui connaît les cœurs nous l‘abhorrions comme très fausse et pernicieuse… » Suivent 24 notes très hardies, annonciatrices de la constitution civile du clergé sous la Révolution française, en faveur d'une Réunion concordataire de la papauté et de l'Angleterre, Barnes,   P. 155-156, et  Laloy, Enigmes du grand siècle, 1913, p, 17 : "Les archevêques et évêques en fonction qui donneraient leur adhésion à ce concordat devraient être confirmés par trois légats apostoliques nommés pour cela uniquement. L'archevêque de Cantorbéry  deviendrait le patriarche des trois royaumes et le chef de l'administration ecclésiastique, sauf dans certaines matières réservées à un légat ad hoc, qui devrait être de nationalité anglaise et résider en Angleterre. Le reste du gouvernement de l'Eglise serait dirigé par des synodes diocésains annuels et par un concile national se réunissant à des dates fixes. Le roi nommerait les évêques et les biens de l'Eglise confisqués seraient maintenus à leurs possesseurs actuels. Les prêtres mariés conserveraient leur femme, mais ceux qui seraient ordonnés par la suite observeraient le célibat. La messe serait célébrée en latin, mais accompagnée de cantiques en anglais, et l'Eucharistie serait donnée sous les deux espèces à ceux qui le souhaiteraient. La liberté de conscience serait accordée à tous, ni Charles ni ses successeurs ne pourraient être obligés de traiter cruellement les Protestants Quelques congrégations seraient autorisées, même les jésuites dans l’enseignement, ainsi que d'autres pour les soins hospitaliers.".
  Seconde cause du bannissement : les menaces contre le Pape
Bellings et le futur Masque ont rendu visite au cardinal de Retz à Paris sur la route de Rome.  Notre Masque,  sous le pseudonyme de Retz, va à Hambourg,  d’ où il menace le Pape d'expédier une flotte de vingt navires devant Civita-  Vecchia s'il n'obtempère pas à la demande de cardinalat pour lord d’Aubigny.
  Après sa condamnation au bannissement, Portal change de pseudonyme et  devient le protestant Veiras , anagramme de Villiers (de Buckingham) et de Marcilly, et entre dans la conjuration de Roux pour prendre le pouvoir en France. Il joue là un jeu difficile : en 1669, il est à la fois le catholique faux abbé Pregiani auprès du roi Louis XIV et le protestant Veiras auprès de Roux,très républicain.
Il nous reste à étudier deux épisodes importants de sa vie : l’épisode romain et l’épisode anglais.
I L’épisode romain : Jacques de la Coche.
La conversion à Rome au catholicisme : le novice jésuite répondant au pseudonyme de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay.                 
 Le futur masque   n’avait pas de certificat de  baptême et ne pouvait aucunement prouver son identité. Il lui en fallait un s’il voulait devenir novice. Qu’à cela ne tienne ! Il rédige en latin  un faux certificat qu’il signe de  l’ex-reine Christine de Suède, convertie au catholicisme et vivant à  Hambourg :
 « Jacques Stuart, incognito sous le nom de De la Cloche du Bourg, naquit dans l’île de Jersey (sic !) et il est le fils naturel de Jacques II,  roi d’Angleterre. Sa Majesté britannique nous a reconnu en privé qu’il était bien tel. Il fut élevé dans la secte calviniste, mais il l’a aujourd’hui quittée pour se joindre à la Sainte Eglise Romaine à Hambourg le 29 juillet 1667. Nous avons trouvé bon de confirmer et d’attester ceci de notre main, même si cela n’est pas dans nos habitudes, afin que dans sa situation extraordinaire il puisse être capable d’ouvrir son cœur à son directeur en confession et de chercher conseil pour le salut de son âme.
(Cachet) Christina Alexandra »
Il se garde bien de nous indiquer ses parrain et marraine. Il choisit aussi  le nom sous lequel il prétend s’être fait baptiser,  Jacques de Lacloche du Bourg de Jerzais,  en souvenir de l‘ami  protestant de Cinq-Mars . Pourtant, rappelons-le, notre Jacques de Lacloche de Jersay n’a aucune ascendance dans l’île anglo-normande de Jersey , il le reconnaît lui- même dans la lettre prêtée à Jacques II du 7 septembre 1668 : « Votre Révérendissime Paternité fera courir le bruit qu’il (Jacques de Lacloche) est allé à Jersé ou Hanton (le port de Southampton) voir sa mère prétendue qui se veut faire catholique, comme nous avons mis et dissimulé (cherché à faire croire) dans cette autre lettre »[lettre du 3 août et surtout du 29 août 1668: « nous lui avons ordonné d‘aller à Jersé et à Hanton (le port de Southampton) , …qu‘il feigne  à Votre Révérence qu‘il est fils d‘un riche prédicant, lequel étant mort depuis quelque temps , sa mère mue de quelque envie de se faire catholique et de lui donner le bien qui lui appartient, lui a écrit et qu‘ainsi Votre Révérendissime paternité, désireuse du salut de cette personne et de la faire catholique, voyant aussi qu’il peut avoir son bien, lui permettra facilement d’aller (en Angleterre) ».]
Un problème compliqué : les trois personnes impliquées dans le voyage sur Paris e t les deux abbés Prégiani, le vrai et le faux. .
 Le pape avait exigé la présence d’un autre novice francophone, dont nous savons seulement qu’il était languedocien, aux côtés de Jacques de la Cloche, ce qui ne pouvait plaire à ce dernier.  Il réussit à s’en débarrasser en lui promettant  peut-être de l’argent ; mais celui-ci le rejoindra en Angleterre et c’est lui qui le livrera.
   Toutefois, Jacques de la Cloche à Naples rencontra un autre français, qui avait peu de scrupules et lui vola son identité. Cet escroc  s’éprit de la fille de sa logeuse à Naples.  Malheureusement pour lui, il mourut quelques mois après le mariage,  le  7 septembre 1669  et on l’a pris pour Jacques de la Cloche.
Il nous faut réfuter la thèse généralement adoptée aujourd'hui qui  fait mourir Jacques de La Cloche lui-même  à Naples le 7 septembre 1669 .Il s’agit manifestement , non de Jacques de la Cloche, mais de l’escroc qui lui a volé son identité. De même l’abbé Prigiani auquel Jacques de la Cloche empruntera son nom survivra à l’arrestation du faux Prégiani, le Masque de fer. Primi Visconti , dans ses Mémoires,  le signale à Rome  où il meurt en 1779, de syphilis. Mais ce n’est pas le Masque de fer.
Le départ de Rome pour l’Angleterre ou exit Jacques de La Cloche et l’apparition du faux  abbé Prégiani.
Ainsi, notre ancien membre de la Religion Prétendue Réformée, Portal, puis Veiras, s’était converti au catholicisme et il était même devenu novice à Rome chez les jésuites,  sous le nom de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay. Il forge diverses lettres qu'il signe de Jacques II,  roi d'Angleterre ,dont des actes de reconnaissance du roi Jacques II comme étant son fils naturel, puis se fait rappeler à Londres par une fausse lettre de celui-ci au général des jésuites .Une autre lettre du roi ( en réalité de notre Jacques lui-même), d'une naïveté touchante , témoigne de l'ennui que cause au roi  pour son fils bien- aimé cette obligation faite aux jésuites de voyager accompagné par un acolyte , règle dont le roi  demande , en vain, l'exemption au général des jésuites . Le roi (entendons Jacques de Lacloche) interdit à son prétendu fils de le rejoindre en Angleterre avec un jésuite italien : même si c’est un Français, celui-ci ne devra pas l’accompagner en Angleterre. C’est ce que le général des jésuites acceptera  en partie en donnant au  futur faux abbé Prégiani un acolyte  francophone, dont jacquyes de la Cloche se débarrasser avant d’atteindre Naples, mais qui le rejoindra en Angleterre et le trahira.     Au lieu de se rendre à Libourne  pour gagner Paris et Londres, ils prennent tous deux la direction inverse et arrivent à Naples, patrie du vrai abbé Prigiani (un  agent du grand-duc de Toscane et affidé de  la société secrète  des alchimistes). A  Naples résidait  un abbé  de San Aniello , faisant partie    des chanoines réguliers de Saint-Sauveur  , et Jacques de La Cloche se fait confesser par lui : "Jacques poursuivit avec une grande fréquence et ferveur ses exercices de religion... Il ne donna sur lui - même à ce confesseur que des renseignements équivoques et obscurs, disant que son père était un grand seigneur anglais (le duc de Buckingham, protestant)  et que sa mère, également de grande maison, professait la vraie foi de l’Eglise  romaine (l'espagnole et catholique Anne d’Autriche) ; il avait lui- même abjuré l'hérésie et s'était converti, éclairé par d'excellents religieux (Bellings)."  
  Tandis qu'il se livre à ses exercices religieux,l’ escroc qui lui avait volé son identité tombe amoureux de la logeuse d'une l'auberge et, la mariée attendant un héritier,  il doit se marier d'urgence le 10 février 1669, sous le nom ronflant de dom Jacobus Henricus de Boveri (Borrei, le prévôt de Franche-Comté) Roano (Henri de Rohan),  anglicani (calviniste) et  baron de San Marzo .   Dans son testament, sur son lit se mort, il fait des dons fastueux, engageant un marquisat imaginaire de Juvignis, valant 300 000 doublons et plus : selon nous, c’est l’altération du nom du  marquis de Ruvigny, le protestant qui était l’ami de Cinq-Mars et l’amant de Mademoiselle  de Rohan.
  Avant la célébration du mariage,   Jacques  de Lacloche  , sous le nom de Jacques Stuart, le quitte en lui laissant une partie des doublons remis par le général des jésuites, trop heureux de se retrouver libre et seul.  On remarque que son acolyte en parle comme d’un chevalier appartenant à l’Ordre de Malte. Or, le «Très Grand  Auteur » de la société secrète des alchimistes,  François Galaup de Chasteuil, se faisait appeler” le chevalier”  et,  en 1644, il était devenu chevalier de l'ordre de Malte, car il avait rendu à l'ordre des services signalés : le grand- maître en personne, Lascaris, avait attaché sur sa poitrine la croix d'honneur.  Jacques de Lacloche se rend à Paris en passant justement par le château italien appartenant à Galaup de Chasteuil, le château de Verceil, où il reçoit argent et  mission.
  Il  rend aussi, probablement, visite au grand-duc de Toscane  qui lui confirme sa mission et rend visite à Henriette d’Angleterre,  puis arrive à Londres où il rencontre Jacques II.
  Que prétendait faire le frère aîné de Louis XIV en soutenant le complot de Roux  de Marcilly d’une part et d’autre part en jouant le convertisseur au catholicisme de Jacques II,   lui l’ancien calviniste? Pourquoi ce plan, fou en apparence,  l’amenant à se dire le fils naturel de Jacques II, ce qu’il savait être faux?
  Il voulait , d’une part, en ramenant le royaume d’Angleterre dans le sein de l’Eglise , faire ce que réussit à sa place Dom John Hudletone qui donna l’extrême onction catholique à Jacques II, le convertissant in extremis le 5 février 1685.
Mais, pour cela, il fallait que le  futur Masque puisse approcher le roi sans donner de soupçon à la cour que « le papisme et les sabots », voire les jésuites , rôdaient : tel est  le but du stratagème du faux abbé soi-disant théatin (donc non- jésuite) Prégiani approchant le roi sous couleur d’astrologie et d’expériences de chimie et celui de l’invention d’un fils naturel du roi.
  Ignorant des difficultés que la papauté lui opposerait nécessairement puisqu’on ne peut être catholique en secret ni ordonné prêtre sans attester de son identité, naïf en somme, il écrit sous la signature de son père supposé Jacques II (lettre du 3 avril 1668) : 
« il y a longtemps que nous prions Dieu de nous faire naître l’occasion de pouvoir trouver une seule personne dans nos royaumes de qui nous puissions nous fier touchant l’affaire de notre salut sans donner ombrage à notre cour que nous fussions catholique.  La providence de Dieu a pourvu et secondé nos désirs, nous faisant naître ( !) à la religion catholique un fils auquel seul nous pouvons nous fier dans une affaire si délicate. Il sera toujours assez capable pour nous administrer en secret les sacrements de la confession et de la communion (la conversion au catholicisme) que nous désirons recevoir au plus tôt. »
Le faux Jacques II continue : « Si notre cher et bien aimé fils n’est prêtre , et s’il ne peut pas l’être sans faire savoir publiquement son véritable nom et sa naissance [autre que Jacques de La Cloche ], ou pour autres circonstances (ce que nous disons pour ne savoir pas votre manière d’agir en ces rencontres) . En ce cas, qu’il ne se fasse plutôt point prêtre à Rome que de rien dire aux évêques ou prêtres qui il est, mais  qu’il passe par Paris… Le roi et Henriette d’Angleterre trouveront et auront le pouvoir de le faire prêtre, sans que l’on sache qui il est et avec tout le secret possible, comme nous nous persuadons. Si ce n’est que, sans tant de détours, il aime mieux venir à nous sans être prêtre, ce qui sera peut- être le mieux, puisque nous pourrons faire la même chose par le moyen de la reine notre honorée mère ou de la reine régente qui pourront avoir à leur volonté évêques, missionnaires ou autres, pour faire la fonction, sans que l’on sache et s’aperçoive de quoi que ce soit. »
A noter le lapsus calami freudien révélateur: au lieu de la reine régnante (il s’agit de la femme du roi d‘Angleterre, lettre du 3 août 1668), le futur masque écrit la reine régente. Il récidive dans sa lettre du 29 août, tant l’idée de sa propre régence  lui tient à cœur.
Sur le même point (lettre du 29 août 1668) : « S’il y a quelque chose que l’évêque ordinaire (de Londres) ne puisse pas faire sans permission de  Sa Sainteté, que (Jacques de La Cloche) ne manque pas de  pourvoir très secrètement (à son ordination), en telle sorte qu’on ne vienne point à savoir qui il est ; ce qu’il fera,  s’il peut, auparavant que de partir de Rome. »   Le 4 août, il semble se résigner volontiers à ne pas devenir prêtre, prétextant que ses forces et sa constitution sont trop faibles Et puis « On peut être bon catholique sans être religieux.» Passez muscade ! Bref, il y avait trop de difficultés pour être ordonné, si bien que l’invention d’un abbé alchimiste et astrologue se révèle indispensable. Exit Jacques de La Cloche!
2 L’épisode anglais et  le faux abbé Prégiani, agent de Louis XIV ( !) destiné à convertir secrètement le roi d’Angleterre au catholicisme.
Nous employons l'orthographe Prégiani, distinction très relative, mais commode,  pour différencier le faux  abbé du vrai dont nous orthographions le patronyme  Prigiani, abbé napolitain qui a survécu à l'arrestation du Masque, et qui mourut à Naples - ce qui a amené à tort Barnes et Laloy à revoir leur copie lorsqu'ils ont été persuadés que l'abbé Pregiani et le Masque de fer ne pouvaient être le même homme. C'est ce faux abbé Pregiani qui, sous le nom de Matteo Battaglia, valet (servant) du roi, sera arrêté par le major de Vauroy aux alentours de Dunkerque deux jours après le départ signalé de notre abbé pour l'Italie  en passant par Paris.
 Le signe qu'il s'agit bien de notre homme nous est donné par Jacques II dans une lettre chiffrée   en anglais, du 20 janvier 1669, à sa soeur  Madame Henriette d’Angleterre, duchesse d’Orléans.  Louis XIV détruira cet  échange de correspondance après la date du 24 juin 1669, nous privant, bien entendu,  de ce qui concerne le secret du Masque de fer . Il reste la lettre de Jacques II à sa sœur Henriette : "j'en étais arrivé ici de ma  lettre, quand je reçus la vôtre par l'Italien dont vous ne connaissez pas le nom ni la qualité ( !), et il me la remit dans un passage où il faisait si noir que je ne reconnaîtrais pas sa figure si je le voyais de nouveau (ceci se passe au palais de Whitehall!) Cet homme réussira sans doute (ironie) puisque sa recommandation (il n’en aucune puisque Henriette ne connaît, écrit-elle, ni son nom ni sa qualité) et sa réception (dans le noir) s’harmonisent si bien. » Le roi est aussi prudent que sa soeur : ils ne  veulent pas avoir aperçu la ressemblance criante entre le messager italien et Louis XIV.
  Le même tabou d’évitement se retrouve dans le comportement de Louis XIV vis- vis du faux abbé,  tel que son ministre  de Lionne en fait part à son ambassadeur à Londres le 13 février 1669 :"Sa Majesté  défend  (à l'abbé) de rien écrire ici, tant qu'il sera en Angleterre, non pas même à moi, Sa Majesté ne voulant rien connaître que par votre seul canal, comme il est juste; et que par conséquent, quelque chose qu'on lui pût dire dont on lui demandât le secret à votre égard, il doit vous le dire tout; et que s'il manquait à cela, et qu'il le fît passer ici sans votre participation, Sa Majesté, quelque avantageuse que lui pût être la chose, lui enverrait aussitôt ordre de s'en revenir".
Les trois missions secrètes  de l'abbé sont fort embrouillées :
1)La seule dont l'ambassadeur ait connaissance consiste dans la négociation du traité secret de Douvres par lequel la France, catholique  s'unit à la protestante Angleterre contre la protestante Hollande, avec en plus   un salaire versé secrètement au roi d'Angleterre. Sont au courant seulement le roi de France, l'ambassadeur à Londres, le ministre de Lionne , le roi d'Angleterre et sa soeur Henriette , puis,  rapidement,  par les indiscrétions de l'ambassadeur, l'abbé et son demi-frère le ministre protestant Buckingham.
  2) Mais  ce n'est là que l'aspect le plus clair de sa mission : pour doubler l'ambassadeur dont c'est pourtant la fonction, le roi de France a consenti  à  envoyer, sur la demande de Jacques II ,  un abbé en apparence astrologue et chimiste sous le prétexte de la première mission, mais en réalité destiné à enseigner secrètement à Jacques II les éléments du catholicisme pour le préparer à sa conversion.  Seuls Jacques II, sa soeur Henriette et l'abbé sont au courant de son désir secret de se convertir : c’est ce que Charles appelle le "grand secret" dont Msgr Barnes raconte très bien les détails. On trouvera , après la mort de Jacques II, dans sa poche,  avec des reliques  liées également à quelqu'un  qu'il a trahi (l’abbé), des papiers de controverse religieuse rédigés par l'abbé en français (Barnes, op. cit, . p.262), le texte français se trouvant dans les archives du Vatican, et une autre version existant,  traduite en anglais, -tout ceci  montrant que l'abbé (précédemment le séminariste jésuite Jacques de La Cloche) s'est bien acquitté de la mission voulue par Jacques II, mission dont Louis XIV se souciait  comme d'une guigne et qu'il ne lui avait aucunement confiée, puisqu'il ignorait le désir de Jacques II de passer au catholicisme secrètement .  Le roi d’Angleterre préfèrera trahir l'abbé plutôt que celui qui le stipendie, le roi de France,  et lui indiquera la date où l'abbé quitte l'Angleterre et sous quelle identité (celle du  valet Battaglia).
3) Mais la mission la plus secrète et la plus invraisemblable,c’est celle que Louis IV  confia, non sans  hésitation ,  au faux abbé Pregiani, peut-être sur l’imprudente  demande de ce dernier  auprès de  la seule intermédiaire que le roi acceptait, Henriette d’Angleterre : cette mission  consistait à donner au roi de France des informations sur l'homme qui se faisait passer pour l'héritier légitime de la couronne de France,  Veiras, l’homme qui était le fer de lance et l'arme secrète de la conjuration de Roux de Marsilly, -cet homme  qui n'était autre que lui-même ! 
 Pourtant, Louis XIV, méfiant, n’accepte, ni  de  rencontrer l’abbé,  ni  de recevoir de missive de sa part. Lorsque,  plus tard , le roi de France voudra s'enquérir auprès de Fouquet  si Eustache Dauger, emprisonné avec lui et lui servant de valet, c’est-à-dire l’abbé Prigiani , avait révélé devant l'autre valet de Fouquet, Larivière,  "ce  à quoi il avait été employé (par le roi Louis XIV-le passif impersonnel est révélateur!) avant son arrestation" ,  ce n'est que de la 3e mission qu"il s'agit, celle qui révèle l'inquiétude du roi sur l’identité du  prétendant. Et ceci démontre bien que Fouquet savait tout avant son incarcération à Pignerol en 1661. De même, lorsque Jacques II écrit à sa soeur le 7 mars 1669 : "J'ai constaté que l'abbé Pregnani avait beaucoup d'esprit, mais vous pouvez être sûre que je n'entrerai pas en liaison avec lui plus qu'il ne convient aux renseignements que vous m'en avez donnés" "Your character" signifie, non pas comme Laloy le traduit, p.74," à votre caractère", mais : à la description de l'individu).
  Richard Bellings est l'homme -clé qui a mis  en relation notre futur Masque et Jacques II : c’est Bellings qui  est intervenu à deux reprises comme représentant personnel secret de Jacques II , une première fois vis- vis du Saint-Siège pour négocier le chapeau de cardinal de lord d’Aubigny d'abord, puis une  seconde fois  vis- vis de Henriette d’Angleterre. Malgré le fait que le futur Masque  ait été trop loin la première fois et que,  condamné au bannissement, il ait dû changer de  pseudonyme, il est resté dans les meilleurs termes avec son maître.
 La lettre du 8 août 1668 (citée par Msgr  Barnes, op. cit., p.305 et 306) et fabriquée par Jacques de Lacloche annonce le plan qu'il mettra en oeuvre sous le pseudonyme  du faux abbé Pregiani : approcher Charles pour lui expliquer la supériorité du catholicisme sans donner de soupçons aux protestants, sous le prétexte qu'il serait son fils naturel, avant même  que le roi n’ait  songé au paravent de l'astrologie et des expériences de chimie, dès lors qu'il aura obtenu pour le souverain le privilège d'être catholique dans son for intérieur tout en demeurant provisoirement le chef de l'Eglise anglicane :"Quoiqu'il y ait eu ici (à Londres) une multitude de prêtres, tant au service de la reine dont une partie a habité dans nos palais de Saint- James et de Sommerset  -House, que dispersés dans toute notre ville de Londres, toutefois nous ne pouvons nous servir d'aucun, pour l'ombrage que nous pourrions donner à notre cour par la conversation de telles gens qui, sous quelques déguisements d'habits qu'ils puissent avoir, sont aussitôt reconnus pour ce qu'ils sont... Comme il (Jacques de La Cloche ) n'est ici connu en aucune façon, ...nous pouvons en toute sûreté converser avec lui et exercer en secret les mystères de la religion catholique, sans donner ombrage à qui que ce soit de notre cour que nous soyons catholique, ce que nous ne pouvons faire avec aucun missionneur ( anglicisme pour prêtre de paroisse), tant aussi pour la confiance que nous avons de lui ouvrir notre conscience avec toute liberté et sincérité, comme à une partie de nous-même ...Dieu s'en veut servir pour notre salut".
  La pierre d’achoppement, ce sera son identité sulfureuse et son soutien au protestant Roux de Marsilly, poussant le roi d’Angleterre à dénoncer son ami à celui qui le rémunère chaque mois : Louis XIV.


   
















 L’opposition à Louis XIV, ou  Voltaire avait- il raison à propos de l'Homme au Masque de Fer? Réexamen de mon blog précédent à la lumière du livre récent de Marc Sonnino, The search for the man in the iron mask, a historical detective story.

  C'est Voltaire qui a créé le mythe du Masque de Fer en 1751 dans Le Siècle de Louis XIV et, comme la question avait piqué sa curiosité, il continua à s'interroger toute sa vie à ce sujet : dans le Dictionnaire philosophique, à l'article Anecdotes, en 1764, il discute  diverses hypothèses sur son identité ;  enfin dans ses Questions sur l'Encyclopédie, 2e édition (1771), il révèle qu'il s'agissait, non d'un jumeau, mais d'un frère aîné de Louis XIV  qui était le fils de la reine Anne d'Autriche (espagnole malgré son nom), l’épouse de Louis XIII,  et du duc George Villiers de Buckingham , fils légitime en quelque sorte (is est pater quem nuptiae denuntiant) , né en 1626 , ce qui expliquait à la fois sa ressemblance criante avec Louis XIV et le danger d'une contestation de la légitimité de ce dernier en vertu du droit d'aînesse et en vertu du fait qu'il était né dans les liens du mariage, -surtout si l'on pouvait de surcroît accuser Louis XIV de ne pas être le fils de Louis XIII, mais de quelqu'un de beaucoup plus basse extraction que le duc de Buckingham, comme le duc de Bellegarde.. L ‘assassinat de Buckingham par Felton devrait beaucoup à Louis XIV, a fait observer Dufet de l’Yonne, entendons qu’il a été inspiré par lui. Seul Jean Baptiste Regnault- Warin, dans  L’homme au masque de fer, Paris, 1804,4 vol., reprit sous forme romanesque la thèse de Voltaire ; Dumas et les romantiques reprirent l’idée du jumeau.

   De qui Voltaire, sous le sceau du secret, tenait-il ses informations? De Madame de Saint-Quentin, la maîtresse du marquis de Barbezieux, fils de Louvois, qui avait succédé à son père comme Ministre de la Guerre, l'un des derniers à connaître le secret puisqu'il gérait le sort du prisonnier.  En 1782, le marquis de Luchet, dans le Journal des Gens du monde (tome IV, n°23, page 282 et suiv.) “fit honneur à Buckingham de la paternité en litige. Il cita en témoignage une demoiselle de Saint-Quentin, ancienne maîtresse du ministre Barbezieux, morte à Chartres vers le milieu du dix-huitième siècle : selon elle, Louis XIV avait condamné son frère aîné à une détention perpétuelle, et  la parfaite ressemblance des deux frères avait nécessité l’intervention d’un  masque pour le prisonnier” .
 Selon le bibliophile Jacob, la première œuvre, anonyme,  en 1745, à parler du prisonnier, les Mémoires de Perse, serait de Voltaire qui s’était engagé auprès de son informatrice à ne jamais parler du Masque  et qui s’est ainsi donné un prétexte  pour pouvoir ensuite en parler sous sa signature, la chose étant dès lors  révélée.
 Soulignons  qu'aujourd'hui encore ce texte de Voltaire est censuré, par exemple dans les Oeuvres historiques de Voltaire publiées par René Pomeau dans la Pléiade, p. 1714, on lit le mensonge par omission :"Voltaire a noté dans ses Notebooks (p. 124) que le mystérieux prisonnier était "soupçonné d'être un frère aîné de Louis XIV", sans la mention de Buckingham, son père.
  En 1790, Charpentier, président d'une commission révolutionnaire destinée à inventorier les archives , reprend la même tradition dans La Bastille Dévoilée avant que la piste politiquement correcte de Mattioli ne devienne la vérité officielle.
   La Reine a-t-elle eu des rapports féconds avec cet homme qu'elle aimait?Le cardinal de Retz  nous répond dans ses Mémoires : Madame de Chevreuse avait confié à son ami le Cardinal à propos de la reine  "que le seul homme qu'elle avait aimé avec passion avait été le duc de Buckingham; qu'elle lui avait donné rendez-vous, une nuit, dans le petit jardin du Louvre ; que Mme de Chevreuse, qui était seule avec elle, s'étant un peu éloignée, elle entendit du bruit comme de deux personnes qui se blutaient [le texte porte se lutter par méconnaissance du vieux mot bluter, remuer le tamis, donner la saccade,  qu'on trouve chez Rabelais au sens de faire l'amour]; que s'étant rapprochée de la Reine, elle la trouva fort émue, et M. de Buckingham à genoux devant elle; que la Reine, qui s'était contentée, ce soir, de lui dire, en remontant dans son appartement, que tous les hommes étaient brutaux et insolents, lui avait commandé, le lendemain au matin, de demander à M. de Buckingham s’il était bien assuré qu'elle ne fût pas en danger d'être grosse ". Au lieu du Louvre, d’autres historiens situent la scène dans un jardin  d’ Amiens, entre le 7  et le16 juin 1725. Mais Buckingham n’était pas homme à prendre de telles  précautions. A côté de   ces indiscrétions rapportées par le Cardinal, mettons les paroles du Régent qui déclara que c'était un fils d'Anne d'Autriche.
  Mais quels sont les textes que Voltaire a pu connaître?
  D'abord, celui de René, Auguste, Constantin de Renneville dans L'inquisition française, ou l'histoire de la Bastille, par Mr. C. de R., Amsterdam- Leyde, 1724, 4 vol., avec un Supplément à l'histoire de l'inquisition française, 438 p. Il fut prisonnier à la Bastille de 1702 à 1713, et y  occupait une pièce juste sous celle du Masque de fer avec qui il tenta de communiquer en frappant au plafond  : il apprit de lui qu'il était un "abbé italien", mais  celui-ci  refusa de lui dire son nom (p. 122, édition 1715, références données par Monsignor A. S. Barnes, The man  of the mask, 1908).Selon nous, il s'agit bien du pseudo -abbé Pregiani, avatar napolitain de Jacques Stuart de La Cloche du Bourg de Jersais : donc du  Masque de fer.
La Princesse palatine, belle- sœur de Louis XIV, nous parle de lui dès 1711 en disant  qu'il communiait masqué, qu'il était très dévot et lisait continuellement, et elle ajoute plus tard n'avoir rien pu apprendre à son sujet, sinon qu'il s'agissait d’ « un milord anglais qui avait été mêlé à l'affaire du duc de Berwick contre le roi Guillaume. ".
  Le milord anglais fait allusion aussi à l’abbé Pregiani. Quant au duc de Berwick, c’était un fils naturel de Jacques II vivant à l'époque où la Palatine écrivit ces mots.  Ce peut être une allusion au fait que l’abbé Pregiani se soit présenté comme un fils naturel de Jacques II également. Mais cette   princesse trop curieuse a pu confondre Berwick et Warwick.    Pour  savoir quelles analogies existaient entre le Masque de fer et Warwick , interrogeons l’ouvrage de Esprit Joseph Chaudon (1776), Les imposteurs démasqués et les usurpateurs punis ou histoire de plusieurs aventuriers qui, ayant pris la qualité d'Empereur, de Roi, de prince ... ont fini leur vie dans l'obscurité. Il s'inspire pour l'Angleterre du Père Pierre  Joseph d'Orléans et de son Histoire des révolutions d'Angleterre, 1689.
Il s'agit du faux Edouard Plantagenet, duc  de Warwick (p.314 et suivantes), en réalité Lambert Sinnel, que son tuteur, le prêtre Richard Simondi, dressa à imiter parfaitement le maintien du vrai duc qu'il n'avait pourtant jamais vu.
Sans entrer dans le détail de la révolution qu'il suscita pour prendre le trône vers 1486,disons que son mentor et lui-même   furent finalement vaincus et que le roi vainqueur , Henri VII (et non Guillaume III), "ne voulut point leur ôter la vie pour les faire servir plus longtemps d'exemple; le prêtre fut confiné dans une prison inconnue, où il passa le reste de ses jours , et le jeune homme dans une cuisine du palais, où, par un jeu bizarre de la fortune, après avoir assez bien fait un personnage pour lequel il n'était pas né, il s'acquitta de celui qui était qui était conforme à sa naissance. On l'en tira quelque temps après pour le faire fauconnier, et ce fut là que se terminèrent sa royauté et ses honneurs. On dit qu'Henri se donna un jour le plaisir méchant de faire servir des députés irlandais [qui avaient pris parti pour lui lors de ses complots], dans un repas qu'il leur donnait, par ce roi imaginaire. Il punit peut- être mieux par ce trait, dit le Père d'Orléans, la vanité de l'un et la crédulité des autres, que par un châtiment éclatant".
  On songe au Masque de fer devenu le valet de Fouquet qui avait certainement  connu le secret de son existence et dont Louis XIV avait redouté qu'il ne prenne son parti. La devise de Fouquet dont le nom signifie écureuil portait en latin : Quo non ascendam ? Jusqu’où ne monterai-je pas ? 5jusqu’à la royauté ou du moins la place de premier Ministre]. Comme le dit  M. de Chamillart (Voltaire, Réponse à La Beaumelle), l'homme masqué "connaissait tous les secrets de M. Fouquet", entendons le secret de sa disgrâce s'il avait vraiment voulu soutenir ses prétentions un jour. Fouquet savait tout, avant même son incarcération, de l'existence de cet héritier de la couronne, grâce à son cousin Fouquet de Croissy de Marcilly  qui donna au Masque, comme nous le verrons, son nom de Marcilly. C’'est peut-être  l'une des causes, la plus profonde en tout cas, de sa condamnation dont Louis XIV souhaitait qu'elle soit la  mort et qu'il aggrava par un acte personnel. Les papiers dont le ministre déplorera auprès de son geôlier Saint- Mars qu'il les ait laissé prendre à son fils après sa mort auraient pu contenir des indications sur l'identité de notre prisonnier.
  Autre indice donné à regret par Louis XV à sa fille qui insistait, et qui écarte seulement une fausse piste : son emprisonnement « n'a fait de tort qu'à lui- même », c'est- à- dire que ce n'est pas Mattioli , marié et père de famille, vivant avec sa famille et la faisant vivre, au contraire de notre homme Masqué.
  La question du valet (servant en anglais) ou le pseudonyme de Matteo Battaglia au moment de l'arrestation et la profession de valet (servant en anglais) de Portail, secrétaire de Msgr Bellings.
  "Comme ce n'est qu'un valet..." a écrit Louvois  à Saint- Mars le 19 juillet 1669 à propos du Masque de fer. Cette phrase a fait couler beaucoup d’encre, inspirant même une étude d'Andrew Lang, The Valet’s Tragedy, où il avance l'ingénieuse hypothèse de Martin, le valet de Roux : mais celui-ci semble bien être prudemment resté en Angleterre après le supplice du protestant Roux de Marsilly, lequel connaissait l'identité du futur homme masqué et entendait bien s'en servir dans sa conjuration internationale (Suède, Suisse, Hollande, Angleterre, Espagne) pour déposer Louis XIV.
 Nous exploitons des ouvrages anglais et américain dans ce blog, en particulier celui de Monseigneur Barnes. Et précisément,  Monsignor Arthur Stapylton Barnes nous donne une partie de la réponse nous dans son ouvrage The Man of the Mask, a study of the by- ways of history, 1908, p.250, avec pour références State Papers (Domestic) , 1668- 1669, p.312: le 6 mai 1669, un passeport est émis directement par le roi d'Angleterre Jaques II, alors que les passeports étaient normalement délivrés par le ministère des affaires étrangères , au profit de Matteo Battaglia, , "king's servant", le valet du roi, afin de retourner en Italie pour trois ou quatre mois et de revenir à Londres. En somme ,c'est sous ce nom d'emprunt , Battaglia, que s'embarque le faux abbé Pregnani (encore un pseudonyme),alias le Masque de fer,  trahi et dénoncé par le perfide  Jacques II à qui il se fiait, et c'est  avec cette qualité de valet qu'il est arrêté à Calais  par le capitaine de Vauroy sur  un ordre de Louis XIV du 28 juillet 1669.Or Battaglia existait bien, mais loin d'être le valet de qui que ce fût, il était musicien ( peut -être faut-il voir là l'origine de la rumeur dont la phrase de Voltaire est l'écho : "il jouait de la guitare") et maître de chapelle de la reine à Saint James . Le vrai Battaglia n'alla pas en Italie cette année- là. La question du valet, pour nous, est donc réglée.
Le pseudonyme donné au Masque après son arrestation par Louis XIV: Eustache Dauger ou Danger.
Lorsque, le 28 juillet 1669, Louis XIV dans une lettre à Saint- Mars, évoque "le nommé"... (en blanc )" et que dans sa réponse du 21 août à Louvois Saint-Mars parle du "nommé Eustache d'Anger", il faut bien admettre qu il s’agit d’une personne qui n’a jamais existé réellement.   Eustache Dauger ou plutôt  Danger   (allusion à l’origine angevine de Fouquet de Croissy et des Fouquet en général) Pourquoi Danger, alias  d’Angers ? Parce que la famille de l’homme qui avait donné son nom à la naissance du fils d’Anne d’Autriche et de Villiers de Buckingham était un Fouquet d’origine angevine, seigneur de Marcilly- sur Maulne en Indre- et- Loire où l’on peut encore voir un très beau château appartenant à la famille angevine.
La naissance du futur masque à Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines) le 5 ? mars 1626 et le choix du nom de  Marcilly .
Je me suis librement inspiré des auteurs anglais ou américains : Andrew  Lang The tragedy of valet, appendice, à lire sur Google Books  et The mystery of James de la Cloche , 1903 ) ,  Rupppert Furneaux,The mas behind the maskj, , London,Cassel &Company,1954 ; enfin de Paul Sonnino, The man in the iron mask, a historical detective story, Rowman &Littlefield, Maryland, 2016.  J’ai découvert dans ce dernier, p 29, l’existence du diplomate, ami de la Reine, du Prince de Condé et de Retz selon Retz (Pléiade, ancienne édition, voir index et en particulier p.853, ou nouvelle édition p. 658-659) Antoine Fouquet de Croissy de Marcilly, propriétaire de Croissy-sur-Seine près de Saint-Germain –en- Laye  (Yvelines). Là, à deux pas de la cour de Saint-Germain-en-Laye, donc sans éveiller les soupçons, avec l’aide de la sage-femme Madame Perronette , dont le nom nous est livré par Marcel  Pagnol (Le secret du masque de fer), la reine accoucha d’un garçon qui fut ondoyé (il est catholique de naissance, deviendra calviniste, puis redeviendra catholique). Il reçut le prénom de Jacques (en l’honneur des Stuart et du roi d’Angleterre) et le nom de Marcilly. En effet, les  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille)  recouvre certainement celui du château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-Loire), propriété des Fouquet et en particulier du parlementaire Antoine  Fouquet de Croisset , mort en 1665 en son château, qui portait aussi le nom de seigneur de Marcilly et avait par dévouement pour la reine prêté son logis isolé pour abriter la naissance du futur Masque de fer.
  En effet, le  noms de Marchiel (registre mortuaire de Du Junca à la Bastille) , où l’on sent un « accentnitalien », écrit Paul Sonnino, recouvre  certainement le château de  Marcilly- sur-  Maulne près de Tours (Indre-et-loire), propriété des Fouquet et en particulier de Fouquet de Croissy. Le cardinal Mazarin prononçait Marcilly à l’italienne avec un l mouillé, soit Marchille ou Marchelle qui fut noté Marchiel sur ordre de Louis XIV, la graphie ci notant le son ch.
Quant à l’autre forme Marchialy, non attestée directement, elle  figurait peut-être dans un registre mortuaire aujourd’hui perdu et reproduit par Topin en un fac-simile peu lisible, réimprimé ensuite par Funck- Brentano dans ses Légendes de la Bastille . Tandis que le  registre du Junca  et sa forme de Marchiel, eux,  existent toujours , pour Marchially ( masquant la graphie  Marcally) ,  qui n’est pas directement attesté, on peut penser que le i ou le  y final peu audible chez Mazarin a été  correctement restitué, le a étant l’ erreur d’un  copiste . On peut rapprocher le souvenir de la prononciation ancienne  Chailly pour Chilly, le château de Mazarin qui a pu influencer, soit le scribe, soit Mazarin lui-même.        Songeons aussi à la conjuration du protestant Roux de Marsilly,  l'année  même de l'arrestation du Masque.  Le marquis Louis Des Champs de Marcilly , interrogé au moment de l’arrestation de Roux , indique que le nom du protestant «  était seulement Roux. » Pourquoi Roux rajouta-t-il ce nom de Marcilly à son patronyme, alors qu’il se disait républicain ? Parce qu’il voulait que ce titre de courtoisie sonne comme une menace de découverte de l'existence d'un fils aîné d’Anne d’Autriche appelé Marcilly et de l’usurpation du roi, donc de l'illégitimité du monarque de droit divin.
Le prétexte nous est indiqué par Paul Sonnino qui , grâce à de savantes recherches généalogiques , nous apprend que son frère, p.91, avait exploité des bois près de Pithiviers, dans la forêt de Chilleurs , à Chilleurs -aux- Bois,  et à Chilleurs- Montigny,  dans le  Loiret , se référant à une ferme de Marcilly comprise dans les bois ou bien à Marcilly-en- Villette, près d’Orléans. En trout cas, il ne semble pas avoir jamais eu de propriété à Marcilly. 
L’enfance du futur Masque.
Le futur Masque ne pouvait rester à Croissy. Aussi le logea-t-on dans l’Indre-et-Loir près de Tours au château de Marcilly-Fouquet. Par la suite, -nous utiliserons l‘information de Voltaire selon laquelle Richelieu s‘est occupé de  l‘enfant , - Richelieu utilisa les châteaux de sa maîtresse, Madamen la marquise d’Effiat  de Cinq-Mars, aussi bien le château de Cinq-Mars(la- Pile en Indre-et-Loire près de Chinon) que le château de Chilly (aujourd’hui Chilly-Mazarin près de Palaiseau dans l’Essonne). Richelieu considérait comme sien, selon Philippe Erlanger (Le mignon du roi, p. 10), ce château qui était plus près de Paris .

L’enfance du futur Masque : le baron de San –Marzo au château de Cinq-Mars-la- Pile
 Nous le retrouvons peut-être dans ce mystérieux prétendu frère aîné du futur marquis de Cinq-Mars(’amant du roi Louis XIII , le comploteur décapité) . Celui-ci qui aurait été dépouillé de ses prérogatives d’aînesse au profit de son prétendu frère puîné, au motif qu’il n’était pas très brillant et qu’il était porté vers la religion,  devint le  baron de Cinq-Mars , écrit correctement Saint- Mars. Le titre de baron de San-Marzo, dont se vantera l’imposteur napolitain, lequel a confié avoir eu en main ses papiers du Masque de fer, titre  qui a déjoué les recherches jusqu’à maintenant, est selon moi un souvenir de Cinq-Mars,
Le complot de Cinq-Mars avait pour but de renverser Louis XIII, soit en l’empoisonnant (ce qui a réussi après l‘échec du complot), soit d’une autre manière, puis d’instaurer une Régence au profit d’Anne d’Autriche en attendant la majorité du futur Masque, et de confier à Cinq-Mars –le vrai les fonctions de Premier ministre. L’existence d’un hériter méconnu de la couronne est le grand secret de l’opposition sous Louis XIII et sous Louis XIV, des complots de Cinq-Mars comme du protestant  Roux et du prince de Condé.  
La période des études à Nîmes
 Mais la politique l’emporta et il fut confié à des amis protestants des Cinq-Mars, leur religion devant écarter de lui toute tentation de disputer la royauté à son frère. Il  fut alors envoyé à Effiat près de Riom où il fut confié à des  protestants, les Portal dont il prend le nom (il le reprendra en  Angleterre).  Il ne faut pas oublier que le marquis d’Effiat est originaire de cette bourgade  d’Effiat située en Auvergne et qu’il avait confié à l’architecte Lemercier le soin de concevoir un projet de ville gigantesque que l’homme de l’art réalisa en fait pour Richelieu près de Chinon, dans la ville appelée Richelieu.
Il est ensuite confié à un gentilhomme d’Auvergne, « vieux champion des précédentes guerres civiles » (P. de Vaissière, La conjuration de Cinq-Mars, p.43, 47 ssq, 72), Josué d’Hondredieu de Chavanhac  et à son fils François, ainsi qu’à  ses deux beaux-frères François de Calvisson et Agnès (prénom porté par un homme) de Calvisson de Saint-Auban.
Or, Calvisson, près de Nîmes, est le lieu de naissance du  chef de la conjuration protestante Roux, comme des Arnauld (à la ferme d’impôts desquels Roux participe) et des Mazel, tous protestants languedociens. Ce sont eux qui trahiront à la fois  Roux et le Masque : Louis XIV remerciera même Pierre Mazel pour son aide lors de l‘arrestation de Roux : « nous avons bien voulu lui commettre, écrit le roi, une affaire de la dernière importance et qui regardait  la sûreté de notre propre personne ».
Le futur  Masque est ainsi confié aux de Calvisson, et,  protestant dès lors, il vit  à Avignon,  un comté qui ne dépendait pas de Louis XIV,  avec des séjours à Calvisson et à la ville voisine de Nîmes pour des études inachevées à la faculté protestante de théologie : il lui restera des marques importantes de cette formation.
Ses protecteurs  sont arrêtés en terre papale, à Avignon,  par une violation du droit des gens , comme d’habitude,  comme  Roux le sera  en Suisse.
Le fils de Chavanhac et ses deux beaux-frères Calvisson de Saint- Auban  rôdaient autour de Tarascon, et ils étaient d’intelligence avec le beau-frère de de Thou, l’évêque de Toulon. Après que Roux eut rencontré le futur Masque à Nîmes ou à Calvisson, il ajouta de façon provocante Marcilly à son nom, tandis que notre Masque devint Veiras.  Le nom de Veiras, pseudonyme qu’il reprendra en Irlande et en Angleterre, est l’anagramme de Villiers (nom de son père Villiers de Buckingham) et de Marsilly. 
 Citons encore quelques noms qui sont destinés à réapparaître dans la vie de notre héros lorsqu’il prendra le nom de Jacques de Lacloche du Bourg de Jersays Penchons-nous  d’abord sur ce nom, pour nous ridicule, de Lacloche. Il a été choisi comme traduction de Bellings, le nom  de  son maître, qui est la traduction anglaise  de l"irlandais cloca, le signal de la messe catholique. 
Dubourg est une allusion à Anne d’Autriche qui était une Habsbourg, nom où Habs -,  feint d’être pris pour la préposition latine abs ou ab  désignant  la provenance, et est traduit par du.
Il faut reconnaître dans la baronnie  de San Marzo le nom du Masque,   élevé avec le futur marquis de Cinq-Mars, cher au coeur du futur masque comme Henri de Rohan ; le marquis de Cinq-Mars   sera exécuté pour complot contre la vie du roi, après avoir été  le favori et l’amant de la reine qui l’a abandonné pour sauver la vie de son fils adultérin auprès de Richelieu..
Le nom de Jersays n’a rien à voir avec l’île anglo-normande de Jersey , contrairement àce qu’a cru Msgr Barnes, ni même avec  Jersey dans l’Eure, commune d’ Illiers –l’Evêque,  mais renvoie  à un ami de Cinq-Mars, le protestant Massu de Jerzays. M. de Jersays (avec cette orthographe) était l’amant en titre de la fille de Sully,  dame de Rohan. La fille de celle-ci,  dite demoiselle de Rohan avant qu’elle n’épouse un Chabot et ne fonde la famille des Rohan- Chabot, fut la maîtresse du meilleur ami de Cinq-Mars, protestant au demeurant, savoir Henri Massu, marquis de Ruvigny . C’est ce nom de Ruvigny qui se cache sous la forme de ce mystérieux marquisat de  Juvigny, legs imaginaire à ses héritiers  du  pseudo -Jacques de la Cloche de Jersays de Rohan etc. On retrouve donc tous ces noms de  Jersays, Henri de   Rohan (le chef des calvinistes français),  Ruvigny,  dans la vie de Jacques de La Cloche, et cela confirme l’identité de l’aspirant catholique de La Cloche et du protestant Veiras.
  Le futur Masque  eut d’autres protecteurs ;outre  les Fouquet,  citons Gaston d’Orléans, son demi-frère Buckingham plus jeune que lui de deux ans,  le grand-duc de Toscane, le grand- prévôt de Franche- Comté Borrey , Galaup de Chasteuil,  «le Très Grand auteur » de la société secrète des alchimistes et empoisonneurs,  Vasconcelos, autre membre important de cette société,  qui l’introduisit auprès de Richard Bellings et du grand aumônier lord Stuart d’Aubigny grâce à la reine d’Angleterre qui était née de Bragance. Le futur Masque   fréquenta surtout les régions indépendantes de Louis XIV comme le Comtat Venaissin, le  Languedoc, Nice,  la Franche -Comté espagnole et francophone , la Savoie, la Moselle actuelle,  l’Irlande,   les Flandres,   la Suisse, le Luxembourg, la  Hollande(c’est à La Haye qu’ il rencontre le chef des calvinistes ,Henri de Rohan), l’Irlande. 
La conjuration du protestant  Roux
 Il  existait dans l'entourage de Roux un autre valet que ce Martin qui passionna A. Lang,   quelqu'un qui avait été valet en Angleterre (servant en anglais) et appelé Portal ou Portail , puis Veiras (Veiras , de veirs, est l’anagramme de Villiers [de Buckingham] et de Marsilly).
Le livre de Sonnino nous donne la meilleure biographie de Roux, p. 90 qq, grâce à ses savantes recherches généalogiques ; on y apprend , par exemple,  p.90,  (mariage du 21 octobre 1643 de Marie Chapuzeau , fille d’un juriste du conseil privé du roi, et de Jean Roux, l’exploitant forestier, de Chilleurs que Henri II de Bourbon, Prince de Condé, initialement calviniste,  et son beau-frère le duc de Longueville, sont témoins au mariage d’un parent de Roux, -ce qui montre les implications de son complot.
Portal, puis surtout Veiras, alias le Masque, à Londres avec la conjuration de Roux de Marcilly.
  Dans une note annexée à une lettre de Croissy, ambassadeur du roi de France, en date du 15 juin 1669, une semaine avant l’arrestation du Masque, Croissy écrit  qu'à l'annonce qui lui est faite de la capture de Roux, Veiras (le futur Masque) répond: " que cela ne pouvait être et qu'il en venait de recevoir une lettre qu'on croit être du 1er mai, par laquelle il mandait qu'il était suivi, mais qu'il leur taillerait encore bien de la besogne... » L’ambassadeur continue : « On est averti qu'il y a depuis six ou sept mois à Londres un nommé Veiras qui est de Languedoc, et de la R. P. R. (Religion Prétendue Réformée, calvinistes), lequel a de grandes habitudes avec le nommé Roux de Marsilly, en sorte que l'un ne faisait rien sans la participation de l'autre et étaient enfermés les nuits entières chiffrant conjointement ; ce Veiras se dit envoyé de ceux de la RPR de France, il est protégé par le comte d'Orreri qui a l 'habitude de l'employer en Irlande, à cause de la proposition que ledit Veiras lui a faite d'amener quantité de Français audit pays .Il fréquente souvent chez le duc de Buckingham  et milord Arlington et allait aussi chez l'ambassadeur d'Espagne."
  L'ambassadeur du roi de France à Londres écrit  encore: "m'étant enquis de ce Veiras dont je vous ai écrit, j'ai su de plusieurs endroits qu'il était le camarade (de Roux de) Marsilly, aussi méchant que lui, employé dans les mêmes affaires, dont il a une entière connaissance et les continue encore. Il est du même pays, était autrefois servant (valet, secrétaire,  de Bellings en Irlande ) sous le nom de Portal ) ;  depuis ,s'étant intrigué dans des cabales et ayant parlé contre le roi d'Angleterre et le gouvernement, il fut condamné à un bannissement perpétuel , nonobstant lequel il est revenu sous le nom de Veiras, s'est associé avec Roux, a reçu des lettres de ce scélérat pendant qu'il était en Suisse, a un chiffre avec lui, et depuis sa détention (celle de Roux) continue ces mêmes pratiques; il a vu souvent l'ambassadeur d'Espagne et on croit qu'il en a aussi tiré de l'argent.
 «  Le même homme  qui m'a donné cet avis [ l’acolyte jésuite que le Pape avait donné à Jacques de la Cloche, alias Veiras,  pour l’accompagner dans sa mission en Angleterre, mais dont il s’était débarrassé],  que je dois vous dire , Monsieur, avoir été ami dudit Veiras, avoir gardé ses papiers et ne s'être brouillé que sur des dettes [argent promis s’il le débarrassait de sa présence] et prétentions [d'être le roi légitime de France], m ' a dit que le voulant faire arrêter, et ayant su que le comte d'Orrery  le protégeait auprès du duc de Buckingham, il avait voulu en parler au duc, mais que l'un de ses domestiques [de Buckingham], qui est de ses amis, lui avait dit de n'en rien faire, que Veiras était fort bien avec ledit duc [son demi- frère] , et que lorsqu'il ordonne à ses gens de dire à ceux qui le viennent voir qu'il n'y est pas, il en exceptait toujours celui- là avec lequel il était quelquefois des heures enfermé [précaution pour éviter que sa ressemblance avec le roi de France et avec le duc ne puisse être remarquée]; ce donneur d'avis  s'est même offert de faire arrêter ce Veiras sous le prétexte de son premier bannissement et dit qu'il a un témoin qui est le secrétaire d'un évêque qui lui soutiendra ce qu'il a dit , encore depuis peu ,  de la personne du roi d'Angleterre et de son gouvernement". De Lionne lui répond : "le roi ne veut pas non plus que vous fassiez aucune instance au roi d’Angleterre, de quelque nature qu'elle soit,  sur le sujet de Veiras; abandonnant cet homme à sa mauvaise conduite dont Dieu pourra fournir quelque jour les moyens de ne pas la laisser impunie".Bel exemple de feinte clémence chez un roi qui ne nous y a guère habitués.
  Jacques de Lacloche, lorsqu’il prendra ce pseudonyme, donnera une version édulcorée de son bannissement par le roi en forgeant une  lettre censée
prêtée à Jacques II en date du  8 août 1668 où il évoque l’interception de ses courriers et ses conséquences : « nous fûmes obligés […] de consentir, aux occasions, à plusieurs choses  tournant au désavantage de plusieurs catholiques de notre royaume d’Hybernie (l’Irlande) », savoir son bannissement. 
  Dans un autre rapport, on lit :"Le papier ci- joint  qui contient un projet de requête des religionnaires (protestants) de France  au Roy de la Grande-Bretagne a été pris audit Veiras, et est écrit, à ce qu'on assure, de sa main, que Roux de Marsilly reconnaîtra". Il serait intéressant de pouvoir comparer l'écriture et les idées avec celles des textes de Jacques Stuart de Lacloche.  Le Ministre de Lionne écrivit aussi à son ambassadeur : "Roux ayant fait savoir au roi qu'il désirait la grâce  de lui pouvoir parler pour lui révéler des choses qu'il ne pouvait confier qu'à sa seule personne, Sa Majesté n'a pas voulu le voir et m'a envoyé à la Bastille" à deux reprises ; voulait-il lui révéler l'identité et les prétentions du demi- frère du roi, le trahissant et  révélant  au roi de France qu‘il avait pris l‘identité de Veiras? Le roi d’Angleterre n’avait- il plus, dès lors,  qu’à indiquer à Louis XIV la date de son arrivée à Calais  et sa fausse identité de «  Matteo Battaglia, valet du roi  et musicien »? Que signifient d'autre part les paroles « effroyables » qu'il prononce contre le roi sur la roue et comment Louis XIV peut- il dire : "M. le lieutenant criminel, nous voilà débarrassés d'un bien méchant homme" ? 
Les trois  pseudonymes Henri Cromwell ( nom du  fils puîné du fondateur de la république anglaise et du responsable de la décapitation du roi)  porté par le futur Masque en Irlande, alias qui disparaît mystérieusement après 1659 ou plutôt auquel succède ,  toujours en Irlande, celui de Portal: la rumeur rapportée par son futur geôlier Saint- Mars parle , à propos du Masque de fer, d’un fils de Cromwell , l’aîné , Richard) et Henri de Rohan annoncent la couleur car ce dernier  ,”à nous très connu et intime”,  écrit Jacques de Lacloche en signant du roi d’Angleterre, était le chef des calvinistes.  Curieux choix de pseudo pour un nouveau converti au catholicisme.
Le pseudonyme de Borrey, grand- prévôt de la Franche- Comté espagnole, ami de Roux et l’accompagnant en Suisse, est mal relevé  et transcrit par erreur Bovere (un Bover a été le transcripteur, semble-t-il, de là l’erreur) dans l ‘état- civil du comparse de Jacques de Lacloche, celui qui lui a volé des papiers.
De qui ce  Portal  fut-il le servant, le valet, disons plutôt  le secrétaire particulier, l'homme de confiance? Du noble  Irlandais Richard Bellings (né à Dublin 1600? -1677), catholique, secrétaire de la Confédération irlandaise en 1642,  secrétaire particulier de la reine- mère Henriette-Marie à Somerset House  (de qui Bellings tint  son secrétaire Portal) et messager secret de Jacques II, envoyé , fin 1962,  par le roi d'Angleterre à Rome  avec Portal,  pour négocier l'accession au cardinalat de lord d'Aubigny ainsi que la conversion secrète, en prime en quelque sorte, du roi au catholicisme, si le chapeau de cardinal était accordé à son parent. C'est à Richard Bellings, pour qui il éprouva une grande admiration, que le Masque  dut sa conversion au catholicisme. Quelles furent les deux causes de la condamnation de Portal au bannissement perpétuel?
Première cause du bannissement du futur Masque : des vues trop hardies sur la liberté de conscience.
 Notre secrétaire rédige des lettres au pape et il les signe du nom de Jacques II : surtout, il va trop loin dans ce qu'il fait écrire au chef de l'Eglise anglicane, même en latin.
"(Le roi) déclare qu’il déteste le déplorable schisme et l'enseignement hérétique introduit par Luther, Zwingli, Calvin, Menon [fondateur des Menonites aux Pays-Bas], Socinius pour Sodinius, Brown [Robert Brown , fondateur du Congrégationnisme], et autres maudites créatures de cette sorte, car il sait d'amère expérience, et mieux que personne dans ses trois royaumes de Grande-Bretagne, d'Ecosse et d'Irlande, quels puissants démons ont été introduits par la soi-disant Réformation, qui mériterait d'être appelée la Déformation. Car cela a jeté bas tout gouvernement établi et a introduit une confusion digne de la tour de Babel à la fois dans l'Eglise et dans l'Etat". « Remarquable déclaration de foi », constate sereinement le catholique Msgr. Barnes, p.155, 1908, à comparer avec les déclarations signées de Jacques de La Cloche (lettre du  7 septembre 1668) : « la religion protestante, à laquelle nous faisons semblant d‘être attaché plus que jamais, quoique devant dieu qui connaît les cœurs nous l‘abhorrions comme très fausse et pernicieuse… » Suivent 24 notes très hardies, annonciatrices de la constitution civile du clergé sous la Révolution française, en faveur d'une Réunion concordataire de la papauté et de l'Angleterre, Barnes,   P. 155-156, et  Laloy, Enigmes du grand siècle, 1913, p, 17 : "Les archevêques et évêques en fonction qui donneraient leur adhésion à ce concordat devraient être confirmés par trois légats apostoliques nommés pour cela uniquement. L'archevêque de Cantorbéry  deviendrait le patriarche des trois royaumes et le chef de l'administration ecclésiastique, sauf dans certaines matières réservées à un légat ad hoc, qui devrait être de nationalité anglaise et résider en Angleterre. Le reste du gouvernement de l'Eglise serait dirigé par des synodes diocésains annuels et par un concile national se réunissant à des dates fixes. Le roi nommerait les évêques et les biens de l'Eglise confisqués seraient maintenus à leurs possesseurs actuels. Les prêtres mariés conserveraient leur femme, mais ceux qui seraient ordonnés par la suite observeraient le célibat. La messe serait célébrée en latin, mais accompagnée de cantiques en anglais, et l'Eucharistie serait donnée sous les deux espèces à ceux qui le souhaiteraient. La liberté de conscience serait accordée à tous, ni Charles ni ses successeurs ne pourraient être obligés de traiter cruellement les Protestants Quelques congrégations seraient autorisées, même les jésuites dans l’enseignement, ainsi que d'autres pour les soins hospitaliers.".
  Seconde cause du bannissement : les menaces contre le Pape
Bellings et le futur Masque ont rendu visite au cardinal de Retz à Paris sur la route de Rome.  Notre Masque,  sous le pseudonyme de Retz, va à Hambourg,  d’ où il menace le Pape d'expédier une flotte de vingt navires devant Civita-  Vecchia s'il n'obtempère pas à la demande de cardinalat pour lord d’Aubigny.
  Après sa condamnation au bannissement, Portal change de pseudonyme et  devient le protestant Veiras , anagramme de Villiers (de Buckingham) et de Marcilly, et entre dans la conjuration de Roux pour prendre le pouvoir en France. Il joue là un jeu difficile : en 1669, il est à la fois le catholique faux abbé Pregiani auprès du roi Louis XIV et le protestant Veiras auprès de Roux,très républicain.
Il nous reste à étudier deux épisodes importants de sa vie : l’épisode romain et l’épisode anglais.
I L’épisode romain : Jacques de la Coche.
La conversion à Rome au catholicisme : le novice jésuite répondant au pseudonyme de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay.                 
 Le futur masque   n’avait pas de certificat de  baptême et ne pouvait aucunement prouver son identité. Il lui en fallait un s’il voulait devenir novice. Qu’à cela ne tienne ! Il rédige en latin  un faux certificat qu’il signe de  l’ex-reine Christine de Suède, convertie au catholicisme et vivant à  Hambourg :
 « Jacques Stuart, incognito sous le nom de De la Cloche du Bourg, naquit dans l’île de Jersey (sic !) et il est le fils naturel de Jacques II,  roi d’Angleterre. Sa Majesté britannique nous a reconnu en privé qu’il était bien tel. Il fut élevé dans la secte calviniste, mais il l’a aujourd’hui quittée pour se joindre à la Sainte Eglise Romaine à Hambourg le 29 juillet 1667. Nous avons trouvé bon de confirmer et d’attester ceci de notre main, même si cela n’est pas dans nos habitudes, afin que dans sa situation extraordinaire il puisse être capable d’ouvrir son cœur à son directeur en confession et de chercher conseil pour le salut de son âme.
(Cachet) Christina Alexandra »
Il se garde bien de nous indiquer ses parrain et marraine. Il choisit aussi  le nom sous lequel il prétend s’être fait baptiser,  Jacques de Lacloche du Bourg de Jerzais,  en souvenir de l‘ami  protestant de Cinq-Mars . Pourtant, rappelons-le, notre Jacques de Lacloche de Jersay n’a aucune ascendance dans l’île anglo-normande de Jersey , il le reconnaît lui- même dans la lettre prêtée à Jacques II du 7 septembre 1668 : « Votre Révérendissime Paternité fera courir le bruit qu’il (Jacques de Lacloche) est allé à Jersé ou Hanton (le port de Southampton) voir sa mère prétendue qui se veut faire catholique, comme nous avons mis et dissimulé (cherché à faire croire) dans cette autre lettre »[lettre du 3 août et surtout du 29 août 1668: « nous lui avons ordonné d‘aller à Jersé et à Hanton (le port de Southampton) , …qu‘il feigne  à Votre Révérence qu‘il est fils d‘un riche prédicant, lequel étant mort depuis quelque temps , sa mère mue de quelque envie de se faire catholique et de lui donner le bien qui lui appartient, lui a écrit et qu‘ainsi Votre Révérendissime paternité, désireuse du salut de cette personne et de la faire catholique, voyant aussi qu’il peut avoir son bien, lui permettra facilement d’aller (en Angleterre) ».]
Un problème compliqué : les trois personnes impliquées dans le voyage sur Paris e t les deux abbés Prégiani, le vrai et le faux. .
 Le pape avait exigé la présence d’un autre novice francophone, dont nous savons seulement qu’il était languedocien, aux côtés de Jacques de la Cloche, ce qui ne pouvait plaire à ce dernier.  Il réussit à s’en débarrasser en lui promettant  peut-être de l’argent ; mais celui-ci le rejoindra en Angleterre et c’est lui qui le livrera.
   Toutefois, Jacques de la Cloche à Naples rencontra un autre français, qui avait peu de scrupules et lui vola son identité. Cet escroc  s’éprit de la fille de sa logeuse à Naples.  Malheureusement pour lui, il mourut quelques mois après le mariage,  le  7 septembre 1669  et on l’a pris pour Jacques de la Cloche.
Il nous faut réfuter la thèse généralement adoptée aujourd'hui qui  fait mourir Jacques de La Cloche lui-même  à Naples le 7 septembre 1669 .Il s’agit manifestement , non de Jacques de la Cloche, mais de l’escroc qui lui a volé son identité. De même l’abbé Prigiani auquel Jacques de la Cloche empruntera son nom survivra à l’arrestation du faux Prégiani, le Masque de fer. Primi Visconti , dans ses Mémoires,  le signale à Rome  où il meurt en 1779, de syphilis. Mais ce n’est pas le Masque de fer.
Le départ de Rome pour l’Angleterre ou exit Jacques de La Cloche et l’apparition du faux  abbé Prégiani.
Ainsi, notre ancien membre de la Religion Prétendue Réformée, Portal, puis Veiras, s’était converti au catholicisme et il était même devenu novice à Rome chez les jésuites,  sous le nom de Jacques Stuart de Lacloche du Bourg de Jersay. Il forge diverses lettres qu'il signe de Jacques II,  roi d'Angleterre ,dont des actes de reconnaissance du roi Jacques II comme étant son fils naturel, puis se fait rappeler à Londres par une fausse lettre de celui-ci au général des jésuites .Une autre lettre du roi ( en réalité de notre Jacques lui-même), d'une naïveté touchante , témoigne de l'ennui que cause au roi  pour son fils bien- aimé cette obligation faite aux jésuites de voyager accompagné par un acolyte , règle dont le roi  demande , en vain, l'exemption au général des jésuites . Le roi (entendons Jacques de Lacloche) interdit à son prétendu fils de le rejoindre en Angleterre avec un jésuite italien : même si c’est un Français, celui-ci ne devra pas l’accompagner en Angleterre. C’est ce que le général des jésuites acceptera  en partie en donnant au  futur faux abbé Prégiani un acolyte  francophone, dont jacquyes de la Cloche se débarrasser avant d’atteindre Naples, mais qui le rejoindra en Angleterre et le trahira.     Au lieu de se rendre à Libourne  pour gagner Paris et Londres, ils prennent tous deux la direction inverse et arrivent à Naples, patrie du vrai abbé Prigiani (un  agent du grand-duc de Toscane et affidé de  la société secrète  des alchimistes). A  Naples résidait  un abbé  de San Aniello , faisant partie    des chanoines réguliers de Saint-Sauveur  , et Jacques de La Cloche se fait confesser par lui : "Jacques poursuivit avec une grande fréquence et ferveur ses exercices de religion... Il ne donna sur lui - même à ce confesseur que des renseignements équivoques et obscurs, disant que son père était un grand seigneur anglais (le duc de Buckingham, protestant)  et que sa mère, également de grande maison, professait la vraie foi de l’Eglise  romaine (l'espagnole et catholique Anne d’Autriche) ; il avait lui- même abjuré l'hérésie et s'était converti, éclairé par d'excellents religieux (Bellings)."  
  Tandis qu'il se livre à ses exercices religieux,l’ escroc qui lui avait volé son identité tombe amoureux de la logeuse d'une l'auberge et, la mariée attendant un héritier,  il doit se marier d'urgence le 10 février 1669, sous le nom ronflant de dom Jacobus Henricus de Boveri (Borrei, le prévôt de Franche-Comté) Roano (Henri de Rohan),  anglicani (calviniste) et  baron de San Marzo .   Dans son testament, sur son lit se mort, il fait des dons fastueux, engageant un marquisat imaginaire de Juvignis, valant 300 000 doublons et plus : selon nous, c’est l’altération du nom du  marquis de Ruvigny, le protestant qui était l’ami de Cinq-Mars et l’amant de Mademoiselle  de Rohan.
  Avant la célébration du mariage,   Jacques  de Lacloche  , sous le nom de Jacques Stuart, le quitte en lui laissant une partie des doublons remis par le général des jésuites, trop heureux de se retrouver libre et seul.  On remarque que son acolyte en parle comme d’un chevalier appartenant à l’Ordre de Malte. Or, le «Très Grand  Auteur » de la société secrète des alchimistes,  François Galaup de Chasteuil, se faisait appeler” le chevalier”  et,  en 1644, il était devenu chevalier de l'ordre de Malte, car il avait rendu à l'ordre des services signalés : le grand- maître en personne, Lascaris, avait attaché sur sa poitrine la croix d'honneur.  Jacques de Lacloche se rend à Paris en passant justement par le château italien appartenant à Galaup de Chasteuil, le château de Verceil, où il reçoit argent et  mission.
  Il  rend aussi, probablement, visite au grand-duc de Toscane  qui lui confirme sa mission et rend visite à Henriette d’Angleterre,  puis arrive à Londres où il rencontre Jacques II.
  Que prétendait faire le frère aîné de Louis XIV en soutenant le complot de Roux  de Marcilly d’une part et d’autre part en jouant le convertisseur au catholicisme de Jacques II,   lui l’ancien calviniste? Pourquoi ce plan, fou en apparence,  l’amenant à se dire le fils naturel de Jacques II, ce qu’il savait être faux?
  Il voulait , d’une part, en ramenant le royaume d’Angleterre dans le sein de l’Eglise , faire ce que réussit à sa place Dom John Hudletone qui donna l’extrême onction catholique à Jacques II, le convertissant in extremis le 5 février 1685.
Mais, pour cela, il fallait que le  futur Masque puisse approcher le roi sans donner de soupçon à la cour que « le papisme et les sabots », voire les jésuites , rôdaient : tel est  le but du stratagème du faux abbé soi-disant théatin (donc non- jésuite) Prégiani approchant le roi sous couleur d’astrologie et d’expériences de chimie et celui de l’invention d’un fils naturel du roi.
  Ignorant des difficultés que la papauté lui opposerait nécessairement puisqu’on ne peut être catholique en secret ni ordonné prêtre sans attester de son identité, naïf en somme, il écrit sous la signature de son père supposé Jacques II (lettre du 3 avril 1668) : 
« il y a longtemps que nous prions Dieu de nous faire naître l’occasion de pouvoir trouver une seule personne dans nos royaumes de qui nous puissions nous fier touchant l’affaire de notre salut sans donner ombrage à notre cour que nous fussions catholique.  La providence de Dieu a pourvu et secondé nos désirs, nous faisant naître ( !) à la religion catholique un fils auquel seul nous pouvons nous fier dans une affaire si délicate. Il sera toujours assez capable pour nous administrer en secret les sacrements de la confession et de la communion (la conversion au catholicisme) que nous désirons recevoir au plus tôt. »
Le faux Jacques II continue : « Si notre cher et bien aimé fils n’est prêtre , et s’il ne peut pas l’être sans faire savoir publiquement son véritable nom et sa naissance [autre que Jacques de La Cloche ], ou pour autres circonstances (ce que nous disons pour ne savoir pas votre manière d’agir en ces rencontres) . En ce cas, qu’il ne se fasse plutôt point prêtre à Rome que de rien dire aux évêques ou prêtres qui il est, mais  qu’il passe par Paris… Le roi et Henriette d’Angleterre trouveront et auront le pouvoir de le faire prêtre, sans que l’on sache qui il est et avec tout le secret possible, comme nous nous persuadons. Si ce n’est que, sans tant de détours, il aime mieux venir à nous sans être prêtre, ce qui sera peut- être le mieux, puisque nous pourrons faire la même chose par le moyen de la reine notre honorée mère ou de la reine régente qui pourront avoir à leur volonté évêques, missionnaires ou autres, pour faire la fonction, sans que l’on sache et s’aperçoive de quoi que ce soit. »
A noter le lapsus calami freudien révélateur: au lieu de la reine régnante (il s’agit de la femme du roi d‘Angleterre, lettre du 3 août 1668), le futur masque écrit la reine régente. Il récidive dans sa lettre du 29 août, tant l’idée de sa propre régence  lui tient à cœur.
Sur le même point (lettre du 29 août 1668) : « S’il y a quelque chose que l’évêque ordinaire (de Londres) ne puisse pas faire sans permission de  Sa Sainteté, que (Jacques de La Cloche) ne manque pas de  pourvoir très secrètement (à son ordination), en telle sorte qu’on ne vienne point à savoir qui il est ; ce qu’il fera,  s’il peut, auparavant que de partir de Rome. »   Le 4 août, il semble se résigner volontiers à ne pas devenir prêtre, prétextant que ses forces et sa constitution sont trop faibles Et puis « On peut être bon catholique sans être religieux.» Passez muscade ! Bref, il y avait trop de difficultés pour être ordonné, si bien que l’invention d’un abbé alchimiste et astrologue se révèle indispensable. Exit Jacques de La Cloche!
2 L’épisode anglais et  le faux abbé Prégiani, agent de Louis XIV ( !) destiné à convertir secrètement le roi d’Angleterre au catholicisme.
Nous employons l'orthographe Prégiani, distinction très relative, mais commode,  pour différencier le faux  abbé du vrai dont nous orthographions le patronyme  Prigiani, abbé napolitain qui a survécu à l'arrestation du Masque, et qui mourut à Naples - ce qui a amené à tort Barnes et Laloy à revoir leur copie lorsqu'ils ont été persuadés que l'abbé Pregiani et le Masque de fer ne pouvaient être le même homme. C'est ce faux abbé Pregiani qui, sous le nom de Matteo Battaglia, valet (servant) du roi, sera arrêté par le major de Vauroy aux alentours de Dunkerque deux jours après le départ signalé de notre abbé pour l'Italie  en passant par Paris.
 Le signe qu'il s'agit bien de notre homme nous est donné par Jacques II dans une lettre chiffrée   en anglais, du 20 janvier 1669, à sa soeur  Madame Henriette d’Angleterre, duchesse d’Orléans.  Louis XIV détruira cet  échange de correspondance après la date du 24 juin 1669, nous privant, bien entendu,  de ce qui concerne le secret du Masque de fer . Il reste la lettre de Jacques II à sa sœur Henriette : "j'en étais arrivé ici de ma  lettre, quand je reçus la vôtre par l'Italien dont vous ne connaissez pas le nom ni la qualité ( !), et il me la remit dans un passage où il faisait si noir que je ne reconnaîtrais pas sa figure si je le voyais de nouveau (ceci se passe au palais de Whitehall!) Cet homme réussira sans doute (ironie) puisque sa recommandation (il n’en aucune puisque Henriette ne connaît, écrit-elle, ni son nom ni sa qualité) et sa réception (dans le noir) s’harmonisent si bien. » Le roi est aussi prudent que sa soeur : ils ne  veulent pas avoir aperçu la ressemblance criante entre le messager italien et Louis XIV.
  Le même tabou d’évitement se retrouve dans le comportement de Louis XIV vis- vis du faux abbé,  tel que son ministre  de Lionne en fait part à son ambassadeur à Londres le 13 février 1669 :"Sa Majesté  défend  (à l'abbé) de rien écrire ici, tant qu'il sera en Angleterre, non pas même à moi, Sa Majesté ne voulant rien connaître que par votre seul canal, comme il est juste; et que par conséquent, quelque chose qu'on lui pût dire dont on lui demandât le secret à votre égard, il doit vous le dire tout; et que s'il manquait à cela, et qu'il le fît passer ici sans votre participation, Sa Majesté, quelque avantageuse que lui pût être la chose, lui enverrait aussitôt ordre de s'en revenir".
Les trois missions secrètes  de l'abbé sont fort embrouillées :
1)La seule dont l'ambassadeur ait connaissance consiste dans la négociation du traité secret de Douvres par lequel la France, catholique  s'unit à la protestante Angleterre contre la protestante Hollande, avec en plus   un salaire versé secrètement au roi d'Angleterre. Sont au courant seulement le roi de France, l'ambassadeur à Londres, le ministre de Lionne , le roi d'Angleterre et sa soeur Henriette , puis,  rapidement,  par les indiscrétions de l'ambassadeur, l'abbé et son demi-frère le ministre protestant Buckingham.
  2) Mais  ce n'est là que l'aspect le plus clair de sa mission : pour doubler l'ambassadeur dont c'est pourtant la fonction, le roi de France a consenti  à  envoyer, sur la demande de Jacques II ,  un abbé en apparence astrologue et chimiste sous le prétexte de la première mission, mais en réalité destiné à enseigner secrètement à Jacques II les éléments du catholicisme pour le préparer à sa conversion.  Seuls Jacques II, sa soeur Henriette et l'abbé sont au courant de son désir secret de se convertir : c’est ce que Charles appelle le "grand secret" dont Msgr Barnes raconte très bien les détails. On trouvera , après la mort de Jacques II, dans sa poche,  avec des reliques  liées également à quelqu'un  qu'il a trahi (l’abbé), des papiers de controverse religieuse rédigés par l'abbé en français (Barnes, op. cit, . p.262), le texte français se trouvant dans les archives du Vatican, et une autre version existant,  traduite en anglais, -tout ceci  montrant que l'abbé (précédemment le séminariste jésuite Jacques de La Cloche) s'est bien acquitté de la mission voulue par Jacques II, mission dont Louis XIV se souciait  comme d'une guigne et qu'il ne lui avait aucunement confiée, puisqu'il ignorait le désir de Jacques II de passer au catholicisme secrètement .  Le roi d’Angleterre préfèrera trahir l'abbé plutôt que celui qui le stipendie, le roi de France,  et lui indiquera la date où l'abbé quitte l'Angleterre et sous quelle identité (celle du  valet Battaglia).
3) Mais la mission la plus secrète et la plus invraisemblable,c’est celle que Louis IV  confia, non sans  hésitation ,  au faux abbé Pregiani, peut-être sur l’imprudente  demande de ce dernier  auprès de  la seule intermédiaire que le roi acceptait, Henriette d’Angleterre : cette mission  consistait à donner au roi de France des informations sur l'homme qui se faisait passer pour l'héritier légitime de la couronne de France,  Veiras, l’homme qui était le fer de lance et l'arme secrète de la conjuration de Roux de Marsilly, -cet homme  qui n'était autre que lui-même ! 
 Pourtant, Louis XIV, méfiant, n’accepte, ni  de  rencontrer l’abbé,  ni  de recevoir de missive de sa part. Lorsque,  plus tard , le roi de France voudra s'enquérir auprès de Fouquet  si Eustache Dauger, emprisonné avec lui et lui servant de valet, c’est-à-dire l’abbé Prigiani , avait révélé devant l'autre valet de Fouquet, Larivière,  "ce  à quoi il avait été employé (par le roi Louis XIV-le passif impersonnel est révélateur!) avant son arrestation" ,  ce n'est que de la 3e mission qu"il s'agit, celle qui révèle l'inquiétude du roi sur l’identité du  prétendant. Et ceci démontre bien que Fouquet savait tout avant son incarcération à Pignerol en 1661. De même, lorsque Jacques II écrit à sa soeur le 7 mars 1669 : "J'ai constaté que l'abbé Pregnani avait beaucoup d'esprit, mais vous pouvez être sûre que je n'entrerai pas en liaison avec lui plus qu'il ne convient aux renseignements que vous m'en avez donnés" "Your character" signifie, non pas comme Laloy le traduit, p.74," à votre caractère", mais : à la description de l'individu).
  Richard Bellings est l'homme -clé qui a mis  en relation notre futur Masque et Jacques II : c’est Bellings qui  est intervenu à deux reprises comme représentant personnel secret de Jacques II , une première fois vis- vis du Saint-Siège pour négocier le chapeau de cardinal de lord d’Aubigny d'abord, puis une  seconde fois  vis- vis de Henriette d’Angleterre. Malgré le fait que le futur Masque  ait été trop loin la première fois et que,  condamné au bannissement, il ait dû changer de  pseudonyme, il est resté dans les meilleurs termes avec son maître.
 La lettre du 8 août 1668 (citée par Msgr  Barnes, op. cit., p.305 et 306) et fabriquée par Jacques de Lacloche annonce le plan qu'il mettra en oeuvre sous le pseudonyme  du faux abbé Pregiani : approcher Charles pour lui expliquer la supériorité du catholicisme sans donner de soupçons aux protestants, sous le prétexte qu'il serait son fils naturel, avant même  que le roi n’ait  songé au paravent de l'astrologie et des expériences de chimie, dès lors qu'il aura obtenu pour le souverain le privilège d'être catholique dans son for intérieur tout en demeurant provisoirement le chef de l'Eglise anglicane :"Quoiqu'il y ait eu ici (à Londres) une multitude de prêtres, tant au service de la reine dont une partie a habité dans nos palais de Saint- James et de Sommerset  -House, que dispersés dans toute notre ville de Londres, toutefois nous ne pouvons nous servir d'aucun, pour l'ombrage que nous pourrions donner à notre cour par la conversation de telles gens qui, sous quelques déguisements d'habits qu'ils puissent avoir, sont aussitôt reconnus pour ce qu'ils sont... Comme il (Jacques de La Cloche ) n'est ici connu en aucune façon, ...nous pouvons en toute sûreté converser avec lui et exercer en secret les mystères de la religion catholique, sans donner ombrage à qui que ce soit de notre cour que nous soyons catholique, ce que nous ne pouvons faire avec aucun missionneur ( anglicisme pour prêtre de paroisse), tant aussi pour la confiance que nous avons de lui ouvrir notre conscience avec toute liberté et sincérité, comme à une partie de nous-même ...Dieu s'en veut servir pour notre salut".
  La pierre d’achoppement, ce sera son identité sulfureuse et son soutien au protestant Roux de Marsilly, poussant le roi d’Angleterre à dénoncer son ami à celui qui le rémunère chaque mois : Louis XIV.


   





























































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